Invité de la matinale de Public Sénat, l’ancien ministre des Affaires étrangères, Hubert Védrine livre son analyse de l’impact de l’élection de Donald Trump pour les Européens, et en particulier dans la gestion de la guerre en Ukraine.
Vance, Musk, Kennedy… la nouvelle garde rapprochée de Donald Trump à la Maison Blanche
Par Quentin Gérard
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Bientôt de retour à la Maison Blanche, Donald Trump ne veut pas commettre les mêmes erreurs qu’en 2016. Le 47e président des Etats-Unis s’est entouré d’une garde rapprochée différente pour conquérir le pouvoir. Elle est « plus forte et percutante » selon Steve Bannon, l’ancienne éminence grise de l’homme d’affaires. Pierre Guerlain, professeur retraité d’études américaines est moins emballé : « Trump choisi très mal les personnes qui travaillent avec lui. Lors de sa première présidence, Mike Pompeo (secrétaire d’Etat) et John Bolton (conseiller) s’étaient retournés contre lui. Je pense que ça va continuer ».
Le colistier J.D Vance
L’un des visages de cette nouvelle galaxie est le prochain vice-président, J.D Vance. C’est peu dire qu’il ne figurait pourtant pas parmi les soutiens initiaux de Donald Trump. En 2016, il le qualifiait « d’héroïne culturelle seulement capable d’apporter un bref sentiment de satisfaction à ses électeurs ». L’avocat s’interrogeait même sur la possibilité que le milliardaire se transforme en « Hitler Américain ». Puis J.D Vance s’est ravisé. Il a supprimé ses anciennes critiques, parfois acerbes, sur les réseaux sociaux. L’ancien militaire a ensuite réussi à attirer l’attention de Donald Trump pour qu’il le soutienne en vue de la primaire républicaine pour la sénatoriale de l’Ohio en 2022.
A 40 ans, il va devenir le troisième plus jeune vice-président de l’histoire des Etats-Unis. Dans le même temps, Donald Trump sera le plus vieux dirigeant américain jamais intronisé. « On ne sait pas du tout quels rapports ils vont avoir et si J.D Vance va réussir à influencer le président », souligne Pierre Guerlain, professeur retraité d’études américaines. Parfaitement aligné sur les positions migratoires et économiques de son patron, son colistier apparaît plus à droite sur d’autres sujets. Notamment l’avortement contre lequel il s’est prononcé contre certaines exceptions, comme en cas d’inceste ou de viol. J.D Vance est aussi une des figures de la « nouvelle droite américaine ». Un courant issu de jeunes conservateurs qui veulent donner une orientation plus radicale au mouvement isolationniste et anti-immigration de Donald Trump.
Elon Musk, l’entrepreneur star qui en veut aux démocrates
Mais la nouvelle star de la galaxie trumpienne est bien le fondateur de Tesla. Elon Musk n’a pas ménagé ses efforts pour permettre à Donald Trump d’être élu. Il a dépensé plus de 110 millions de dollars dans la campagne et a utilisé son réseau social X (ex-Twitter) pour faire la promotion du candidat républicain. « Dans sa nouvelle équipe, une chose qui change réellement, ce sont les personnes comme Elon Musk qui se sont retournées contre les démocrates », pointe Pierre Guerlain. En effet, le créateur de SpaceX semble avoir un profond ressentiment envers Joe Biden depuis qu’il a refusé de l’inviter à un sommet sur la voiture électrique à la Maison Blanche en 2021, sous prétexte que les usines Tesla n’étaient pas syndiquées, et d’avoir faussement prétendu que General Motors avait inventé la voiture électrique.
L’entrepreneur devrait hériter d’une « commission d’efficacité gouvernementale ». Elle sera chargée de mener un « audit financier et de performance complet de l’ensemble du gouvernement fédéral ». Mais aussi de faire « des recommandations pour des réformes drastiques » pour économiser « des milliers de milliards de dollars ». Son premier objectif serait de réduire 2 000 milliards de dollars sur le budget fédéral, actuellement de 7 000 milliards de dollars.
Robert Kennedy Jr au ministère de la Santé ?
La troisième figure est Robert Kennedy Jr, neveu de l’ancien président John Fitzgerald Kennedy. Donald Trump s’est engagé à lui confier un « rôle important » après qu’il s’est retiré de la course présidentielle en sa faveur. L’ancien candidat indépendant – un temps considéré comme le « troisième homme » de la campagne – pourrait être nommé ministre de la santé.
