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Gaza : offensive imminente ou changement de stratégie de la part d’Israël ?

Il y a une semaine, l’armée israélienne lançait un ultimatum à la population de la bande de Gaza : 24 heures pour évacuer vers le sud de l’enclave, avant une offensive terrestre de Tsahal. Ce 20 octobre, l’armée annonce une nouvelle fois que l’offensive est imminente, mais qu’en est-il réellement ?
Rose-Amélie Bécel

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Depuis une semaine, l’armée israélienne fait planer sur la bande de Gaza la menace d’une offensive terrestre. Après la visite du président américain Joe Biden en Israël mercredi 18 octobre, la perspective d’une entrée de Tsahal dans la bande de Gaza semble se rapprocher. Pour Raphaël Jerusalmy, ancien officier supérieur des renseignements militaires israéliens, elle est même « imminente ».

Mais pourquoi Israël retarde son offensive, initialement annoncée 24 heures après les ordres d’évacuer Gaza ? « Parce que cette fois ci, il ne s’agit pas de simples représailles, mais d’une opération d’annihilation du Hamas. Tsahal met donc en place une stratégie militaire complètement différente, pour prendre le Hamas de court », explique Raphaël Jerusalmy.

Une stratégie qui prend du temps, selon l’ancien officier des services de renseignement : collecte d’informations stratégiques « grâce aux interrogatoires de terroristes capturés », intenses bombardements préalables pour « détruire un maximum d’infrastructures et d’obstacles préparés par le Hamas », formation des troupes… « Enfin, plus nous attendons, plus nous avons de chances qu’un maximum de civils innocents, qui n’ont pas d’assistance et sont utilisés comme boucliers humains, évacuent », ajoute-t-il.

« Cette offensive militaire est une impasse sanglante »

Mais pour d’autres analystes du conflit en cours, le retard de l’offensive illustre les hésitations de l’Etat hébreu. « C’est la troisième fois que le gouvernement de Netanyahou fait monter la pression au sujet d’une offensive, on peut légitimement se demander si l’armée va véritablement intervenir, ou si elle tente une stratégie de la dissuasion », analyse l’ancien officier Guillaume Ancel. Pour cet expert des questions de défense, « cette offensive militaire est une impasse sanglante » pour Tsahal, le retard de l’offensive s’expliquerait alors par la recherche d’alternatives.

D’un côté, la question des 199 otages – selon le décompte officiel des autorités israéliennes – complique grandement la stratégie militaire du pays, qui doit composer avec des familles réunies en comité de soutien pour faire pression en faveur de la libération de leurs proches. « Nous avons obtenu des informations, via des terroristes capturés, qui nous donnent des pistes pour libérer des otages via des opérations commandos. Pour les autres, nous estimons qu’ils servent d’assurance vie, de monnaie d’échange, à des dignitaires du Hamas retranchés dans des tunnels », indique Raphaël Jerusalmy.

« Le Hamas ne peut pas être détruit militairement »

D’un autre côté, pour Guillaume Ancel, la visite de Joe Biden à Benjamin Netanyahou mercredi 18 octobre pourrait avoir influencé un changement de stratégie militaire : « Joe Biden l’a clairement dit lors de sa visite, une offensive dans Gaza serait extrêmement difficile. Un combat urbain, ce sont de nombreuses pertes, des difficultés à avancer… »

Intervenir serait alors prendre le risque de s’enliser. Ce serait même contre-productif selon l’ancien officier. « En termes militaires, le Hamas est ce que l’on appelle une cible molle. Ce n’est pas comme attaquer des positions géographiquement définies. Le Hamas ne peut pas être détruit militairement, c’est une ineptie, ses dirigeants ne sont pas à Gaza », affirme-t-il.

Pour Guillaume Ancel, l’entrée de troupes au sol dans l’enclave pourrait alors directement faire le jeu du groupe terroriste : « Le Hamas joue sur la confusion qu’il entretient avec la population de Gaza. En face, le gouvernement israélien s’est fait piéger par cette confusion en frappant les Palestiniens à Gaza. La question désormais, c’est de savoir si Israël va continuer de frapper exactement là où le Hamas veut qu’il frappe. »

La crainte d’une escalade dans la région

Enfin, l’offensive militaire dans la bande de Gaza pourrait précipiter l’escalade du conflit dans tout le Moyen-Orient. Les tensions avec le Hezbollah, milice chiite du sud du Liban, considérée comme le bras armé de l’Iran dans sa lutte contre Israël, font déjà craindre l’ouverture d’un second front. Une crainte palpable, en témoigne l’impressionnant arsenal militaire déployé par les Etats-Unis en Méditerranée depuis le début du conflit, avec deux porte-avions et plus de 2 000 soldats. « Les Etats-Unis ne veulent pas d’un chaos au Proche-Orient, symbolisé par l’entrée de l’Iran – et in fine de la Russie – dans le conflit », analyse Raphaël Jerusalmy.

Car au final, Guillaume Ancel en est convaincu, l’unique vainqueur d’une éventuelle escalade provoquée par l’offensive israélienne dans la bande de Gaza serait la Russie. « Les Palestiniens de Gaza, tout comme les Israéliens, seront les premières victimes d’une flambée des violences. Cette escalade profite à Vladimir Poutine, qui dit vouloir recomposer l’ordre mondial en décrédibilisant les Etats-Unis et en affirmant son rôle sur la scène internationale », estime-t-il.

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