L'Assemblée nationale doit approuver mardi la partie "recettes" du projet de budget 2020 critiqué par l'UE pour son manque de rigueur, avant de s'atteler au budget de la Sécu, la situation des hôpitaux inquiétant jusque dans la majorité.
Après une semaine de débats dans l'hémicycle, achevés vers 3H30 du matin dans la nuit de lundi à mardi, le vote en première lecture sur ce volet du budget de l'Etat aura lieu en fin d'après-midi. Juste après, les députés entameront l'autre gros morceau du marathon budgétaire: le projet de budget de la Sécurité sociale.
Les "marcheurs", aidés de leurs alliés du MoDem, disposent d'une majorité confortable pour adopter ce budget de mi-mandat, jugé "injuste" et pas assez vert à gauche, et critiqué à droite pour son absence d'"efforts" de rigueur.
La Commission européenne a justement demandé d'ici mercredi des clarifications à la France, évoquant des "risques d'écart" avec les règles européennes au vu de l'absence de mesures pour améliorer l'état de ses finances publiques.
Le texte entend notamment répondre à la crise des "gilets jaunes", déclenchée il y a bientôt un an.
Alors que le ministre de l'Economie Bruno Le Maire vante notamment une "pression fiscale" réduite, LR dénonce un budget reléguant "au second plan" les objectifs d’assainissement des finances publiques.
Au total, le déficit se situera à 2,2% du PIB, contre 2% initialement prévu et la dette publique va à peine baisser.
"Gilets jaunes" obligent, la mesure phare est la baisse de cinq milliards d'euros de l'impôt sur le revenu pour les ménages, pour un total de près de neuf milliards de réduction d'impôts. Les entreprises verront, elles, leurs prélèvements baisser d'un milliard d'euros.
La gauche, qui dénonce inlassablement un "président des riches", voit ce budget comme un facteur d'accroissement des inégalités. Elle note que les baisses excluent les foyers non imposables, "une grande partie de ceux qui ont déjà du mal à finir les fins de mois".
Autre mesure emblématique en faveur des ménages, âprement débattue la semaine dernière: la poursuite de la suppression de la taxe d'habitation pour 80% des foyers fiscaux à partir de 2020 et 100% en 2023.
La mesure est assortie de gestes envers les collectivités qui vont perdre cette ressource. Mais, malgré des coups de pouce supplémentaires concédés par le gouvernement, droite comme gauche estiment que les communes restent lésées, à l'unisson des départements.
- "Houle" sur la Sécu -
Côté fiscalité verte, le texte prévoit notamment le remplacement progressif d'un crédit d'impôt pour la rénovation énergétique des bâtiments par une prime réservée aux ménages modestes.
S'y ajoutent un durcissement du malus automobile pour dissuader l'achat de véhicules polluants, une hausse du gazole pour les transporteurs routiers ou une augmentation de "la taxe Chirac" sur les billets d'avion pour financer des infrastructures de transport.
Des "marcheurs" ont plaidé en vain pour un signal accru de "verdissement", avec un horizon pour la suppression des principales dépenses fiscales défavorables à l'environnement. Bruno Le Maire a pris l'engagement de "discussions approfondies" avec les secteurs concernés.
Une "timidité" déplorée notamment par LFI. Pour l'ex-LREM Matthieu Orphelin, qui in fine va s'abstenir, on est "encore trop loin" d'"un véritable +budget vert+".
Le gouvernement a en revanche donné des gages à la gauche et une partie de la majorité en acceptant des "amendements Ghosn",pour obliger les dirigeants d'entreprises françaises à être domiciliés fiscalement en France dès 250 millions d'euros de chiffre d'affaires.
L'Assemblée a aussi poursuivi le ménage dans le maquis des taxes et niches fiscales, même si certains des "trous noirs fiscaux" dénoncés par le rapporteur Joël Giraud (LREM) vont subsister.
Après le vote, les députés enchaîneront aussitôt avec le projet de budget de la Sécu porté par la ministre de la Santé Agnès Buzyn. Il prévoit un déficit de 5,1 milliards l'an prochain. Et, pour les oppositions qui s'alarment que "l'hôpital brûle", là aussi, le compte n'y est pas.
Dans la majorité, certains poussent, à l'instar du rapporteur Olivier Véran, pour un "gros engagement" pour l'hôpital. La réunion hebdomadaire du groupe LREM mardi, en présence de la ministre de la Santé, était "houleuse", selon un participant, avec des députés à l'offensive en défense des urgences.