« Acharnement », décision « extrêmement sévère » : au groupe LR, le choc de la condamnation de Nicolas Sarkozy

« Acharnement », décision « extrêmement sévère » : au groupe LR, le choc de la condamnation de Nicolas Sarkozy

Pour les sénateurs Les Républicains qui ont choisi de s’exprimer, la condamnation de l’ancien président de la République à trois ans de prison, dont un ferme, pour corruption, est particulièrement lourde. Plusieurs ont mis en cause l’impartialité des juges.
Public Sénat

Par Guillaume Jacquot, avec Sandra Cerqueira

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C’est une première sous la Ve République. Un ancien président de la République vient d’être condamné à de la prise ferme. Ce 1er mars 2021, le tribunal correctionnel a condamné Nicolas Sarkozy à trois ans de prison dont un ferme, pour corruption et trafic d’influence, dans l’affaire dite des écoutes. Le jugement n’est pas définitif car Nicolas Sarkozy compte faire appel. Premier président condamné par la justice, Jacques Chirac avait écopé de deux ans de prison avec sursis, dans l’affaire des emplois fictifs de la ville de Paris. Au Sénat, des soutiens de l’ex-chef d’Etat ou des figures du groupe ont accueilli avec consternation le délibéré du juge.

Pour Philippe Dominati, il s’agit d’une décision « extrêmement sévère ». « D’une manière presque unanime, la presse a reconnu que la défense avait démontré que le dossier d’instruction était assez vide », s’étonne le sénateur LR à notre micro. Cette figure de la droite parisienne questionne notamment le recours aux écoutes téléphoniques, dont a fait l’objet l’ancien président de la République. « Cet aspect du procès me semble être politique. Depuis le départ, l’instruction a été faite pour mettre un grand nombre d’hommes politiques et d’avocats pendant des années, de façon sournoise. A cette époque-là, Nicolas Sarkozy était un membre de l’opposition », souligne-t-il. « Il y a une tendance chez certains magistrats à essayer d’instruire des affaires politiques, sans doute parce qu’elles sont plus médiatiques. Je regrette lorsqu’on ne trouve pas l’impartialité que l’on attend de l’institution judiciaire. »

Sur Twitter, le président du groupe LR au Sénat, Bruno Retailleau, parle d’une « condamnation extrêmement dure dans un dossier particulièrement faible », avant d’ajouter que la procédure est loin d’être finie. « Il y a un droit à la présomption d’innocence tant que les voies de recours n’ont pas été purgées », a rappelé le sénateur de Vendée. Le président du parti, Christian Jacob, qui a fait part de son « soutien indéfectible » à Nicolas Sarkozy, a employé des mots encore plus durs. « La sévérité de la peine retenue est absolument disproportionnée et révélatrice de l’acharnement judiciaire d’une institution déjà très contestée. Toute la lumière devra être faite sur les méthodes et l’indépendance du PNF. »

« Je trouve ça dégueulasse »

Au Sénat, Joëlle Garriaud-Maylam a également été l’une des premières à réagir sur les réseaux sociaux. « Pourquoi cette dérangeante impression d’un véritable acharnement contre lui ? Bien sûr, il fera appel. Je n’ai évidemment pas à commenter une décision de justice. Mais tout homme, même ancien Président, même de droite, a droit à une justice aussi impartiale que possible ! » s’est exclamée la sénatrice des Français de l’étranger.

« Je trouve ça dégueulasse », s’indigne à son tour Alain Houpert. Joint par Public Sénat, le sénateur de Côte-d’Or estime que « les ficelles sont très grosses ». « Le parquet national financier a été créé par M. Hollande pour démolir M. Sarkozy […] Aller chercher les fadettes d’un avocat, je ne comprends pas. » Le parlementaire sarkozyste voit dans l’instruction qui a précédé le procès, une « chasse aux sorcières ». « On est dans le couvre-feu juridique », dénonce-t-il.

Valérie Boyer estime qu’il faut « probablement » une mission sur le fonctionnement du Parquet national financier

Contactée par Public Sénat, la sénatrice Valérie Boyer s’est également indignée de la décision. « Cette affaire est susceptible de remettre en cause les fondements de l’état de droit, avec l’atteinte au droit à la vie privée, et aux droits de la défense, le secret professionnel et le secret de l’instruction. On a extorqué des bribes de phrases entre un client et son avocat. »

Pour la parlementaire des Bouches-du-Rhône, « l’acharnement » judiciaire à l’encontre de Nicolas Sarkozy est « curieux », et rappelle celui de François Fillon en 2017, lui aussi concerné par une enquête du Parquet national financier. « Comme par hasard, ça donne tombe sur deux leaders de la droite. » La sénatrice va même jusqu’à affirmer que l’instruction a directement pesé sur la présidentielle de 2017 : « Sans le parquet national financier, Emmanuel Macron ne serait pas président », selon elle. « La vie politique française, à un moment donné, ne peut pas être dans les mains de quelques juges, qui ont été nommés dans des conditions particulières. » Comme Christian Jacob, la sénatrice estime qu’il y aurait « probablement une mission [parlementaire] à mener sur le fonctionnement du PNF. »

Nicolas Sarkozy avait été placé sur écoute en 2013, dans l’affaire des soupçons de financement libyen de sa campagne de 2007. Les juges ont découvert qu’il avait utilisé une ligne téléphonique secrète, ouverte sous le nom de « Paul Bismuth », pour échanger avec son avocat Thierry Herzog. Une dizaine de conversations ont été retranscrites. Pour le tribunal, elles prouvent qu’un « pacte de corruption » a été conclu entre Nicolas Sarkozy, son avocat et l’ancien haut magistrat Gilbert Azibert.

Les juges ont estimé ce lundi que l’ancien président s’était rendu coupable de corruption, en promettant d’appuyer la candidature de M. Azibert pour un poste de prestige à Monaco, en échange d’informations privilégiées, voire d’une influence sur un pourvoi en cassation qu’il a formé.

Nicolas Sarkozy, qui a été « garant de l’indépendance de la justice, s’est servi de son statut d’ancien président pour gratifier un magistrat ayant servi son intérêt personnel », a déclaré la présidente de la 32e chambre correctionnelle de Paris, Christine Mée, dans son délibéré.

La même sanction a été prononcée pour l’ancien haut magistrat Gilbert Azibert et l’avocat de l’ex-président, Thierry Herzog. Ce dernier a également été condamné à une interdiction professionnelle de cinq ans. Ils ont par ailleurs été reconnus coupables de violation du secret professionnel.

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