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Culture : Bachelot augmente les aides, les intermittents dénoncent des « mesurettes »
Par Public Sénat
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Vers 13 heures, un son de trompette résonne devant le théâtre de l’Odéon. Ce n’est pourtant pas la fête. Les intermittents occupent depuis une semaine le théâtre parisien et ça devrait encore durer. La rencontre en visioconférence, le matin même entre les représentants de la culture et le premier ministre Jean Castex et la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, ne les a pas rassurés.
Matignon et la ministre ont annoncé « la mobilisation de 20 millions d’euros supplémentaires, qui viendront s’ajouter aux 30 millions d’euros déjà prévus pour 2021 au titre du plan de relance » précise un communiqué. « Pour accompagner les intermittents qui ne peuvent bénéficier du dispositif de l’année blanche », le fonds spécial mis en place sera « abondé de 10 millions d’euros », soit 17 millions d’euros au total.
« Soutenir les équipes les plus en fragilité »
Avec les 20 millions d’euros, « on essaie de toucher les populations les plus difficiles. Et c’est bien les artistes qu’on vise, les compagnies de danse ou de théâtre », explique-t-on à Matignon. Ces aides « seront gérées principalement par les Drac (direction régionale des affaires culturelles), donc au plus près des territoires, avec l’objectif de soutenir les équipes les plus en fragilité », précise une conseillère du ministère de la Culture.
Concernant l’année blanche des intermittents, qui bénéficient jusqu’au 31 août 2021 d’une prise en charge par l’assurance chômage, « une mission a été confiée à André Gauron pour dresser un diagnostic de la situation des intermittents au 31 août 2021 et proposer une réponse adaptée. Aucune piste n’est à ce jour écartée », affirme le communiqué. Les conclusions sont attendues fin mars.
« Il faut un plan de soutien massif à la culture »
A la CGT spectacle, qui occupe le Théâtre de l’Odéon, on ne voit même pas le verre à moitié vide. « Il y a juste des gouttes au fond mais il y a beaucoup de vide ! Il y a des gens qui n’ont pas travaillé depuis un an. Il n’y a aucune perspective de réouverture au public », déplore le secrétaire général de la CGT Spectacle, Denis Gravouil. « Il faut un plan de soutien massif à la culture et on nous sort 30 millions d’euros, c’est-à-dire une mesurette, même si c’est un soutien à certaines compagnies, tant mieux. Et les 10 millions, c’est une aumône pour ceux qui n’ont pas obtenu l’année blanche. C’est totalement insuffisant », dénonce le responsable CGT.
Il n’est guère confiant sur la prolongation de l’année blanche. « Avec la réforme de l’assurance chômage, on nous dira qu’on ne peut pas baisser les droits du chômage et que ce soit en même temps open bar pour les intermittents jusqu’en août 2022. On craint uniquement des mesures ciblées, par exemple selon l’ancienneté ».
« On est très loin du compte »
Même son de cloche du côté du sénateur PCF Pierre Ouzoulias. « Ce ne sont que des mesures très ponctuelles sur des publiques ciblés. Ce n’est pas ce qui permet de répondre à la crise structurelle. Soit le gouvernement propose un plan de reprise clair, avec un protocole. Soit ce n’est pas possible pour raison sanitaire et dans ce cas, il faut reconduire l’année blanche, ce n’est pas compliqué », demande le sénateur, qui a interpellé la ministre de la Culture mercredi lors des questions d’actualité au Sénat. ll s’étonnait qu’on puisse se réunir à la Haute assemblée avec un siège sur deux et pas au théâtre. Son image a fait mouche. Il rappelle que « le coût de l’année blanche, c’est un milliard d’euros. Donc on est très loin du compte ».
« C’est intéressant car il y avait des trous dans la raquette »
La sénatrice PS Sylvie Robert, qui suit aussi le secteur de la culture, reconnaît pour sa part qu’il y a du mieux. « On a 20 millions d’euros en plus, c’est bien. On ne va pas quand même contester le fait que 20 millions d’euros supplémentaires soient débloqués. Et c’est surtout pour les équipes artistiques, et les plus fragiles. Mais il faudra regarder que ces aides vont bien aux acteurs ciblés ». Il y a aussi 10 millions de plus « pour ceux qui sont passés hors de l’année blanche, comme les primo arrivants. C’est intéressant car il y avait des trous dans la raquette ».
Quant à l’année blanche, « la ministre renvoie à la conclusion d’un rapport. On verra ». « De façon générale, je pense que ces annonces vont dans le bon sens mais ne suffisent pas », précise Sylvie Robert, « car on attend tous des perspectives pour la réouverture et des modalités pour tous les lieus culturels ».
Le ministère de la Culture « essaie de réfléchir à une reprise séquencée »
Si les acteurs du milieu culturels n’en voient pas trop la couleur pour le moment, à Matignon, on assure « travailler à des hypothèses de réouverture par étapes, avec un travail conduit sur tous les secteurs », avec « une attention particulière concernant les établissements culturels. On travaille sur des hypothèses de jauge, de protocole sanitaire plus ou moins renforcé, avec des scénarios. Les travaux sont en cours » explique-t-on, sans donner pour l’heure plus de détails, mais « on espère, dès que ce sera possible, donner plus de visibilité ».
« Les protocoles ne sont pas les mêmes d’un secteur à l’autre. Et on essaie de réfléchir à une reprise séquencée », ajoute-t-on du côté du ministère de la Culture. Mais tout dépendra de l’état de l’épidémie. Et pour l’heure, on remarque que « les chiffes ne s’améliorent pas. Et se dégradent plutôt »…
« On appelle à amplifier le mouvement d’occupation des lieux culturels »
Au sein du théâtre de l’Odéon, recouvert de banderoles, on reste motivés. La ministre de la Culture est venue rencontrer il y a quelques jours les intermittents qui mangent et dorment sur place. Mais c’était « plein de belles paroles », raconte une occupante. Regardez le reportage de Sandra Cerqueira et Gaspard Flamand :
Les intermittents sont bien décidés à continuer. « On appelle à amplifier le mouvement d’occupation des lieux culturels et même au-delà », lance Denis Gravouil. Après le théâtre de La Colline à Paris, puis le TNS à Strasbourg, ce sont maintenant des théâtres de Nantes et de Niort qui sont occupés. Au total, 10 lieux sont maintenant concernés par le mouvement dans toute la France.