À la Cour de cassation, l’étron fumant, Marine Le Pen et les contours de l’injure
Caricaturer Marine Le Pen en excrément fumant, est-ce commettre le délit d'injure ? La Cour de cassation, réunie vendredi dans sa formation la...
Par Juliette MONTESSE
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Caricaturer Marine Le Pen en excrément fumant, est-ce commettre le délit d'injure ? La Cour de cassation, réunie vendredi dans sa formation la plus solennelle, s'est penchée le plus sérieusement du monde sur une question qui, derrière ses airs cocasses, renferme un réel débat de droit.
"Quand cette affaire d'injure scatologique a commencé, qui aurait pensé que ses effluves arriveraient jusque sous les ors de la Cour de cassation ?", ironise d'entrée l'avocat de la présidente du Rassemblement national, Bruno Le Griel.
L'objet du délit - ou de l'absence de délit, c'est là toute la question - est une caricature de Charlie Hebdo, exhibée un soir de janvier 2012 par Laurent Ruquier sur le plateau de son émission "On n'est pas couché" sur France 2.
Le dessin, une fausse affiche de campagne présidentielle, était paru quelques jours plus tôt dans l'hebdomadaire satirique. Y figurait un étron fumant sur fond tricolore, sous le slogan "Le Pen, la candidate qui vous ressemble".
Marine Le Pen n'avait pas attaqué Charlie Hebdo, mais avait poursuivi Laurent Ruquier, en raison de son public bien plus large, pour injure.
La justice l'avait déboutée en 2014 puis 2015, avant que la Cour de cassation, en 2016, ne juge que les limites de la liberté d'expression avaient été dépassées, le dessin portant atteinte "à la dignité de la partie civile en l'associant à un excrément", et n'ordonne un troisième procès.
Las ! En 2017, la cour d'appel l'avait de nouveau déboutée, reconnaissant "le caractère matériellement injurieux de l'affiche" mais estimant qu'elle ne portait pas atteinte à la dignité de la présidente du parti d'extrême droite.
A la Cour de cassation, des hauts magistrats parés de pourpre, d'hermine et d'un sérieux à toute épreuve
AFP/Archives
Marine Le Pen avait formé un nouveau pourvoi en cassation, renvoyé, en raison de la "résistance" de la cour d'appel, devant la formation la plus solennelle de la haute cour.
En dépit du sujet, infiniment plus léger que ceux traités récemment par cette assemblée plénière - Vincent Lambert, GPA à l'étranger...-, le débat reste feutré sous la houlette de ces hauts magistrats parés de pourpre, d'hermine et d'un sérieux à toute épreuve.
- "Jugement de dégoût" -
Tout le monde semble d'accord sur le caractère outrageant du dessin. Faut-il pour autant condamner Laurent Ruquier ? La question est celle des contours du délit d'injure, de la liberté d'expression et de la notion de "dignité" avancée par la Cour de cassation en 2016.
Pour l'avocat de Marine Le Pen, aucun doute, il faut condamner. "C'est avant tout de sa personne qu'il s'agit: nous ne sommes plus dans le domaine de la critique mais dans celui de l'insulte la plus grossière", martèle Me Le Griel.
Charlie, "ce n'est pas le genre d'humour de l'honnête homme", et Laurent Ruquier voulait faire rire "aux dépens d'autrui, de sa réputation, de sa considération, de sa dignité", insiste-t-il.
Au contraire, l'avocat du présentateur, François Pinet, estime que la "mise en balance des intérêts en jeu" doit profiter à son client: une personnalité politique caricaturée comme telle, sous une forme "évidemment satirique", dans un contexte de campagne... Pour lui, le critère de "l'atteinte à la dignité" ne peut prévaloir.
L'intention est de "faire rire", souligne l'avocat, et ce en exprimant "un jugement de dégoût sur le programme et les idées".
A la Cour de cassation, des hauts magistrats parés de pourpre, d'hermine et d'un sérieux à toute épreuve
AFP/Archives
Comme Me Pinet, l'avocat général, dont le rôle est de défendre la loi, a préconisé le rejet du pourvoi de Marine Le Pen.
Pour ce haut magistrat, la notion de "dignité de la personne humaine" ne peut généralement être érigée en "limite absolue à la liberté d'expression" que lorsqu'elle concerne des messages "racistes, xénophobes, antisémites ou ségrégationnistes".
L'étron fumant étant bien éloigné d'un tel cas de figure, il reste à apprécier si les limites de la liberté d'expression ont été dépassées. Celles-ci étant plus larges lorsqu'il s'agit de satire et d'hommes politiques, dans ce cas précis, condamner M. Ruquier causerait une "atteinte disproportionnée" à cette liberté, a conclu l'avocat général.
