Après Europacity, Macron doit encore convaincre de son tournant vert
Notre-Dame-des-Landes, Montagne d'or et désormais Europacity: en décidant l'abandon d'un nouveau grand projet décrié par les Verts, Emmanuel...
Par Laurence BENHAMOU
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Notre-Dame-des-Landes, Montagne d'or et désormais Europacity: en décidant l'abandon d'un nouveau grand projet décrié par les Verts, Emmanuel Macron cherche à donner des gages de sa conversion à l'écologie, mais est loin encore de convaincre.
"La décision sur Europacity est importante mais il ne suffit pas d'abandonner des projets anti-écologistes pour être écologiste. J'attends d'autres preuves", estime Michel Colombier, directeur scientifique de l'IDDRI (Institut du développement durable et des relations internationale), membre du Haut Conseil pour le climat mis en place par le chef de l'Etat.
"L'acte 2 du quinquennat a consacré l'écologie comme priorité présidentielle", fait valoir l'Elysée, rappelant l'appel lancé au G7 pour la forêt amazonienne, puis le sommet sur l'Amazonie à l'ONU.
A New York, "le président a eu l'occasion de conforter son leadership mondial sur le climat et son engagement pour la protection de la biodiversité", ajoute la présidence. S'y ajoutent, au niveau français, les décisions du conseil de défense écologique jeudi (renaturalisation de friches, nouveau parc naturel de forêts... ).
Mais pour les scientifiques, sauver le climat va bien au-delà de ces gestes symboliques et passe par une remise en question du principe même de la croissance économique, "ce dont Emmanuel Macron est à des années-lumière", commente Simon Persico, professeur de science politique à Sciences Po Grenoble et au laboratoire Pacte.
"Il y a désormais un consensus presque total des scientifiques pour dire que la croissance économique est le problème, poursuit-il. Rares sont ceux qui pensent qu'on peut encore faire de la croissance économique sans dégâts sur l'environnement. La plupart estiment le découplage impossible".
Comme pour répondre à cette analyse, Emmanuel Macron, dont la priorité est "le travail et l'activité", a souhaité jeudi en conseil des ministres "que la transition écologique ne mette ni les citoyens ni le tissu productif dans l'impasse".
En marge de l' assemblée générale de l'ONU, en septembre, il avait aussi jugé "radicale" la position de la jeune militante Greta Thurnberg, qui avait reproché aux dirigeants mondiaux "l'illusion d'une croissance économique éternelle".
- Obsession de la croisance -
Dans une tribune publiée cette semaine, 11.000 scientifiques partagent la même analyse en avertissant que l'humanité s'expose à "des souffrances sans nom" si elle ne s'attaque pas sérieusement et rapidement à la "crise climatique", notamment en "réorientant les priorités économiques de la seule croissance vers le bien-être" ou encore la maîtrise démographique mondiale.
Dès le début de leurs travaux, les 150 citoyens tirés au sort de la Convention citoyenne pour le climat, emblème de l'engagement écologique du gouvernement, sont parvenus à la même conclusion. Après trois jours de discussion, ils ont pointé "l'obsession" de la croissance et "la culture de la consommation" comme freins majeurs à la transition écologique.
Vue du projet Europacity publiée le 27 septembre 2017 et réalisée par l'entreprise Alliages et Territoires
AFP/Archives
"La question est de savoir comment produire et redistribuer sans croissance économique. Cette tension est ressortie très fortement chez les +gilets jaunes+, qui avaient le sentiment que ce n'était pas à eux de payer pour la défense de l'environnement", relève Simon Persico, l'expert de Sciences-Po.
Les Verts ont salué l'abandon d'Europacity mais n'y voient pas non plus un tournant. "Etalement urbain, utilisation de la voiture: ce projet était à rebours des réflexions post-+gilets jaunes+", estime Julien Bayou, porte-parole d'EELV et conseiller régional d'Ile-de-France.
"La société était mûre pour abandonner ce projet, mais nous ne sommes pas dupes: c'est une décision qui n'a pas coûté grand chose politiquement parce que comme pour Notre-Dame-des-Landes, ce n'est pas ce gouvernement qui a initié le projet. On ne le voit pas par exemple abandonner la privatisation d'ADP pour des motifs écologistes".
Quant au bilan vert du quinquennat, il reste mitigé, entre mesures nuisibles et favorables à l'environnement, analyse l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE).
Sur 250 mesures budgétaires, l'I4CE conclut que 17 milliards d'euros de dépenses ont un impact défavorable, dont le soutien à l'aviation ou la niche fiscale pour le gazole non routier - qui va être réduite -- tandis que 20 milliards de dépenses sont bénéfiques, dont les aides aux énergies renouvelables et la mobilité durable.
