Confinement : contrairement à ce que renvoient les réseaux sociaux, « les jeunes respectent d’avantage les règles que les plus âgés »

Confinement : contrairement à ce que renvoient les réseaux sociaux, « les jeunes respectent d’avantage les règles que les plus âgés »

Le 29 avril dernier, Emmanuel Macron annonçait un nouveau plan de déconfinement progressif qui ouvre la voie à un quotidien moins réglementé. Entre espoir d’un été déconfiné et ceux qui désespèrent des mesures de déconfinement, cette semaine dans Hashtag, Hélène Risser et ses invités analysent donc les émotions des Français en confinement, le respect ou le non-respect des règles sanitaires après un an de pandémie.
Public Sénat

Par Nils Buchsbaum

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Fêtes sauvages, non-respect du couvre-feu, rassemblements sans port du masque, tout le monde a vu les images diffusées abondamment sur les réseaux sociaux. Mais si elles peuvent laisser penser que ces pratiques se généralisent et les jeunes sont les premiers à enfreindre les règles, ce n’est pas vraiment le cas pour Pierre Mercklé.

« Dès le premier confinement, on a eu un très fort conformisme social dans la majorité de la population. Je crois même qu’il a devancé l’énonciation des règles sanitaires, par exemple la question du masque, la population était en avance sur les préconisations ». L’étude que mène le sociologue a démontré que contrairement aux idées reçues, « les jeunes respectent plus les règles que les plus âgés, les urbains plus que les ruraux, les classes populaires plus que les classes favorisées ». Il précise, « le portrait du jeune, urbain, voire banlieusard qui ferait n’importe quoi, c’est exactement le contraire que l’on observe ». Les fêtes sauvages sont plus visibles car se passent dans l’espace public. « Il y a eu une stigmatisation assez forte des jeunes que l’on décrivait comme irrespectueux, que l’on accusait de contribuer à la contamination, alors qu’ils étaient ceux qui respectaient le plus les règles, ils ont un petit peu servi de bouc émissaire de façon un peu injuste par rapport à la réalité des comportements ».
 

Durant le premier confinement les gens se serrent les coudes… parfois même pour répondre à une injonction à la solidarité

Si la plupart des Français semblent lassés du confinement, « Certains d’entre eux sont nostalgiques du premier confinement de 2020 », déclare Véronique Reille-Soult de Backbones Consulting. Une analyse qui peut surprendre mais pour la spécialiste des réseaux sociaux « pour se rendre compte de cela on n’a pas regardé ce qui s’est dit à l’époque mais ce qui se dit au mois d’avril sur les réseaux sociaux », et d’expliquer : « Globalement la notion de collectif se dégage, le sentiment que l’on faisait alors un effort tous ensemble, que tout le monde était dans la même histoire. On se serrant les coudes, en étant tous ensemble… Sur le moment c’était dur mais rétrospectivement on ne se dit pas que l’on a envie de le revivre mais que c’était une aventure collective ».

Le sociologue Pierre Mercklé a lui réalisé une étude auprès de 15 000 Français. « On a constitué au début du premier confinement un panel de personnes qui ont accepté de répondre à des questions puis à des entretiens téléphoniques et ce sont ces gens que l’on continue de suivre ». Selon lui, certains ont beaucoup apprécié le premier confinement, « même s’ils n’ont pas forcément osé le dire sur le moment parce qu’il y avait aussi cette injonction à la solidarité ». Il ajoute cependant que ce fut loin d’être un sentiment unanime : « Quand on interroge sur les sentiments éprouvés, les sentiments négatifs sont clairement majoritaires. Il faut dire aussi que les classes favorisées ont beaucoup plus apprécié le premier confinement que le second et que dans les classes populaires c’est plutôt l’inverse. Par exemple pour certains l’école à la maison a été très compliquée et on a pu être content de voir les écoles rouvrir… »


Seule 7 % de la population a changé de logement pour le premier confinement

On se souvient à l’époque du premier confinement des images d’hostilité envers les parisiens partis se confiner ailleurs. Pour Pierre Mercklé, « ces images soulignent les choses les plus spectaculaires, mais le fait massif est qu’il n’y a pas grand monde qui s’est déplacé ». En effet d’après l’étude qu’il a réalisée, c’est environ 7 % de la population qui a changé de logement pendant le premier confinement. « Cela fait plusieurs centaines de milliers de personnes, c’est important mais en réalité ce n’est pas un exode des riches, un exode urbain, c’est un exode étudiant. 35 % d’entre eux sont retournés chez leurs parents ». Depuis de nouveaux confinements aux apparences moins strictes ont été imposés aux Français mais selon Véronique Reille-Soult, « aujourd’hui, on voit que c’est de plus en plus mal vécu. Depuis le deuxième confinement, il y a moins cet esprit collectif, les gens se disent qu’ils font des efforts et les autres non ». Pierre Mercklé confirme, « d’un confinement au suivant, les personnes que nous avons interrogées sont dans une forme de résignation, le sentiment qui augmente c’est la fatigue ».
.
Retrouvez l’intégralité de l’émission ici.

