Borys Filatov, maire de la ville de Dnipro, était l’un des élus ukrainiens invités ce mardi à prendre la parole au Congrès des maires organisé par l’AMF. Mille jours après l’invasion russe de l’Ukraine, il témoigne sur Public Sénat d’un conflit toujours aussi difficile à supporter pour la population de son pays.
Que peut-on attendre de la visite d’Emmanuel Macron en Israël ?
Par Romain David
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Emmanuel Macron se rendra en Israël mardi 24 octobre, a fait savoir l’Elysée dimanche soir. Une annonce qui tombe un peu plus de deux semaines après l’attaque surprise perpétrée par le Hamas contre l’Etat hébreu et qui a fait au moins 1 400 morts, pour la plupart civils, selon les autorités israéliennes. Le chef de l’Etat rencontrera son homologue, le Premier ministre Benyamin Netanyahu, mais le programme précis de ce déplacement n’a pas été communiqué. La semaine dernière, en marge de son voyage en Albanie, le président de la République avait évoqué devant la presse la possibilité d’un prochain déplacement à Tel-Aviv, alors que les visites sur place de chefs d’Etat et de gouvernements étrangers s’enchaînent. « Ma volonté, c’est de pouvoir m’y déplacer quand nous pourrons obtenir un accord concret, soit sur la non-escalade, soit sur les questions humanitaires », avait alors précisé Emmanuel Macron.
Travailler à la libération des otages
« Je ne sais pas dans quel état d’esprit il y va. Il voulait y aller uniquement s’il pouvait se rendre utile. J’imagine que la libération de deux otages américaines détenues par le Hamas la semaine dernière envoie un signal positif. Il va sans doute voir s’il peut obtenir les conditions d’une libération des otages français », relève auprès de Public Sénat le sénateur LR Roger Karoutchi, membre de la commission des Affaires étrangères. « Des gages ont été donnés, les premières libérations montrent que les négociations avancent. Il faut le voir comme cela », abonde la vice-présidente de la commission, la socialiste Hélène Conway-Mouret. Ce dossier devrait occuper une large part des discussions entre Emmanuel Macron et Benyamin Netanyahou.
Selon un dernier bilan, au moins 30 Français sont morts dans l’attaque du 7 octobre. Sept ressortissants sont toujours portés disparus, mais un seul a été confirmé comme otage du Hamas à Gaza. Il s’agit de Mia Shem, 21 ans, capturée alors qu’elle assistait à un festival de musique dans le désert du Neguev.
Comme l’a rappelé Emmanuel Macron dans son allocution télévisée du 12 octobre, la France n’avait plus connu un aussi lourd bilan dans une attaque terroriste depuis l’attentat de Nice, le 14 juillet 2016. Le chef de l’Etat pourrait aussi s’entretenir avec les familles franco-israéliennes endeuillées. « J’espère que le président de la République pourra afficher sa solidarité vis-à-vis des familles françaises », a commenté la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet, ce lundi sur France Inter.
Afficher l’unité des Européens
Cette visite intervient après celle de plusieurs dirigeants occidentaux : le président américain Joe Biden, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, le chancelier allemand Olaf Scholz, le Premier ministre britannique Rishi Sunak, Giorgia Meloni la présidente du Conseil des ministres en Italie ou encore, ce lundi, Mark Rutte, le Premier ministre néerlandais. En France, plusieurs responsables politiques se sont étonnés de ne pas voir le chef de l’Etat montrer plus d’empressement à se rendre sur place.
« Il fallait qu’il y aille, j’aurais préféré plus tôt, après la visite du président des Etats-Unis qui restent le principal allié d’Israël », relève encore Roger Karoutchi. « La multiplication des visites de dirigeants européens est un bon signe. Elle montre qu’il y a une solidarité européenne à l’égard d’Israël qui fonctionne plutôt bien, d’autant que les discours tenus sont tous à peu près les mêmes. » Reste à savoir si, au-delà de la dimension symbolique, le président de la République sera en mesure de faire bouger les lignes. « S’il obtenait des avancées sur les otages et le maintien d’un couloir humanitaire, ce serait déjà pas mal, mais imaginer qu’il puisse obtenir des éléments en faveur d’une sortie du conflit armé direct me paraît utopique. Quant au processus de paix, n’en parlons pas, cela fait 70 ans que l’on cherche une solution », ajoute le sénateur des Hauts-de-Seine.
