La porte-parole du gouvernement Maud Bregeon a assuré ce mercredi à la sortie du Conseil des ministres qu’Emmanuel Macron a acté qu’il n’y avait pour le moment pas « de socle plus large que celui qui est en place aujourd’hui » pour gouverner. Mais, après les consultations des responsables de partis mardi, « le président continue à écouter et à tendre la main ».
Cédric O : « La France a fait le choix des libertés individuelles »
Par Oriane Mancini
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Les annonces d’Édouard Philippe :
« Le report du vote sur le traçage numérique est une question de méthode. Le Premier ministre a présenté hier un plan global et une méthode. C’est le cas pour StopCovid. Le Premier ministre a expliqué en quoi cette application pouvait être utile au travail des brigades sanitaires.
Elle est encore en cours de développement. Nous avons estimé qu’il était trop tôt pour discuter de quelque chose qui n’était pas encore prêt mais il y aura un débat et un vote dédié. D’abord le plan global et ensuite cette partie qui est importante voire indispensable selon les épidémiologistes mais dans un second temps et quand tout sera bien fixé. »
Les divisions au sein de la majorité :
« J’ai parlé à une large partie de la majorité. Plus on explique ce que fait cette application et surtout ce qu’elle ne fait pas, plus on explique son utilité, plus les parlementaires comprennent et acceptent cette application. Je ne pense pas qu’il y aurait eu un rejet hier si nous avions dû faire le vote, bien au contraire. Je comprends les interrogations qui peuvent se poser. Il y aura bien un débat et un vote une fois que tout le monde sera bien fixé sur ce qu’est cette application dans sa version définitive. »
Le calendrier :
« Nous avons toujours dit que cette application StopCovid devait être prête pour le 11 mai mais que c’était un défi. Le Parlement sera consulté avant que la décision finale de lancement soit prise. À ce stade, nous visons le 11 mai mais ça peut être un peu après s’il nous faut quelques jours supplémentaires pour qu’elle soit prête et ne présente pas de failles de sécurité par exemple. Si le Premier ministre ou le Président avait besoin de mettre fin à cette application, il leur suffisait de le dire. Ce n’est pas en prévoyant un débat et un vote dédié sur cette question que nous l’enterrons. »
Le développement de l’application StopCovid :
« Il y a plus de 100 personnes qui travaillent sur ce projet jour et nuit. Je peux vous garantir qu’il n’y a que des entreprises françaises qui collaborent sur cette application. C’est une sorte d’équipe de France avec des grands groupes comme Dassault Systèmes, Orange et Capgemini mais aussi des start-up. On peut aussi évoquer Atos ou Thalès.
Tous sont venus gratuitement et sans propriété intellectuelle. Nous avons des discussions avec Google et Apple pour faire en sorte que l’application fonctionne sur leur système mais c’est bien une application française qui tournera, je l’espère, sur l’ensemble des téléphones. Encore une fois, cette application nous protège et protège la collectivité en faisant en sorte qu’en cas de contact avec une personne malade, on entre dans un parcours de santé. »
Le fonctionnement de StopCovid :
« Elle fonctionne de manière simple. Elle crée un historique de vos interactions sociales. Si vous et moi avons cette application, que l’on se croise à moins de 2 mètres pendant quelques minutes alors l’application conserve le souvenir de cette interaction. Si demain je me déclare positif, vous recevez une notification vous disant que quelqu’un que vous avez croisé a été déclaré positif au coronavirus. Cette alerte vous permet de prendre des dispositions sanitaires comme vous faire tester. Elle fonctionne de manière totalement anonyme, volontaire et temporaire. Elle sera publiée en open source et tout le monde pourra vérifier qu’elle fait bien ce à quoi elle est destinée. C’est une question essentielle pour avoir la confiance des Français et pouvoir la déployer afin d’éviter la résurgence de cette épidémie. »
Les libertés individuelles :
« La CNIL s’est prononcée ce week-end. Pour elle, cette application est proportionnée c’est-à-dire que son utilisation peut être envisagée sous certaines garanties apportées par le gouvernement. Nous ne prenons pas une décision hors sol. Le choix que nous avons aujourd’hui c’est soit d’utiliser tous les moyens qui respectent nos lois pour faire en sorte que l’épidémie ne reparte pas, soit de prendre le risque de la voir repartir. Cette application pose des questions et l’on doit prendre toutes les garanties mais ce n’est pas une application que l’on aurait déployée dans un temps de paix.
Cette application est utile dès les premiers téléchargements pour les enquêtes sanitaires. Pour les éventuelles interactions dans les transports en commun par exemple, c’est la seule manière de contacter les gens. Plus de gens auront l’application et plus elle sera utile. Cela va demander beaucoup de pédagogie. Cette crise sanitaire repose sur la responsabilité individuelle de chaque Français pour respecter les gestes barrières, pour rester confiné… C’est le même principe pour cette application. Je note que ce choix du volontariat n’est pas un choix que beaucoup d’autres pays ont fait. Entre contraintes sanitaires et libertés individuelles, La France a largement fait le choix des libertés individuelles. »
Le comité de suivi :
« Il faut que toute la transparence soit faite sur le fonctionnement de cette application et ce par des gens indépendants. Ces juristes, parlementaires, représentants d’ONG, doivent pouvoir mener tous les audits techniques pour rassurer les Français et s’assurer que cette application fait bien ce qu’elle est destinée à faire. Nous travaillons encore sur la composition de ce comité de suivi mais il devra être mis en place avant le déploiement de l’application. Il faut qu’il soit totalement indépendant et que les personnes qui le composent, puissent juger des différents aspects de cette application et ainsi rassurer les Français. »
La fracture numérique :
« Il y a des raisons sociales ou numériques au décrochage des élèves dans cette période de confinement. On se heurte à des problèmes de connexion et d’équipement et il ne suffit pas d’avoir un ordinateur par famille. La crise a révélé de manière encore plus cruelle que le numérique est devenu un bien essentiel et ceux qui en sont coupés, n’ont plus accès à des services parfois vitaux. Avec Adrien Taquet et Julien Denormandie, nous avons pris un certain de nombre d’initiatives pour essayer de faire en sorte d’apporter cette connexion aux enfants. C’est toujours insuffisant et il faudra une réflexion après la crise pour mettre fin à cette rupture éducative.
On a par exemple lancé une opération pour équiper tous les centres de l’aide sociale à l’enfance d’ordinateurs. Nous avons demandé à toutes les entreprises à proximité d’un centre de venir déposer un ordinateur pour permettre à ces enfants d’avoir une continuité pédagogique. Là nous agissons dans l’urgence mais il faudra faire en sorte que cette question du numérique à l’école soit traitée après la crise. »
L’impact sur les start-up :
« Elles sont touchées comme les autres. À la différence d’autres entreprises, elles ont une relation plus distante avec le système bancaire du fait de leur mode de financement et il est important de se pencher sur elles. Cet écosystème, nous avons mis 10 ans à le construire et c’est un écosystème particulièrement important. Ces entreprises qui sont aujourd’hui capables de peut-être trouver un remède contre le virus, elles mettent 10 ans avant de gagner de l’argent. Les entreprises qui nous permettront d’avoir des outils numériques français plutôt qu’américains, ces entreprises mettent plusieurs années avant d’être rentables. C’est pour ça que nous avons pris un certain nombre de mesures et notamment un plan de 4 milliards d’euros spécifique pour soutenir leur trésorerie et leur donner la capacité de passer cette crise. »
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