Congé pour deuil : la faute à l’inexpérience ou à la Ve République, selon les sénateurs LREM

Congé pour deuil : la faute à l’inexpérience ou à la Ve République, selon les sénateurs LREM

Après le refus de porter le congé parental à 12 jours en cas de deuil d’un enfant, des tensions d’un niveau inédit agitent la majorité présidentielle à l’Assemblée vis-à-vis du gouvernement. Pour les sénateurs LREM, plusieurs éléments peuvent expliquer cette crise.
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Par Guillaume Jacquot, avec Quentin Calmet

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Le sort de la proposition de loi du député Guy Bricourt (UDI) a beaucoup déstabilisé un groupe parlementaire, déjà bien occupé avec la réforme des retraites. Le rejet à l’Assemblée nationale de l’allongement du congé des salariés de 5 à 12 jours en cas de décès d’un enfant, s’est produit sous l’effet du groupe majoritaire LREM mais aussi de l'avis défavorable de la ministre Muriel Pénicaud. Durant le week-end, face au vent d’indignation dans l’opinion, Emmanuel Macron a appelé les députés « à faire preuve d’humanité ». Des propos qui ont contribué à nourrir une forme de ressentiment des députés à l’égard de l’exécutif. Comment cette séquence est-elle perçue au palais du Luxembourg, chez leurs homologues sénateurs ?

Au Sénat, le profil du groupe la République en marche est bien différent. Ils ne sont que 24 (un quinzième de l’hémicycle) et surtout élus depuis bien plus longtemps : 17 proviennent par exemple du Parti socialiste. En off, un membre du groupe se lâche. « Ça fait vraiment amateur, les députés ont vu les choses de façon très technocratique. »

Le sénateur des Bouches-du-Rhône, Michel Amiel, plaide pour l’erreur de jeunesse. « Cela relève un peu d’un manque d’expérience politique. La même situation n’aurait pas été possible au Sénat », explique-t-il, en mettant en avance une forme de maturité acquise au fil des mandats locaux, et l’indépendance de la Haute assemblée. « Ce vote relève d’un vrai problème de compassion, on n’aurait pas suivi la consigne du gouvernement qui était de dire il ne faut pas voter ça. »

Congé pour deuil : « La même situation n’aurait pas été possible au Sénat » (Michel Amiel)
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« Ça arrive qu’au bout de deux ans et demi, ça tangue »

Son collègue Julien Bargeton y voit plutôt la conséquence d’institutions « à bout de souffle » et d’une logique de la Ve République qui devrait, selon lui, être « dépoussiérée ». « Au-delà de cette erreur qui a été commise, c’est le fonctionnent des relations entre le gouvernement et l’Assemblée nationale, et aussi le Sénat, qui doit être repensé. » Le sénateur de la capitale admet que la nouvelle vague de députés n’a pas su prendre ce tournant. « Reconnaissons que nous n’avons pas réussi à changer les pratiques de la Ve République ». La faute aussi, selon lui, à la mise en sommeil du débat autour de la réforme institutionnelle. Dans les faits, les trois projets de lois n’allaient pas en faveur d’un meilleur rééquilibrage en faveur du Parlement.

Congé pour deuil : « Ça arrive qu’au bout de deux ans et demi ça tangue » (Julie Bargeton)
01:42

Élu au Conseil de Paris depuis 11 ans, Julien Bargeton considère, par ailleurs, que ce type d’ « erreur », comme l’Assemblée vient de le connaître avec l’allongement du congé parental, aurait pu se produire dans d’autres législatures. « Ça arrive qu’au bout de deux ans et demi, ça tangue, que le gouvernement, la majorité, rencontrent des difficultés, c’est logique, c’est arrivé à d’autres. »

Après une semaine de secousses, l’exécutif entend éteindre l’incendie. Le chef de l’État recevra les députés mardi prochain. Et la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, s’est dite ce matin « extrêmement fière » de la majorité.