Prévenir le risque de contagion du conflit
La France aura certainement à cœur de rappeler sa position face au conflit israélo-palestinien, celle d’une solution à deux Etats, tout en rappelant, selon une formule utilisée par Emmanuel Macron, qu’« Israël a le droit de se défendre, en éliminant les groupes terroristes dont le Hamas, par des actions ciblées ». Ce qui pourrait aussi amener le président à fixer des lignes rouges : sur le bombardement des populations civiles de Gaza et le maintien d’une aide humanitaire. « Il est difficile de fixer des garde-fous dans un conflit dont nous ne sommes pas partie prenante », nuance Roger Karoutchi.
Selon les chiffres du ministère de la Santé du Hamas, les représailles israéliennes sur la bande de Gaza auraient fait plus de 5 000 morts, une donnée difficile à vérifier. « Les bombardements qui tuent des Palestiniens à Gaza ne doivent pas être oubliés », souligne Hélène Conway-Mouret. « L’offensive terrestre ne cesse d’être repoussée, espérons qu’elle le soit ad vitam aeternam, car cela ne résoudra rien ».
Le président de la République pourrait profiter de ce déplacement pour s’arrêter dans l’un des pays arabes de la région. Manière aussi de prévenir un risque d’embrasement du conflit. « La voix de la France, la voie diplomatique française portent dans cette région, notamment auprès du Liban et de l’Egypte », a expliqué Olivier Véran, le porte-parole du gouvernement, dans la matinale de France 2, sans toutefois confirmer qu’il y aurait bien une escale dans l’un ou l’autre de ces pays. « Le Liban reste miné par la crise constitutionnelle. Mais pourquoi pas l’Egypte ? Il s’agit de la puissance régionale la plus proche d’Israël. Il est plus facile de discuter avec le président al-Sissi, qui est à la tête d’un gouvernement solide », note Roger Karoutchi. C’est d’ailleurs depuis l’Egypte que transite l’aide humanitaire pour Gaza, via le point de passage de Rafah. Pour sa part, Hélène Conway-Mouret insiste sur le poids du Qatar, « qui joue un rôle dans les négociations dans la région depuis très longtemps déjà, et avec lequel nous avons de bonnes relations ».
Seule, la France ne semble disposer que d’une influence plutôt limitée. Mais la visite d’Emmanuel Macron est aussi à replacer dans un contexte plus global. Paris s’est engagée dans une « coordination diplomatique étroite » avec Washington, Londres, Ottawa, Berlin et Rome, rappelle un communiqué de l’Elysée. L’objectif : « Eviter que le conflit ne s’étende, préserver la stabilité au Moyen-Orient et œuvrer en faveur d’une solution politique et d’une paix durable. » « La France doit arriver à porter une voix singulière, il faut aussi faire attention à cela », nuance Guillaume Gontard, le président du groupe écologiste au Séant, co-auteur d’un rapport sur le processus de paix dans la région. « Notre parole a toujours été une parole juste, attentive au respect du droit international. »
Polémique après le déplacement de Yaël Braun-Pivet
Deux responsables français ont déjà effectué un déplacement en Israël depuis la reprise des hostilités : Catherine Colonna la ministre des Affaires étrangères, le 15 octobre, et, ce week-end, la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet. Cette dernière a été vertement critiquée par une partie de la gauche pour avoir évoqué « le soutien inconditionnel » de la France à Israël.
Jean-Luc Mélenchon l’a notamment accusé sur X (anciennement Twitter) de « camper à Tel-Aviv pour encourager le massacre » à Gaza. « Pas au nom du peuple français ! », a ajouté le tribun, accompagnant son post d’une vidéo du rassemblement pro-palestinien de dimanche après-midi place de la République, à Paris. « Je suis convaincue que le mot ‘camper’ n’a pas été choisi par hasard et que le fait que je favorise les massacres, c’est à nouveau une nouvelle cible qu’on me met dans le dos », a réagi sur France Inter la présidente de l’Assemblée nationale, régulièrement visée par des attaques antisémites.
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