Europe Politics

Les commissaires européens sur le grill

Durant le mois de novembre, les eurodéputés vont auditionner les 26 commissaires européens proposés par les Etats-membres et dont les portefeuilles ont été dessinés par la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen. Certains profils de commissaires pourraient être retoqués par le Parlement européen, au terme de ces auditions. On en débat cette semaine dans l’émission Ici l’Europe, sur France 24, Public Sénat et LCP.
Alexandre Poussart

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C’est un rendez-vous redouté par la Commission européenne et scruté de près par les chancelleries de l’Union. Les 26 commissaires européens proposés par les Etats-membres et dont les portefeuilles ont été dessinés par la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen vont être auditionnés par les eurodéputés, du 4 au 12 novembre. Chaque commissaire candidat sera entendu par les commissions du Parlement concernées par son portefeuille. Il devra ensuite être confirmé par les eurodéputés. Tous les 5 ans, au moins un commissaire européen se voit retoqué par le Parlement européen, pour des raisons de compétences, mais aussi en guise de symbole politique, les eurodéputés voulant montrer leur pouvoir face à la Commission européenne. En 2019, les parlementaires s’étaient opposés à la nomination de trois commissaires dont celle de la Française Sylvie Goulard, proposée par Emmanuel Macron, et disqualifiée à cause de l’affaire des emplois fictifs de collaborateurs européens de son parti le Modem.

Une vice-présidence exécutive pour un proche de Giorgia Meloni

Cette année, au sein de ce nouveau collège de commissaires européens, certains profils posent déjà question dans les couloirs de Strasbourg. Et notamment celui de Raffaele Fitto, l’Italien choisi par la dirigeante d’extrême droite Giorgia Meloni, et à qui Ursula von der Leyen souhaite confier une vice-présidence exécutive de la Commission, en charge de la Cohésion et des Réformes au sein de l’Union. C’est la première fois dans l’histoire européenne que la droite radicale obtient un tel poste au sein de l’institution bruxelloise. “C’est un bon résultat pour le gouvernement italien”, se félicite Paolo Borchia, eurodéputé italien de La Lega, le parti de Matteo Salvini qui figure dans la coalition au pouvoir aux côtés du parti Fratelli d’Italia de Giorgia Meloni. “Raffaele Fitto a une véritable expérience européenne puisqu’il était notre ministre des Affaires européennes et qu’il a été également eurodéputé”, estime le parlementaire italien, interrogé dans l’émission Ici l’Europe, sur France 24, LCP et Public Sénat. Pour l’eurodéputée française Fabienne Keller, membre du groupe Renew dans l’hémicycle européen et du bloc central en France, ce poste de prestige offert à un proche de Giorgia Meloni est problématique “alors que les décisions de la dirigeante italienne sont inquiétantes du point de vue du respect des droits fondamentaux et notamment l’externalisation de l’accueil des demandeurs d’asile à l’extérieur de l’Union européenne, comme en Albanie. Une externalisation qui a été d’ailleurs condamnée par la justice italienne”, rappelle Fabienne Keller.

La santé européenne dans les mains de Viktor Orban ?

Un commissaire-candidat risque de ne pas être confirmé par les eurodéputés : Il s’agit du Hongrois Olivier Varhelyi, proche du Premier ministre Viktor Orban, et désigné Commissaire en charge de la Santé et du Bien-être animal. Confier le portefeuille de la santé à un commissaire hongrois interroge alors que la Hongrie de Viktor Orban, pendant la crise du Covid, avait autorisé les vaccins chinois sans certitude sur leur efficacité et d’ailleurs ce pays avait connu l’un des taux de mortalité les plus importants en Europe. Mais ce sont surtout les mauvaises relations qu’Olivier Varhelyi a entretenues avec le Parlement européen durant la précédente mandature, lorsqu’il était Commissaire en charge de l’Elargissement, qui devraient jouer dans la balance de sa confirmation : Olivier Varhelyi est même allé jusqu’à traiter d’idiots les eurodéputés…

Le Français Stéphane Séjourné a-t-il les compétences pour le poste ?

Public Sénat

Côté français, Emmanuel Macron a finalement proposé Stéphane Séjourné comme commissaire européen après qu’Ursula von der Leyen a refusé que l’expérimenté Thierry Breton rempile au sein de ce collège de commissaires, les tensions entre l’Allemande et le Français étant devenues trop fortes pour poursuivre leur collaboration. Après trois années à la tête du groupe Renew Europe au Parlement européen, six mois au ministère des Affaires étrangères sous Gabriel Attal, Stéphane Séjourné a été désigné Commissaire européen en charge de l’Industrie et de l’entrepreneuriat. Un poste-clé pour Emmanuel Macron qui veut relancer l’industrie européenne par des investissements communs des Etats-membres, mais les compétences économiques de Stéphane Séjourné restent encore à démontrer. Pour Fabienne Keller, il ne peut pas y avoir de doutes sur son profil : “Il connaît bien Ursula von der Leyen, maitrise la mécanique de la Commission et possède une vraie vision européenne, grâce à son expérience de président du groupe Renew.”

La transition écologique pour une socialiste espagnole aux positions anti-nucléaire

A la gauche de l’échiquier politique européen, la socialiste espagnole Teresa Ribera a été placée par Ursula von der Leyen au sommet de ce collège de commissaires plutôt orienté à droite, en tant que première vice-présidente de la Commission en charge de la Transition écologique et compétitive. Celle qui était la ministre espagnole de l’Ecologie depuis 2018 pourrait être mise en difficulté par les eurodéputés de droite et d’extrême droite car elle souhaite poursuivre la mise en oeuvre du Pacte vert européen, ensemble de nouvelles normes écologiques, très clivant sur la scène politique européenne. Ses positions anti-nucléaires par le passé pourraient attirer la vigilance des eurodéputés français, attachés à cette énergie.

Au terme de ces auditions de confirmation, l’ensemble de ce collège de commissaires devra récolter la majorité des suffrages exprimés du Parlement européen, fin novembre, en séance plénière à Strasbourg. Si tout se passe bien, l’équipe d’Ursula von der Leyen pourra se mettre au travail en décembre.

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