Borys Filatov, maire de la ville de Dnipro, était l’un des élus ukrainiens invités ce mardi à prendre la parole au Congrès des maires organisé par l’AMF. Mille jours après l’invasion russe de l’Ukraine, il témoigne sur Public Sénat d’un conflit toujours aussi difficile à supporter pour la population de son pays.
Le Parlement britannique adopte une loi immigration très ferme, l’ONU dénonce une violation du droit international
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En effet, après des semaines de blocage législatif, le Parlement britannique a adopté dans la nuit de lundi à mardi, une loi controversée, qui prévoit d’interdire aux individus arrivés au Royaume-Uni de manière illégale de demander l’asile dans le pays. Le texte doit encore être promulgué par le roi Charles III, une formalité.
Ce texte marque une étape clé dans le déploiement de la politique migratoire du conservateur Rishi Sunak, qui a fait de la réduction de l’immigration son cheval de bataille, jugeant le système d’asile de Londres « dépassé ». Cette loi vise notamment à endiguer la traversée de la Manche par les migrants, une des cinq priorités de l’année 2023 du Premier ministre Rishi Sunak, qui avait ainsi promis d’ « arrêter les bateaux », en se référant aux embarcations par lesquelles les migrants arrivent sur le territoire.
En effet, trois ans après le Brexit, le pays enregistre une immigration record, et ce malgré les promesses des Brexiters de « reprendre le contrôle » sur l’immigration. Le pays a compté 45 000 arrivées par la Manche en 2022, nombre qui a « plus que quadruplé ces deux dernières années », comme l’a souligné Rishi Sunak.
Le Premier ministre Rishi Sunak avait ainsi promis aux demandeurs d’asile, lors de la présentation de son projet de loi en mars dernier : « vous serez renvoyés en quelques semaines, soit dans votre propre pays s’il est sûr, soit dans un pays tiers sûr comme le Rwanda. »
La communauté internationale inquiète
L’ONU a vivement condamné la loi, qu’elle estime « en contradiction » avec les obligations du Royaume-Uni au regard du droit international sur les droits humains et les réfugiés. Volker Türk, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a souligné que « ce projet de loi crée un précédent inquiétant ». Il craint que « d’autres pays, y compris en Europe » soient tentés de suivre ce modèle.
Le Haut-Commissariat aux réfugiés (UNHCR) avait déjà dénoncé cette loi en mars dernier, l’accusant de « mettre fin au droit d’asile » au Royaume-Uni. En effet, les demandes d’asile pouvant s’effectuer uniquement depuis le sol britannique, cette loi rend l’asile impossible pour les non Européens ne disposant pas de visa pour se rendre sur le territoire.
Si la ministre de l’intérieur britannique, Suella Braverman, avait admis lors de sa présentation du texte au Parlement qu’il y avait « plus de 50 % de chances » que le texte soit incompatible avec la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), dont le Royaume-Uni est signataire, Rishi Sunak avait quant à lui fait preuve de plus d’assurance : « Nous pensons que le texte est légal, et s’il est disputé devant les tribunaux, nous le défendrons fermement ».
Ce texte, s’il risque d’être attaqué devant la Cour européenne des droits de l’Homme, devra aussi sans doute faire face à de nombreux recours devant les cours britanniques une fois adopté.
Un texte difficile à appliquer
Quand bien même la loi serait déclarée conforme au droit, sa mise en œuvre semble difficilement réalisable. Depuis le Brexit, Londres ne peut plus bénéficier du « règlement Dublin », qui oblige un individu à déposer sa demande d’asile dans son pays d’arrivée sur le territoire de l’UE, qui permettait au pays de déporter une partie des demandeurs d’asile vers d’autres pays européens. Le Royaume-Uni ne dispose pas non plus d’accords de retour vers les pays d’origine de ces migrants, à part avec l’Albanie.
En ce qui concerne le placement en rétention de toute personne arrivée illégalement sur le territoire que le texte prévoit, le pays est pour le moment loin de disposer de capacités d’accueil suffisantes dans les centres de rétention.
Enfin l’accord passé l’an dernier avec le Rwanda pour y envoyer les migrants en situation illégale ne semble pas prêt d’être déployé. Le premier vol prévu, en juin 2022, avait été annulé suite à une décision de la CEDH, et l’accord bilatéral a été jugé illégal en juin dernier par la justice Britannique.
Quelles ressemblances avec les propositions de loi LR sur l’immigration ?
Si la proposition de loi ordinaire LR « pour reprendre le contrôle de la politique d’immigration, d’intégration et d’asile » déposée le 1er juin dernier, reprend la phrase d’accroche clé « reprendre le contrôle » des brexiters, elle prévoit une approche moins rigoriste que le texte britannique. Ainsi, si elle prévoit également qu’un étranger entré illégalement sur le territoire français ne puisse pas être régularisé, cette mesure ne concerne pas les demandeurs d’asiles. Le texte prévoit également d’augmenter le nombre de demandeurs d’asile placés en rétention provisoire, mais sans généraliser la mesure. Ainsi, les LR souhaitent y placer tous les demandeurs issus des « pays d’origine sûre » (l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la République de Macédoine du Nord, le Kosovo, le Monténégro, la Serbie et l’Inde), contre presque exclusivement les individus ayant un casier judiciaire ou suivis par les services de renseignement actuellement. Mais comme au Royaume-Uni, cette mesure semble difficilement applicable, du fait du manque de place dans les centres de rétention administrative (CRA).
Une autre proposition de loi « visant à lutter contre les dérives du droit d’asile », déposée début mai, par la députée LR Christelle D’Intorni se rapproche plus du texte britannique. Celle-ci prévoit ainsi, comme le texte britannique qu’« aucune demande ne pourra être instruite si le demandeur est entré de façon irrégulière sur le territoire national. ». Le demandeur d’asile devrait donc présenter sa demande « dans son pays d’origine ou, du moins, en dehors du territoire national ».
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