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Alors que François Bayrou souhaite pouvoir avoir le ministre de l’Intérieur sortant dans son équipe, Bruno Retailleau a obtenu les garanties qu’il attendait, selon l’entourage du ministre. Il est prêt à lâcher l’idée d’un grand texte immigration, qui susciterait une levée de boucliers, pour « saucissonner » les sujets via plusieurs propositions de loi. Globalement, les LR sont rassurés et devraient rester au gouvernement.

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C’est le signe d’ouverture vers la gauche qu’on retient de la réunion, ce jeudi 19 décembre, entre les différents représentants des partis politiques (hors Rassemblement national et La France insoumise) et François Bayrou. Le nouveau Premier ministre propose de remettre en débat la réforme des retraites, pour aboutir à un nouveau compromis avec les partenaires sociaux d’ici septembre. Sans nouvel accord, c’est la réforme adoptée en 2023 qui continuerait à s’appliquer. « Lorsque François Bayrou met tous les représentants de partis et de groupes autour de la table, je pense qu’il envoie un signal d’ouverture qui va le légitimer. Il est conscient de la situation politique inédite et il tend des mains », salue la députée Renaissance Eléonore Caroit, sur le plateau de Parlement Hebdo, au lendemain de la rencontre. « Au lieu d’avoir cette posture de contestation permanente, travaillons ensemble ! » « La première des choses, c’est de suspendre l’application de cette réforme, pour permettre aux 50 000 salariés qui devaient partir en retraite et qui en ont été empêchés cette année de pouvoir le faire », rétorque le sénateur communiste Ian Brossat. Une position partagée par l’ensemble des partis de gauche, à la sortie de la rencontre à Matignon la veille. Tous attendent davantage de compromis de la part du Premier ministre, avant de s’engager à ne pas le censurer. « Pour l’instant, il n’y a absolument rien qui garantisse à François Bayrou d’échapper à une motion de censure, parce que tout ce qu’il dit va dans le sens d’une perpétuation des politiques macronistes menées depuis 7 ans », fustige le sénateur communiste. Une position que dénonce vivement la députée Renaissance : « S’il faut revenir sur cette réforme, s’il y a des choses à améliorer, je suis tout à fait prête à ce qu’on en discute. Mais je pense qu’il faut qu’on arrête de polariser le débat. Au lieu d’avoir cette posture, cette attitude de renfermement et de contestation permanente, travaillons ensemble ! » Ian Brossat dénonce un « déni de démocratie » Ce n’est pas la première fois que le débat des retraites revient sur la table ces derniers mois. À la fin du mois de novembre, La France insoumise avait profité de sa niche parlementaire à l’Assemblée pour introduire une proposition de loi visant à abroger la réforme. Après des débats houleux, le texte n’avait pas pu être voté en raison du trop grand nombre d’amendements déposés par les groupes de la droite et du centre. « Lorsqu’ils ont eu la possibilité de voter aux dernières élections, les Français ont massivement soutenu des partis politiques qui s’engageaient à abroger la réforme. Quand ce sujet a, à nouveau, été débattu à l’Assemblée, les députés macronistes ont pratiqué l’obstruction pour éviter le vote d’une loi d’abrogation », dénonce Ian Brossat. « Si nous étions dans un pays véritablement démocratique, cette réforme serait déjà abrogée », ajoute-t-il, dénonçant un « déni de démocratie ». Une expression qui ne passe pas pour Eléonore Caroit. « C’est une réforme dont l’examen a pris trois semaines, vous pensez qu’elle aurait pu être abrogée dans une niche parlementaire ? C’est fantaisiste », fustige la députée. De son côté, François Bayrou a répété sur le plateau de France 2 après la rencontre à Matignon, qu’il était ouvert à une autre solution que le report de l’âge de départ de 62 à 64 ans pour financer le système des retraites. Le nouveau Premier ministre a notamment rappelé qu’il avait été « un militant de la retraite à points ».

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