5G : heurté par la méthode, le Sénat rejette «l’amendement anti-Huawei» du gouvernement

5G : heurté par la méthode, le Sénat rejette «l’amendement anti-Huawei» du gouvernement

Les sénateurs ont rejeté l’amendement du gouvernement au projet de loi Pacte, dont le but était de soumettre l’exploitation des réseaux télécoms à une autorisation préalable, en vue du déploiement de la 5G. La mesure, absente du texte initial, n’a pu faire l’objet d’une expertise suffisante.
Public Sénat

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Nouvelle déconvenue pour le gouvernement au Sénat. L’amendement qu’il a présenté dans la discussion du projet de loi Pacte (croissance et transformation des entreprises), pour sécuriser le déploiement de la 5G en France, a été rejeté ce mercredi soir par le Sénat et sa majorité de droite. Les sénateurs ont estimé que le débat méritait une discussion plus approfondie et des études d’impact.

Dans la foulée d’autres dispositions du texte sur l’encadrement d’investissements étrangers, l’amendement visait à instaurer une autorisation du gouvernement, préalable à l'exploitation des réseaux de télécoms, notamment dans le cadre du déploiement du réseau mobile de nouvelle génération la 5G, un terrain sur lequel le Chinois Huawei occupe une place prépondérante (relire notre article). Il s’agissait de protéger les infrastructures d’espionnage et d’éventuels « sabotages ». Mais l’amendement précise qu’il « ne vise pas un équipementier en particulier ».

« Avec la 5G, les données sensibles seront dans les cœurs de réseaux, et dans les antennes relais […] Imaginez un jour qu’il y ait un black-out complet sur la 5G qui sert à piloter les véhicules autonomes », a averti le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, plus tôt dans la discussion.

5G : un sujet « absolument stratégique », estime Bruno Le Maire
01:57
5G : un sujet « absolument stratégique », estime Bruno Le Maire

« Il nous semble important d’ouvrir cette discussion »

L’amendement gouvernemental est arrivé tard dans la discussion parlementaire. Il a été présenté au Sénat le 25 janvier et n’a donc fait l’objet d’aucun débat à l’Assemblée nationale auparavant. « Il est arrivé tardivement, on en est tout à fait conscient, mais compte tenu de l’enjeu, il nous semble important d’ouvrir cette discussion », a expliqué la secrétaire d’État Agnès Panier-Runacher, parlant d’un « amendement d’appel », susceptible d’évoluer en commission mixte paritaire avec les députés. « Et nous n’avons pas tant de textes législatifs dans les prochains jours qui permettent d’ouvrir cette discussion. Or la technologie, elle avance et elle n’attend pas la discussion parlementaire. » Un refus aurait des conséquences néfastes sur la sécurité nationale, mais créerait aussi de l’incertitude auprès des opérateurs, selon la secrétaire d'État.

« Vous venez d’exposer un sujet qui dépasse largement le cadre d’un simple amendement », a considéré la co-rapporteure du texte, Élisabeth Lamure (LR). « C’est sujet stratégique, et c’est bien parce qu’il est important, que nous avons besoin de temps pour approfondir, expertiser. Et ce temps, nous ne l’avons pas eu. »

« Une méthode quelque peu détestable »

« Je m’étonne que l’on demande au Sénat d’apporter son soutien sur un tel sujet, qui selon le cas, doit apporter de grandes perturbations dans le déploiement des réseaux », a déploré Patrick Chaize (LR), spécialiste de ces questions à la Haute assemblée. Et d’ajouter, que « dans son avis du 4 février, l’Arcep [l’autorité de régulation du secteur, NDLR] n’est pas en mesure d’évaluer les risques encourus ». « Acceptez que le Parlement ait le temps d’établir les travaux nécessaires. »

5G : « Acceptez que le Parlement ait le temps d’établir les travaux nécessaires », demande Chaize
02:48
« Acceptez que le Parlement ait le temps d’établir les travaux nécessaires », demande Chaize

Son collègue Marc Daunis (PS) a, lui, estimé que la « méthode » était « quelque peu détestable ». « La technologie avance. Heureusement pour nous, elle n’avance pas depuis hier soir […] Vous nous placez devant une situation quasiment de fait accompli. »

Amendement 5G du gouvernement : « Une méthode quelque peu détestable », dénonce Marc Daunis
02:35
« Une méthode quelque peu détestable », dénonce Marc Daunis

La présidente de la commission des Affaires économiques, Sophie Primas (LR), a, elle, plaidé en faveur d’un vrai travail de fond, associant les sénateurs. Elle s’est adressée à la secrétaire d’État : « C’est vous qui avez les clés du camion […] Un petit projet de loi sur cette problématique-là, c’est quelques semaines, le temps de travailler […] C’est un vrai gros sujet, on ne peut pas le prendre comme ça au détour d’un fauteuil de Sénat, ce n’est pas possible. Il faut faire les choses sérieusement. »

5G : « Ce n’est pas possible, il faut faire les choses sérieusement », réclame Sophie Primas
01:15
« Ce n’est pas possible, il faut faire les choses sérieusement », réclame Sophie Primas

Dans la même thématique

Paris: Weekly session of questions to the government at the french senate
6min

Politique

Budget : les sénateurs écologistes accusent la majorité du Sénat de « lâcher les collectivités »

Alors que la majorité sénatoriale veut réduire l’effort demandé aux collectivités de 5 à 2 milliards d’euros dans le budget, c’est encore trop, aux yeux du groupe écologiste du Sénat. « Il y a un changement de pied de la majorité sénatoriale », pointe le sénateur Thomas Dossus. Avec le groupe PS et communiste, ils vont présenter onze amendements identiques « pour faire front commun ».

Le

5G : heurté par la méthode, le Sénat rejette «l’amendement anti-Huawei» du gouvernement
2min

Politique

Retrait de la plainte de Noël Le Graët : « une décision sage et prudente » réagit Amelie Oudéa-Castera

A quelques jours de l’audience qui devait avoir devant la cour de justice de le République, Noël Le Graët, par la voix de son avocat a annoncé retirer sa plainte pour diffamation contre l’ancienne ministre des Sports. Invitée dans l’émission Sport etc, Amélie Oudéa-Castéra réagit en exclusivité à cette annonce au micro d’Anne-Laure Bonnet.

Le

G7 summit in Borgo Egnazia
6min

Politique

Nomination des commissaires européens : « On constate qu’Ursula von der Leyen ne peut pas se passer du soutien de Giorgia Meloni », note un spécialiste des partis européens 

La Commission européenne devrait pouvoir entrer en fonction dès le 1er décembre après l’accord entre les trois principaux partis européens sur le collège des commissaires. Un accord qui illustre la place centrale de la droite européenne, prête à s’allier avec l’extrême droite.

Le

5G : heurté par la méthode, le Sénat rejette «l’amendement anti-Huawei» du gouvernement
2min

Politique

Face au « désarroi » des collectivités, Karim Bouamrane, maire PS de Saint-Ouen, « appelle à la prise de conscience du premier ministre »

Alors que le gouvernement demande un effort budgétaire de 5 milliards d’euros aux collectivités – « 11 milliards » selon les élus – le socialiste Karim Bouamrane affirme que « Michel Barnier est totalement inconscient ». Le PS a organisé ce matin, devant le congrès des maires, un rassemblement pour défendre les services publics.

Le