Alors que François Bayrou souhaite pouvoir avoir le ministre de l’Intérieur sortant dans son équipe, Bruno Retailleau a obtenu les garanties qu’il attendait, selon l’entourage du ministre. Il est prêt à lâcher l’idée d’un grand texte immigration, qui susciterait une levée de boucliers, pour « saucissonner » les sujets via plusieurs propositions de loi. Globalement, les LR sont rassurés et devraient rester au gouvernement.
Alors que le premier ministre a demandé aux partis de se positionner par rapport à l’exécutif selon trois choix, les partis de gauche ne souhaitent pas rentrer pas dans le jeu de François Bayrou. Ils attendent des signaux qui pourraient les amener à ne pas censurer. Mais ils ne les voient toujours pas…
C’est le signe d’ouverture vers la gauche qu’on retient de la réunion, ce jeudi 19 décembre, entre les différents représentants des partis politiques (hors Rassemblement national et La France insoumise) et François Bayrou. Le nouveau Premier ministre propose de remettre en débat la réforme des retraites, pour aboutir à un nouveau compromis avec les partenaires sociaux d’ici septembre. Sans nouvel accord, c’est la réforme adoptée en 2023 qui continuerait à s’appliquer. « Lorsque François Bayrou met tous les représentants de partis et de groupes autour de la table, je pense qu’il envoie un signal d’ouverture qui va le légitimer. Il est conscient de la situation politique inédite et il tend des mains », salue la députée Renaissance Eléonore Caroit, sur le plateau de Parlement Hebdo, au lendemain de la rencontre. « Au lieu d’avoir cette posture de contestation permanente, travaillons ensemble ! » « La première des choses, c’est de suspendre l’application de cette réforme, pour permettre aux 50 000 salariés qui devaient partir en retraite et qui en ont été empêchés cette année de pouvoir le faire », rétorque le sénateur communiste Ian Brossat. Une position partagée par l’ensemble des partis de gauche, à la sortie de la rencontre à Matignon la veille. Tous attendent davantage de compromis de la part du Premier ministre, avant de s’engager à ne pas le censurer. « Pour l’instant, il n’y a absolument rien qui garantisse à François Bayrou d’échapper à une motion de censure, parce que tout ce qu’il dit va dans le sens d’une perpétuation des politiques macronistes menées depuis 7 ans », fustige le sénateur communiste. Une position que dénonce vivement la députée Renaissance : « S’il faut revenir sur cette réforme, s’il y a des choses à améliorer, je suis tout à fait prête à ce qu’on en discute. Mais je pense qu’il faut qu’on arrête de polariser le débat. Au lieu d’avoir cette posture, cette attitude de renfermement et de contestation permanente, travaillons ensemble ! » Ian Brossat dénonce un « déni de démocratie » Ce n’est pas la première fois que le débat des retraites revient sur la table ces derniers mois. À la fin du mois de novembre, La France insoumise avait profité de sa niche parlementaire à l’Assemblée pour introduire une proposition de loi visant à abroger la réforme. Après des débats houleux, le texte n’avait pas pu être voté en raison du trop grand nombre d’amendements déposés par les groupes de la droite et du centre. « Lorsqu’ils ont eu la possibilité de voter aux dernières élections, les Français ont massivement soutenu des partis politiques qui s’engageaient à abroger la réforme. Quand ce sujet a, à nouveau, été débattu à l’Assemblée, les députés macronistes ont pratiqué l’obstruction pour éviter le vote d’une loi d’abrogation », dénonce Ian Brossat. « Si nous étions dans un pays véritablement démocratique, cette réforme serait déjà abrogée », ajoute-t-il, dénonçant un « déni de démocratie ». Une expression qui ne passe pas pour Eléonore Caroit. « C’est une réforme dont l’examen a pris trois semaines, vous pensez qu’elle aurait pu être abrogée dans une niche parlementaire ? C’est fantaisiste », fustige la députée. De son côté, François Bayrou a répété sur le plateau de France 2 après la rencontre à Matignon, qu’il était ouvert à une autre solution que le report de l’âge de départ de 62 à 64 ans pour financer le système des retraites. Le nouveau Premier ministre a notamment rappelé qu’il avait été « un militant de la retraite à points ».
Les chefs de partis et de groupes parlementaires étaient reçus à Matignon par François Bayrou, qui promet de former un gouvernement « avant Noël ». Une rencontre dont les socialistes, écologistes et communistes ressortent sans avoir « trouvé de raison de ne pas censurer » le nouveau Premier ministre, rapporte Olivier Faure.