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Bornes incendie : « 7 millions de Français mal protégés » et des coûts exorbitants pour les collectivités, pointe un rapport du Sénat
Par Jules Fresard
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Les bornes d’incendie, ces poteaux rouges disposés le long des trottoirs et devenus une constante du mobilier urbain, pourraient-elles être en partie responsables du dépeuplement des zones rurales ? Si le lien de causalité semble de prime abord difficile à percevoir, c’est bien cette menace que laisse entrevoir le rapport d’information réalisé par Franck Montaugé, sénateur socialiste du Gers, et Hervé Maurey, sénateur centriste de l’Eure, intitulé « La défense extérieure contre l’incendie : assurer la protection des personnes sans nuire aux territoires ».
Par défense extérieure contre l’incendie, ou DECI, il faut comprendre tout équipement permettant de constituer une source d’eau suffisante pour aider les sapeurs-pompiers lors de leurs interventions. Soit des bornes d’incendie, mais également certaines réserves naturelles d’eau ou des citernes. Et alors que ces équipements relevaient auparavant d’une logique nationale, la loi du 17 mai 2011 est venue territorialiser leur implantation, permettant à chaque département d’élaborer son propre règlement. Traduisant là une volonté de prendre en compte les spécificités locales, mais qui révèle aujourd’hui ses faiblesses.
Un « excès de zèle » constaté
Comme l’illustre Franck Montaugé, « dans l’Eure, il faut qu’il y ait 200 mètres maximum entre un point d’incendie et une habitation ». Une exigence bien souvent difficile, voire impossible à mettre en place, poussant certains maires à refuser l’octroi de permis de construire, car dans l’impossibilité de se mettre en conformité avec la DECI.
La situation est encore plus périlleuse dans certains villages et hameaux, où répondre aux exigences départementales en matière de lutte contre les incendies, relève bien souvent du casse-tête, avec des habitations éparpillées sur le territoire de la commune, et donc multipliant les obligations en matière de construction de bornes d’incendie. Poussant les maires plus qu’ailleurs à refuser l’installation de nouveaux habitants, alors que la demande est bien présente.
« Il y a une vraie difficulté rencontrée dans les permis de construire, liée à l’obligation d’assurer la défense extérieure contre l’incendie », analyse Franck Montaugé. « Quand j’étais en campagne il y a un an, dans neuf communes sur dix, on me parlait de ce problème », détaille Hervé Maurey, avant de continuer : « Dans mon département, il y a des communes qui ne peuvent plus délivrer le moindre permis de construire. Elles vont perdre de la population, et ce sont des territoires en train de mourir. […] C’est un excès de zèle qui conduit à tuer les communes ».
Des difficultés dont Gérard Larcher, président LR du Sénat, est conscient, selon les deux corapporteurs. « La genèse de ce travail est une saisine du président du Sénat, qui a eu beaucoup de retours d’élus par rapport aux contraintes imposées », justifie Hervé Maurey.
Des coûts faramineux pour les collectivités
Et comme pour beaucoup de sujets, la genèse de ces difficultés s’explique d’un point de vue financier. La DECI et son financement sont en effet du ressort des maires. Or, construire une borne à incendie ou se mettre en conformité avec les exigences départementales riment souvent avec des dépenses à plusieurs centaines de milliers, voire millions d’euros. Un coût insupportable pour une majorité de commune.
« Certaines communes, si elles souhaitent se mettre en conformité, devraient débourser 3,5 millions d’euros. […] Et dans celles où l’habitat est très dispersé, ce sont des coûts à plusieurs centaines de milliers d’euros », fait savoir Hervé Maurey.
Des coûts faramineux pour parfois seulement quelques centaines d’habitants, et alors que les autorités refusent dans certains territoires de reconnaître des sources d’eau naturelles comme potentielles DECI. « Je me suis rendu en Seine-Maritime, et j’ai reçu des témoignages où les services départementaux ne prenaient pas en compte la Seine dans les défenses extérieures. Alors qu’on sait bien que la Seine n’est pas un petit ruisseau qui s’assèche en août », ironise Hervé Maurey.
Des populations toujours mal protégées
Une situation venant in fine mettre en danger les populations locales. Selon les chiffres de la Direction générale de la Sécurité civile et la gestion de crise, en France, chaque année, les pompiers interviennent sur 80 000 feux d’habitation, soit en moyenne 219 interventions par jour.
Or, Franck Montaugé et Hervé Maurey alarment sur le fait « qu’un habitant sur trois en zone rurale ne posséderait pas une couverture protection incendie suffisante, soit 6 à 7 millions de Français ».
Laissant envisager le travail important qu’il reste à faire en termes d’infrastructures, mais aussi de pédagogie. « Les Français ont plus peur d’être cambriolés, que d’avoir un incendie. Il y a la nécessité d’une meilleure prise en compte de ce risque. Il faut faire plus de pédagogie, de contrôle dans les maisons… », croit Hervé Maurey.
Les pistes proposées
Point fort de leur rapport, les deux sénateurs proposent ainsi de réserver 1,2 milliard sur trois ans du plan France Relance à la mise aux normes des communes concernant la défense extérieure contre l’incendie. « On a élaboré 20 propositions, pour mettre en place des règles plus adaptées aux réalités locales, pour qu’ensuite l’on accompagne les communes dans cette mise aux normes. Quant à l’État qui n’apporte plus de financement, nous proposons de consacrer une partie des crédits du plan France Relance à la DECI », défendent les sénateurs.
Pas question pour l’instant cependant de revenir sur la loi de 2011, qui malgré ses lacunes, a permis d’acter la différenciation territoriale dans la lutte contre les incendies. Mais « si l’État ne se bouge pas, on prendra très rapidement des initiatives, comme lors de l’examen de la loi de finances pour 2022, concernant l’aspect budgétaire de nos propositions », avertit Hervé Maurey.