Il souhaite s’en prendre aux lobbys et aux treize agences fédérales. Selon The Washington Post, Robert Kennedy Jr a déjà élaboré des plans pour « nettoyer la corruption et les conflits au sein des agences » et « mettre fin à l’épidémie de maladies chroniques ». Fondateur de l’association antivax Children’s Health Defense, l’avocat spécialiste dans le droit de l’environnement a assuré ne pas avoir l’intention de remettre en question la vaccination. Sur la scène, mercredi matin, Donald Trump a promis que Robert Kennedy Jr va « rendre sa santé à l’Amérique ».
Robert Lighthizer, potentiel futur secrétaire au Trésor
Qui connaît Robert Lighthizer ? Si son nom est moins connu que les trois dernières personnalités, son influence sur Donald Trump est considérable. Cet avocat de 77 ans était son représentant au Commerce du 2017 à 2021. Il s’est rapproché de Donald Trump pendant sa traversée du désert. Venu habiter à Palm Beach, il est devenu son voisin. Le Monde révèle que ce nostalgique de l’ère Reagan pourrait devenir secrétaire au Trésor. Robert Lighthizer souhaite une balance commerciale à l’équilibre et pourrait porter lui-même les hausses de droits de douane promises par Donald Trump.
Ce spécialiste de l’économie voit dans la création de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et dans l’adhésion de la Chine en 2021 la cause des malheurs de l’Amérique. Dans son livre, il plaide pour un découplage presque complet avec la Chine. Il prône une dévaluation du dollar et l’instauration d’un mécanisme pour compenser la TVA inexistante aux Etats-Unis qu’il assimile à une taxe européenne sur les importations.
Susie Wiles pour diriger le cabinet de Trump ?
Sur la scène, mercredi, c’est vers elle que Donald Trump s’est tourné après avoir évoqué le rôle de J.D Vance. Cette femme discrète est celle qui a mené la campagne victorieuse du milliardaire. Après son rôle fondamental ces derniers mois, Susie Wiles pourrait bien occuper le précieux poste de chef de cabinet à la Maison Blanche. « Elle a gagné la confiance de Donald Trump, qui apprécie qu’elle ait été prête à l’aider après son départ de la Maison-Blanche, et elle est largement respectée par l’équipe de campagne et les membres du Congrès », rapporte Politico.
« Sa durée de vie risque d’être limitée à la Maison Blanche. Lors de son dernier mandat, Trump a eu quatre chefs de cabinet en l’espace de quatre ans », indique Pierre Guerlain. « Le président veut une personne qui gère tout, il délègue beaucoup de compétences aux gens qu’il connaît peu. Dès que ça se passe mal, Trump se croit dans son ancienne émission de télévision et il les vire », poursuit le spécialiste de la politique américaine.
Grenell, Cotton, Miller…
Quelques noms circulent pour les autres postes à la Maison Blanche. Celui de Richard Grenell est évoqué pour la fonction de conseiller à la sécurité nationale ou chef de la diplomatie. Il a été ambassadeur des Etats-Unis en Allemagne de 2018 à 2020 avant d’être nommé directeur du renseignement national. Donald Trump l’appelle son « envoyé ». Susan Rice, ancienne conseillère à la sécurité nationale de Barack Obama, l’avait qualifié « d’une des personnes les plus méchantes et malhonnêtes que j’ai jamais rencontrée ».
L’autre est celui de Tom Cotton. Sénateur de l’Arkansas, dont le nom a été évoqué pour être colistier de Donald Trump, pourrait finalement diriger le Pentagone. Il a été l’un des premiers partisans du républicain et l’a conseillé pendant son dernier mandat. Un autre survivant de 2016 pourrait faire son retour : Stephen Miller. Ancien conseiller spécial de Donald Trump, c’est l’un des plus fervents opposants à la Chine et défend de longue date l’expulsion de millions de migrants venus illégalement. « Tout le programme de Donald Trump en matière d’immigration est marqué du sceau de Stephen Miller », assure René Lindstädt, spécialiste de la politique américaine à l’université de Birmingham.
Quid de la famille Trump ?
Quand Donald Trump est arrivé sur scène à Palm Beach mercredi, toute la famille était là. Lors de son premier mandat, Ivanka Trump et son époux Jared Kushner exerçaient une influence considérable. Ils se sont ensuite éclipsés de la scène politique après l’assaut du Capitole. Depuis, Lara Trump, belle-fille du président, a pris le relais. Elle est devenue co-présidente du Comité national républicain, organe très importante du parti républicain. « Donald Trump a une pratique très népotique du pouvoir. Sa famille va reprendre du service », prédit Pierre Guerlain.
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