C’est l’une des élections les plus serrées de l’histoire récente des Etats-Unis, selon les sondeurs du moins. Si Kamala Harris est donnée en avance à l’échelle nationale, les résultats dans les Etats clés s’annoncent particulièrement disputés. Compte tenu du mode de scrutin, le gagnant devrait être celui ou celle réalisant les meilleurs scores dans les Etats clés. En effet, le mode de scrutin indirect de l’élection présidentielle américaine donne un poids particulièrement important aux Etats qui désignent des grands électeurs devant ensuite élire le président des Etats-Unis.
Selon l’agrégateur de sondages « FiveThirtyEight », les écarts entre Kamala Harris et Donald Trump se trouvent dans la marge d’erreur dans chacun des sept Etats clés. Des écarts particulièrement faibles qui, s’ils venaient à se confirmer, pourraient retarder l’annonce des résultats finaux de l’élection. Après les précédents de 2016 et 2020 où le score de Donald Trump avait été sous-estimé, la qualité des sondages sera particulièrement scrutée. « On observe que plusieurs sondeurs ont tendance à prendre peu de risques, notamment en sélectionnant les sondages qu’ils décident de publier. Cela peut amener à écarter les sondages donnant des écarts trop importants », explique Maxime Chervaux, professeur à l’Institut français de géopolitique et spécialiste de la politique américaine. « A l’inverse, le New York Times n’hésite pas à publier les sondages donnant des écarts importants. C’est également le cas du sondage d’Ann Selzer qui donne Kamala Harris en tête dans l’Iowa à la surprise générale », ajoute le chercheur.
Des écarts très faibles dans les Etats clés
Alors que les bureaux de vote sont ouverts depuis ce matin aux Etats-Unis, plus de 70 millions d’Américains ont d’ores et déjà voté par correspondance. « C’est extrêmement serré dans la dernière ligne droite, ce qui n’est pas surprenant. Et, les résultats donnés par les sondeurs sont dans la marge d’erreur depuis début septembre », relève Maxime Chervaux. L’élection devrait donc se jouer dans sept États clés : l’Arizona, la Caroline du Nord, le Michigan, le Wisconsin, la Pennsylvanie, la Géorgie et le Nevada. « Il semble y avoir une fracture entre les états pivots du Nord et du Sud. Le « blue wall » remonte bien tandis que le Sud semble plutôt pencher pour Donald Trump », rapporte Alexis Pichard, chercheur à l’université Paris Nanterre et docteur en civilisation américaine. Kamala Harris a notamment décidé de multiplier les interventions dans les Etats du « blue wall » (Pennsylvanie, Michigan, Wisconsin) historiquement remportés par les Démocrates. En 2016, la victoire de Donald Trump dans les Etats du Blue Wall lui avait permis d’accéder à la Maison Blanche. Selon les derniers sondages, Kamala Harris dispose d’une courte avance dans le Michigan et dans le Wisconsin (un point) tandis que les deux candidats sont au coude-à-coude en Pennsylvanie.
Alors que le candidat républicain a largement axé sa campagne sur le thème de l’immigration et en particulier de la gestion de la frontière avec le Mexique Donald Trump disposerait d’une avance de deux points en Arizona, un état frontalier du Mexique. Néanmoins, « l’inflation et l’économie restent les priorités des électeurs », note Maxime Chervaux.
Des surprises à venir ?
Alors que la campagne a été marquée par de nombreux rebondissements comme la tentative d’assassinat sur Donald Trump ou le retrait de Joe Biden, de nouvelles surprises ne sont pas à exclure. « L’Iowa ferait partie des nouveaux swing states, le Texas serait donné au coude à coude, c’est une tendance depuis plusieurs élections », affirme Alexis Pichard. Traditionnellement acquis aux Républicains, un récent sondage, dénoncé par Donald Trump, donne Kamala Harris devant le républicain dans l’Iowa. Dans le Michigan, le vote des électeurs musulmans, très présents dans cet État, pourrait permettre à Donald Trump d’y remporter le scrutin. « On observe une dissociation avec les démocrates de cet électorat historiquement acquis à cause du soutien affiché de Kamala Harris à Israël », avance Alexis Pichard.
Hésitations de dernière minute
Par ailleurs, une part importante des électeurs n’avaient pas fait leur choix à quelques jours de l’élection. « On estime qu’il y a entre 3 et 10 % d’indécis. Généralement, ce sont plutôt des électeurs modérés ou indécis, également des républicains qui ne veulent pas voter pour Donald Trump », rapporte Alexis Pichard. Le vote des femmes pourrait également être déterminant, selon un sondage de la chaîne NBC, 57 % des femmes voteraient pour Kamala Harris. En parallèle, plusieurs Etats organisent des référendums sur le droit à l’avortement faisant de la question du droit des femmes un point clé de l’élection. Dans les dernières heures de la campagne, l’équipe de Kamala Harris a publié un clip de trente secondes, narré par Julia Roberts, encourageant les femmes à ne pas suivre le vote de leurs maris rappelant que « ce qu’il se passe dans l’isoloir, reste dans l’isoloir ».