Début du ramadan, dans un climat politique toujours tendu sur l’islam

Début du ramadan, dans un climat politique toujours tendu sur l’islam

La majorité des musulmans français sont entrés jeudi en ramadan, mois de prière, de jeûne et de partage, marqué par la venue d...
Public Sénat

Par Benoît FAUCHET

Temps de lecture :

4 min

Publié le

La majorité des musulmans français sont entrés jeudi en ramadan, mois de prière, de jeûne et de partage, marqué par la venue d'imams étrangers, une présence contestée alors que la classe politique attend la structuration d'un "islam de France".

Le ramadan suscite un ensemble de pratiques socio-religieuses très populaires, avec selon des études 70% à 80% d'observants à des degrés divers et une fréquentation des mosquées plus soutenue parmi les quelque cinq millions de musulmans estimés en France.

Durant le ramadan, un des cinq piliers de l'islam, les croyants sont invités à s'abstenir de boire, de manger et d'avoir des relations sexuelles, de l'aube - dès que l'on peut "distinguer un fil blanc d'un fil noir" dit le Coran - jusqu'au coucher du soleil.

Le jeûne est prescrit aux musulmans pubères, mais des dispenses sont prévues pour les voyageurs, les malades, les personnes âgées, les femmes enceintes ou venant d'accoucher. Des compensations sont possibles pour les personnes empêchées ou dispensées (jeûne effectué ultérieurement, dons aux nécessiteux...).

Dans une quête d'ascèse et de purification, le fidèle médite le Coran et participe à des veillées de prière à la mosquée, animées grâce au renfort d"imams du ramadan" venus d'Algérie et du Maroc sous visa d'un mois: ils sont environ 300 cette année, à la faveur d'accords bilatéraux signés avec ces pays.

Cet accueil de récitateurs très appréciés par les fidèles pour la psalmodie coranique lors des prières supplémentaires du soir (tarawih) n'est pas nouveau. Mais il suscite cette fois des critiques dans la classe politique, à l'heure où la structuration d'un "islam de France" est très attendue.

- Aumône réévaluée -

"Demander aux Algériens, aux Marocains, au moment du mois de ramadan (...) de nous envoyer des imams, ça ne va pas", a estimé l'ancien Premier ministre et ex-ministre de l'Intérieur Manuel Valls, qui veut "couper tous les ponts avec les pays tiers".

Pour la présidente du FN, Marine Le Pen, "il est inacceptable que le ministère de l'Intérieur organise la venue de 300 imams étrangers dans notre pays pour le ramadan, c'est une violation de la laïcité lourde de conséquence". Son ancien allié à la présidentielle Nicolas Dupont-Aignan a pour sa part exigé de soumettre les imams, y compris ceux spécialement venus pour le ramadan, à un "serment de fidélité à la France et à la République".

"Ces récitateurs ne font ni le prêche du vendredi ni les cinq prières quotidiennes, c'est une fausse polémique", a déploré auprès de l'AFP Abdallah Zekri, délégué général du Conseil français du culte musulman (CFCM) et président de son Observatoire contre l'islamophobie.

Face aux controverses, le CFCM et les grandes fédérations de mosquées font front commun cette année. Dans un rare communiqué unitaire diffusé à la veille du ramadan, leurs responsables ont indiqué prier "Dieu pour que ce mois sacré (...) soit marqué par la piété, la solidarité et le partage" et souligné que "les musulmans de France sont profondément attachés à la laïcité et à la neutralité de l'État, garantes du libre exercice du culte".

Le CFCM accueillera-t-il, comme en 2017, le président Emmanuel Macron lors d'un "iftar", le repas de rupture du jeûne, qui donne au ramadan chaque soir une dimension conviviale voire festive? Alors que son agenda est chargé et que son plan pour un "islam de France" affranchi des influences extérieures n'est pas ficelé, le chef de l'Etat devrait y déléguer son Premier ministre Edouard Philippe, probablement début juin, indique-t-on de source proche du dossier.

Le ramadan s'achève par l'Aïd el-Fitr, la "fête de la rupture du jeûne", autour du 15 juin cette année. Nouveauté 2018: le montant de la zakât al-fitr, aumône obligatoire pour tout jeûneur au profit des plus démunis, qui n'avait pas changé depuis le passage à la monnaie européenne, a été réévalué de 5 à 7 euros par donneur.

Dans la même thématique

France Politics
11min

Politique

Budget, assurance chômage, Nouvelle-Calédonie… Les dossiers chauds qui attendent Michel Barnier

Après deux mois de flottement, de nombreux dossiers se sont accumulés sur le bureau du Premier ministre. Tout juste nommé, Michel Barnier va devoir relancer plusieurs réformes, mises à l’arrêt avec la dissolution. Néanmoins, la constitution d’un budget reste le premier saut d’obstacles pour le nouveau chef de gouvernement et sa future équipe ministérielle.

Le

NATO Summit
6min

Politique

« Depuis les élections législatives, l’autorité d’Emmanuel Macron s’est affaiblie en Europe et sur la scène internationale »

Ce vendredi, Emmanuel Macron rencontre Olaf Scholz sur les bords du lac Léman, à Évian-les-Bains. Le chef de l’Etat et le chef du gouvernement allemand participent à la nouvelle édition des rencontres franco-allemandes, un rendez-vous devenu incontournable dans les relations entre les deux pays. Alors que les deux hommes sont affaiblis sur la scène intérieure à la suite de revers électoraux, la professeure d'histoire et de civilisation allemande à Sorbonne Université, Hélène Miard-Delacroix, dresse un état des lieux des relations entre Paris et Berlin.

Le

France Politics
5min

Politique

« Ce n’est pas un amateur de punchlines », Michel Barnier raconté par ses soutiens au Sénat

Le nouveau Premier ministre au CV long comme le bras a été le troisième homme de la dernière primaire interne à LR. A cette époque, peu de sénateurs croyaient en ses chances de victoire. Ses soutiens de l’époque expliquent pourquoi ils avaient fait de lui leur favori. Ils décrivent un homme taillé pour exercer le pouvoir, beaucoup moins pour le conquérir.

Le