Borys Filatov, maire de la ville de Dnipro, était l’un des élus ukrainiens invités ce mardi à prendre la parole au Congrès des maires organisé par l’AMF. Mille jours après l’invasion russe de l’Ukraine, il témoigne sur Public Sénat d’un conflit toujours aussi difficile à supporter pour la population de son pays.
Guerre en Ukraine : « Aucun des deux camps n’a suffisamment l’ascendant pour prendre le pas sur l’adversaire »
Par Romain David
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Kiev souffle le chaud et le froid sur la contre-offensive ukrainienne contre la Russie, une opération annoncée depuis des mois alors que le front s’est stabilisé, avec des combats essentiellement localisé autour de la ville de Bakhmout, dans l’est de l’Ukraine. « Nous devons attendre. Nous avons encore besoin d’un peu de temps supplémentaire », a déclaré le président Volodymyr Zelensky dans un entretien accordé à la BBC jeudi. Une manière aussi de maintenir l’adversaire sous-pression.
« Plus vous pouvez semer l’incertitude chez l’adversaire, et au contraire plus vous donnez de la confiance dans votre camp, meilleur c’est », a commenté le général Benoît Puga, ancien chef d’état-major particulier de la présidence sous Nicolas Sarkozy et François Hollande, qui était invité ce vendredi 12 mai de « Bonjour chez vous », la matinale de Public Sénat. Après plus d’un an de conflit, « vous avez une fatigue, une usure manifeste », note ce militaire. « Les autorités ukrainiennes doivent trouver les voies et moyens pour permettre à la population de se ressourcer, de se préparer, c’est-à-dire de maintenir le niveau opérationnel, continuer à affuter les gens. »
« Face à une agression, il est important de pouvoir résister, c’est d’abord une question de volonté, de cohésion humaine », poursuit le général Benoît Puga. « Le partage des valeurs et d’un sentiment d’unité au sein de la population est particulièrement important, à la limite plus important que le matériel et l’équipement. À cet égard, la population ukrainienne en fait une très belle démonstration », salue-t-il.
La déroute russe
Le général Benoît Puga estime toutefois que cette guerre risque de s’inscrire dans la durée, comparant la situation ukrainienne à l’enlisement du conflit pendant la Première Guerre mondiale. « Vous avez un équilibre qui s’est installé, comme souvent sur les théâtres de guerre, et cet équilibre est très meurtrier », constate-t-il. « Aucun des deux camps n’a suffisamment l’ascendant pour prendre le pas sur l’adversaire et pouvoir progresser. Ce type de situation fait que vous pouvez avoir des succès ponctuels, mais insuffisants pour entrainer une mécanique qui conduise à la paix. »
D’autant que les incertitudes demeurent concernant le poids et les capacités véritables de l’armée russe, qui semble être allée de revers en revers depuis le lancement de son « opération militaire spéciale » en Ukraine, selon le vocable utilisé par le Kremlin. « En tant qu’ancien directeur du renseignement militaire, je n’ai pas été surpris par la faiblesse militaire de l’armée russe même s’il ne faut pas se tromper, elle possède de réelles capacités », relève notre invité. « En revanche, j’ai été surpris de voir, à partir du moment où ils ont attaqué l’Ukraine, qu’ils n’aient pas été mieux organisés. »
« La Russie a toujours la possibilité de relancer des offensives, ce qui ne veut pas dire qu’elle est en mesure de réussir. Leur échec a démontré qu’il ne suffit pas de le vouloir, encore faut-il avoir la capacité et l’organisation qui le permette », ajoute notre invité.
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