Le texte de l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les pays du Mercosur, finalisé le 6 décembre, a été dévoilé cette semaine par la Commission européenne. Il prévoit une réduction drastique, voire la suppression des droits de douanes sur des quotas de produits fabriqués de part et d’autre de l’Atlantique. La France continue de s’opposer à ce texte, alors que les volumes de denrées agricoles concernés soulèvent l’inquiétude de nombreuses filières.
Midterms aux États-Unis : l’haletante élection du Sénat en Géorgie
Par Clara Robert-Motta
Publié le
Mise à jour jeudi 10 novembre à 8h30
L’école est entourée de grands arbres, on peine à la voir depuis la route. Les électeurs arrivent au compte-goutte dans ce bureau de vote du comté de Gwinnett, à 30 minutes à l’est d’Atlanta en Géorgie. A l’entrée, des panneaux indiquant la marche à suivre sont traduits en sept langues, dont quatre Asiatiques, et les employés des bureaux de vote dirigent les quelques personnes vers les machines qui leur permettront de voter.
Si les électeurs ont dû faire un choix pour désigner leur gouverneur, leurs représentants locaux et un de leurs sénateurs, c’est bien ce dernier scrutin sur lequel les yeux du pays tout entier se sont braqués. Depuis des mois, le candidat sortant, Raphaël Warnock, premier sénateur noir élu d’un État du Sud, est au coude-à-coude avec son opposant républicain, l’ex-footballeur professionnel, Herschel Walker.
Paris, une femme noire aux cheveux courts n’a pas hésité avant de voter : même si elle n’est affiliée à aucun parti, elle a donné son vote aux candidats démocrates, Raphaël Warnock pour le Sénat et Stacey Abrams pour le poste de gouverneur. « J’ai deux filles de 18 et 21 ans, il faut qu’elles aient accès à la contraception et à l’avortement. C’est essentiel. »
Depuis la décision de la Cour suprême de renverser l’arrêt historique Roe vs Wade qui garantissait le droit à l’avortement, le sujet très polarisant a pris une forte ampleur dans la campagne électorale. En Géorgie, le candidat républicain pour le Sénat est accusé par deux de ses ex-compagnes de les avoir forcées à avorter alors qu’il se positionne contre toute forme d’avortement. Aux antipodes, le démocrate Warnock, pasteur dans l’église de Martin Luther King, fustige la loi « battement de cœur » de Géorgie qui interdit d’avorter après six semaines.
Une démocratie en péril, deux visions
Assise sur une chaise dans un coin, Debi, une professeure de sciences retraitée blanche, scrute tous les électeurs qui se présentent au bureau de vote et compte le nombre de votants dans son carnet. Observatrice pour le camp des républicains, elle est volontaire pour son parti et compte s’assurer du bon déroulement de l’élection. « Je veux juste que tout le monde puisse voter dans les meilleures conditions sans les irrégularités qu’on a connues en 2020. » L’élection présidentielle de 2020 est la raison pour laquelle Debi s’est engagée : elle croit que les Démocrates ont volé la victoire de Donald Trump. Pour elle, il faut que les Républicains regagnent la majorité au Congrès afin de « rétablir la démocratie ».
Dans l’autre camp, cette inquiétude est partagée mais d’une façon totalement différente. Bettye, qui a voté démocrate « pour le peuple », pense également que la démocratie est fragilisée mais, pour elle, le danger vient des suprémacistes et des restrictions liées à la citoyenneté.
A 20 minutes de là, près du bureau de vote de l’église Saint Philip, dans le quartier est d’Atlanta, l’ambiance est festive. La chanson phare Earth, Wind & Fire du groupe September fait vibrer les gigantesques basses d’un stand aux ballons oranges et verts et des bénévoles dansent au bord de la route avec leurs pancartes « Vote ! ». Bettye, militante pour le vote depuis les années 70, se démène pour encourager les gens à déposer un bulletin dans l’urne. « Ils croient que leurs voix ne comptent pas, moi, je suis là pour leur dire le contraire. »
L’odeur de barbecue du foodtruck arrive même jusqu’à l’entrée du bureau de vote à une cinquantaine de mètres de là. « Nous ne pouvons pas aller plus proche », explique Kandese de l’organisation non partisane Georgia Stand Up qui informe les électeurs des enjeux de ce rendez-vous et de leurs droits.
Restreindre l’accès électoral par la loi
L’année dernière, le gouverneur, Brian Kemp, a fait passer une loi pour contrôler plus strictement les élections et le processus d’identification dans l’idée de limiter les fraudes. Très décriée du côté démocrate, cette loi a réduit le nombre de bureaux de vote, mais également criminalisé le fait de donner de l’eau ou de la nourriture aux électeurs qui font la queue pour voter. « C’est une façon de restreindre l’accès à la citoyenneté, dénonce Bettye. Et plus particulièrement les populations noires qui sont plus touchées. »
En réaction à l’application de cette loi, les électeurs se sont pressés aux urnes en avance, afin d’être sûrs de pouvoir voter. Dans le seul État de la Géorgie, c’est 2,5 millions de personnes (42 millions dans tous les États-Unis) qui ont glissé un bulletin de vote par la poste ou dans un « early » bureau de vote ces deux dernières semaines.
Le bout du chemin n’est pourtant pas tout à fait proche pour les électeurs géorgiens. Un troisième candidat s’est frayé un chemin dans les urnes. Le libertarien, Chase Oliver, a réussi à grignoter assez de voix aux candidats des deux partis qui n’atteignent ni l’un, ni l’autre les 50 % requis pour être élu en Géorgie. Ces résultats sont confirmés, l’État se lance alors pour un « run-off », une deuxième élection qui aura lieu le 6 décembre entre le Démocrate et le Républicain. Une élection qui a donc le pouvoir de tenir en haleine sur le long terme alors que le résultat permettra de faire basculer le Sénat d’une couleur ou de l’autre.