Ce lundi, Donald Trump est devenu, à 78 ans, le plus vieux président de l'histoire des Etats-Unis à être investi. Dans un discours revanchard, le républicain a promis de s'attaquer à une « élite corrompue et radicale », sous le regard de son successeur et désormais prédécesseur Joe Biden. Il a aussi annoncé entre autres les premiers actes de son offensive anti-immigration. Pour Public Sénat, André Kaspi, historien et spécialiste de la politique américaine, revient sur cette investiture inédite.
« L’Union européenne est divisée. Et c’est le jeu de Donald Trump de la diviser encore plus », alerte Jean-François Rapin
Par Théodore Azouze
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Un avant-goût de ses quatre années de mandat à venir. Lundi, Donald Trump a été officiellement investi en tant que 47ᵉ président des États-Unis, au terme d’une cérémonie tenue au Capitole, en présence de son prédécesseur Joe Biden. Après avoir prêté serment et suivi le protocole des festivités à Washington, le nouveau dirigeant a signé une série de décrets sur différents sujets. À cette occasion, il a notamment annoncé la sortie des États-Unis de l’accord de Paris sur le climat et de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).
Énergie, économie, guerre en Ukraine… Donald Trump a multiplié les sorties chocs lors du premier jour de sa nouvelle présidence. De quoi inquiéter ses alliés européens et ses partenaires économiques, à qui il promet une guerre commerciale avec de nouvelles barrières douanières. « Au lieu de taxer nos citoyens pour enrichir d’autres pays, nous imposerons des droits de douane et des taxes aux pays étrangers pour enrichir nos citoyens », a ainsi déclaré le milliardaire lundi.
« L’unité européenne est cruciale, mais elle n’est pas là »
« Aujourd’hui, Donald Trump revient armé, avec ses convictions et des moyens. Ce nombre impressionnant de décrets qu’il a pu signer d’entrée, montre qu’il était préparé », réagit ce mardi matin Jean-François Rapin, le président (LR) de la Commission des affaires européennes au Sénat, invité de la matinale de Public Sénat ce mardi. Avec ses premiers pas lundi, « on sent très bien que Donald Trump donne le ton de sa présidence », poursuit le parlementaire.
Quelle place accordée à l’Europe face à ces nouvelles positions américaines ? Une seule dirigeante d’un Etat membre des 27, la Première ministre italienne d’extrême-droite Giorgia Meloni, était présente lundi à Washington pour assister à l’investiture de Donald Trump. « L’Union est européenne est divisée. Et c’est le jeu de Donald Trump de la diviser encore plus », avance Jean-François Rapin. « L’unité européenne est cruciale, mais elle n’est pas là », regrette pour sa part Marie-Cécile Naves, chercheuse à l’Iris et autrice de « Géopolitique des États-Unis » (ed. Eyrolles), toujours sur le plateau de Public Sénat.
Le rôle de Washington face à Kiev, qui lui assure aujourd’hui une importante aide militaire, interroge par ailleurs les Européens. Durant sa campagne, Donald Trump avait promis de « régler la guerre en Ukraine en 24 heures » une fois au pouvoir, se disant prêt « à parler » avec Vladimir Poutine pour arrêter « le carnage » en Ukraine. Lundi, il a opté pour un tout autre discours. « Je crois que Poutine est en train de détruire la Russie en refusant un accord. Je pense que la Russie va avoir un gros problème », a-t-il affirmé. « Je pense qu’il est dans son rôle, capable de changer de ligne, c’est assez déstabilisant », y compris « pour l’Ukraine », résume Jean-François Rapin.
« On n’a pas attendu Donald Trump pour avoir une Amérique qui agit de manière unilatérale »
Ces dernières semaines, avant même son entrée en fonction, Donald Trump a également mis en avant des velléités expansionnistes. Il a notamment déclaré à maintes reprises vouloir s’emparer du Groenland, territoire autonome rattaché au Danemark, pays membre de l’UE. Un souhait qu’il a de nouveau répété en marge de son investiture, lundi soir. Autre demande régulière du président américain : la reprise par les Américains du contrôle du canal du Panama. Un souhait contesté par les autorités du pays.
Cette posture, inscrite dans la logique de l’America first du président américain, est toutefois à relativiser selon Pierre Bourgois, maître de conférences en science politique, auteur de « Le néoconservatisme américain » (ed. PUF). « Si on prend la question du multilatéralisme, on n’a pas attendu Donald Trump pour avoir une Amérique qui agit de manière unilatérale, qui défend ses intérêts. Je dirais même que c’est l’histoire des États-Unis. […] Là où il y a une vraie différence, c’est dans la relation américaine aux alliés traditionnels », décrypte le chercheur, interrogé dans la matinale de Public Sénat.
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