Dans la même thématique

Paris : illustrations of assize court of Paty s trial
5min

Société

Procès de l'assassinat de Samuel Paty : tous les accusés ont été reconnus coupables

Les deux amis de l’assassin du professeur Samuel Paty, Naïm Boudaoud et Azim Epsirkhanov, ont été reconnus coupables de complicité d’assassinat et condamnés à 16 ans de réclusion criminelle. Le verdict a été accueilli par des cris et des pleurs de la part de la famille de Naïm Boudaoud, âgé de 22 ans. « Ce soir, c’est la République qui a gagné », s’est félicité Thibault de Montbrial, avocat de Mickaëlle Paty, une des sœurs du professeur assassiné. La cour a également déclaré coupables d’association de malfaiteurs terroriste les deux auteurs de la « campagne de haine « qui ont fait de Samuel Paty une « cible » : Brahim Chnina, 52 ans et le prédicateur islamiste Abdelhakim Sefrioui, 65 ans, ont écopé respectivement de 13 et 15 ans de réclusion criminelle. « J’ai compris que vous avez fait de la politique, pas de la justice », s’est exclamé depuis son box Abdelhakim Sefrioui avant d’être sèchement interrompu par le président, tandis que la famille de Brahim Chnina, très nombreuse sur les bancs du public, éclatait en sanglots et cris de désespoir. Vincent Brengarth, un des avocats d’Abdelhakim Sefrioui, a annoncé aussitôt que son client faisait appel de sa condamnation. Ouadie Elhamamouchi, autre avocat du prédicateur, a estimé que son client était désormais « un prisonnier politique ». « Je me désolidarise de ces propos-là », a cependant nuancé Me Brengarth, montrant des failles dans la défense du prédicateur. Avocat de la compagne de Samuel Paty et de leur fils, présent à l’audience, Francis Szpiner s’est félicité d’un « verdict équilibré ». Le fils de Samuel Paty, âgé seulement de 9 ans, a compris que « justice a été rendue pour son père », a-t-il ajouté. Si le quantum des peines n’est pas très différent de ce que réclamait le parquet, la cour présidée par Franck Zientara a choisi de maintenir l’infraction de « complicité » pour les deux amis d’Abdoullakh Anzorov, un islamiste radical tchétchène de 18 ans, abattu par la police peu après son acte. Les quatre autres accusés, dont une femme, appartenant à la « jihadosphère » qui était en contact avec Anzorov sur les réseaux sociaux, ont également tous été condamnés à des peines de prison ferme ou avec sursis. Pour deux d’entre eux (Ismaël Gamaev et Louqmane Ingar) la cour a retenu l’association de malfaiteurs terroriste tandis qu’elle a déclaré coupable Priscilla Mangel de provocation au terrorisme et Yusuf Cinar d’apologie du terrorisme. La veille de l’attentat, Naïm Boudaoud et Azim Epsirkhanov avaient accompagné Anzorov à Rouen pour y acheter un couteau (pas celui qui a servi à décapiter Samuel Paty) qui sera retrouvé sur la scène de crime. A l’audience, Boudaoud et Epsirkhanov ont répété qu’Anzorov leur avait expliqué que ce couteau était « un cadeau » pour son grand-père. Le jour de l’attentat, le 16 octobre 2020, Boudaoud, le seul sachant conduire, avait accompagné le tueur dans un magasin de pistolets airsoft puis l’avait déposé à proximité du collège où enseignait Samuel Paty. « Volonté de s’attaquer à l’intégrité physique d’un tiers » Les deux jeunes gens « avaient conscience de la radicalité » d’Anzorov et qu’il « avait la volonté de s’attaquer à l’intégrité physique d’un tiers », a estimé la cour. Cependant, a souligné le président Zientara, « il n’est pas démontré que (les deux jeunes gens) étaient avisés de l’intention d’Anzorov de donner la mort à Samuel Paty ». Les magistrats du Pnat avaient requis 14 ans de réclusion assortie d’une période de sûreté des deux tiers contre Boudaoud et 16 ans de réclusion également assortie d’une période de sûreté des deux tiers contre Epsirkhanov. La cour n’a cependant pas retenu la période de sûreté des deux tiers à leur encontre. Brahim Chnina, père de la collégienne qui a menti en accusant le professeur d’avoir discriminé les élèves musulmans de sa classe lors d’un cours sur la liberté d’expression où il a présenté une caricature de Mahomet, avait lui posté des messages et une vidéo hostile au professeur dès le 7 octobre. Quant à Abdelhakim Sefrioui, fondateur de l’association (aujourd’hui dissoute) pro-Hamas « Collectif Cheikh-Yassine », il avait qualifié Samuel Paty de « voyou » dans une autre vidéo. Mais rien ne prouve qu’Anzorov avait vu la vidéo d’Abdelhakim Sefrioui, avaient mis en avant ses avocats, ajoutant que leur client n’avait pas rencontré l’assassin de Samuel Paty. « La cour a considéré que (MM. Chnina et Sefrioui) avaient préparé les conditions d’un passage à l’acte terroriste », a indiqué M. Zientara. (Avec AFP)

Le