Alors que François Bayrou souhaite pouvoir avoir le ministre de l’Intérieur sortant dans son équipe, Bruno Retailleau a obtenu les garanties qu’il attendait, selon l’entourage du ministre. Il est prêt à lâcher l’idée d’un grand texte immigration, qui susciterait une levée de boucliers, pour « saucissonner » les sujets via plusieurs propositions de loi. Globalement, les LR sont rassurés et devraient rester au gouvernement.
Alors que le premier ministre a demandé aux partis de se positionner par rapport à l’exécutif selon trois choix, les partis de gauche ne souhaitent pas rentrer pas dans le jeu de François Bayrou. Ils attendent des signaux qui pourraient les amener à ne pas censurer. Mais ils ne les voient toujours pas…
C’est le signe d’ouverture vers la gauche qu’on retient de la réunion, ce jeudi 19 décembre, entre les différents représentants des partis politiques (hors Rassemblement national et La France insoumise) et François Bayrou. Le nouveau Premier ministre propose de remettre en débat la réforme des retraites, pour aboutir à un nouveau compromis avec les partenaires sociaux d’ici septembre. Sans nouvel accord, c’est la réforme adoptée en 2023 qui continuerait à s’appliquer. « Lorsque François Bayrou met tous les représentants de partis et de groupes autour de la table, je pense qu’il envoie un signal d’ouverture qui va le légitimer. Il est conscient de la situation politique inédite et il tend des mains », salue la députée Renaissance Eléonore Caroit, sur le plateau de Parlement Hebdo, au lendemain de la rencontre. « Au lieu d’avoir cette posture de contestation permanente, travaillons ensemble ! » « La première des choses, c’est de suspendre l’application de cette réforme, pour permettre aux 50 000 salariés qui devaient partir en retraite et qui en ont été empêchés cette année de pouvoir le faire », rétorque le sénateur communiste Ian Brossat. Une position partagée par l’ensemble des partis de gauche, à la sortie de la rencontre à Matignon la veille. Tous attendent davantage de compromis de la part du Premier ministre, avant de s’engager à ne pas le censurer. « Pour l’instant, il n’y a absolument rien qui garantisse à François Bayrou d’échapper à une motion de censure, parce que tout ce qu’il dit va dans le sens d’une perpétuation des politiques macronistes menées depuis 7 ans », fustige le sénateur communiste. Une position que dénonce vivement la députée Renaissance : « S’il faut revenir sur cette réforme, s’il y a des choses à améliorer, je suis tout à fait prête à ce qu’on en discute. Mais je pense qu’il faut qu’on arrête de polariser le débat. Au lieu d’avoir cette posture, cette attitude de renfermement et de contestation permanente, travaillons ensemble ! » Ian Brossat dénonce un « déni de démocratie » Ce n’est pas la première fois que le débat des retraites revient sur la table ces derniers mois. À la fin du mois de novembre, La France insoumise avait profité de sa niche parlementaire à l’Assemblée pour introduire une proposition de loi visant à abroger la réforme. Après des débats houleux, le texte n’avait pas pu être voté en raison du trop grand nombre d’amendements déposés par les groupes de la droite et du centre. « Lorsqu’ils ont eu la possibilité de voter aux dernières élections, les Français ont massivement soutenu des partis politiques qui s’engageaient à abroger la réforme. Quand ce sujet a, à nouveau, été débattu à l’Assemblée, les députés macronistes ont pratiqué l’obstruction pour éviter le vote d’une loi d’abrogation », dénonce Ian Brossat. « Si nous étions dans un pays véritablement démocratique, cette réforme serait déjà abrogée », ajoute-t-il, dénonçant un « déni de démocratie ». Une expression qui ne passe pas pour Eléonore Caroit. « C’est une réforme dont l’examen a pris trois semaines, vous pensez qu’elle aurait pu être abrogée dans une niche parlementaire ? C’est fantaisiste », fustige la députée. De son côté, François Bayrou a répété sur le plateau de France 2 après la rencontre à Matignon, qu’il était ouvert à une autre solution que le report de l’âge de départ de 62 à 64 ans pour financer le système des retraites. Le nouveau Premier ministre a notamment rappelé qu’il avait été « un militant de la retraite à points ».
Les chefs de partis et de groupes parlementaires étaient reçus à Matignon par François Bayrou, qui promet de former un gouvernement « avant Noël ». Une rencontre dont les socialistes, écologistes et communistes ressortent sans avoir « trouvé de raison de ne pas censurer » le nouveau Premier ministre, rapporte Olivier Faure.