Borys Filatov, maire de la ville de Dnipro, était l’un des élus ukrainiens invités ce mardi à prendre la parole au Congrès des maires organisé par l’AMF. Mille jours après l’invasion russe de l’Ukraine, il témoigne sur Public Sénat d’un conflit toujours aussi difficile à supporter pour la population de son pays.
D’où vient le Hamas, le mouvement islamiste à l’origine des attaques contre Israël ?
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Pluie de roquettes, combattants infiltrés, prises d’otages… L’opération « déluge d’Al-Aqsa », du 7 octobre 2023 depuis l’enclave palestinienne de Gaza à l’encontre de la population israélienne, s’annonce déjà comme l’une des attaques les plus meurtrières du conflit contre Israël.
Cette opération a été commanditée par le Hamas, que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou dit vouloir « détruire » en employant l’armée israélienne dans « toute sa puissance ».
Quelle est l’origine du Hamas ?
Le Hamas est né en 1987 au début de la première Intifada, une période de soulèvement du peuple palestinien contre l’occupation israélienne en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. « À ce moment, une partie des Frères musulmans d’Égypte a compris qu’il était important pour leur mouvement de ne pas rater ce tournant historique d’une révolte des Palestiniens contre Israël », explique Laetitia Bucaille, professeure de sociologie et chercheuse à l’Institut national des langues et civilisations orientales.
Ce sont les accords d’Oslo, signés en 1993 entre le Premier ministre israélien et le président de l’Organisation de libération de la Palestine Yasser Arafat, qui mettent fin à cette première intifada. Ils posent les premiers jalons de la résolution du conflit israélo-palestinien et aboutissent à la création de l’Autorité palestinienne, organe de gouvernement des territoires palestiniens. Mais, pour le Hamas, ces négociations sont une ligne rouge à ne pas franchir. « Le Hamas se présente comme le dernier bastion de la résistance armée palestinienne, face à ceux qui acceptent de s’asseoir à la table des négociations. Aujourd’hui, il s’appuie toujours sur l’échec des accords d’Oslo à résoudre le conflit pour critiquer l’Autorité palestinienne », complète la politiste Sarah Daoud.
L’ancrage du Hamas dans la population palestinienne se renforce alors, jusqu’à devenir une organisation incontournable : en 2006, il remporte les élections législatives et devient la première force politique au sein de l’Autorité palestinienne. Cette victoire entraîne une rupture avec un autre mouvement politique palestinien, arrivé deuxième des élections, le Fatah. Depuis, le Hamas assure le contrôle de la bande de Gaza, tandis que le Fatah est présent en Cisjordanie.
Quels sont ses objectifs ?
Depuis sa création, les combats du Hamas sont politiques et militaires, avec une primauté à la lutte armée par des attentats suicide, des prises d’otages ou encore des tirs de roquettes. L’organisation prône la destruction de l’État d’Israël et l’instauration d’un État islamique palestinien. « Contrairement au Fatah, où il y a beaucoup de divergences entre les différents leaders, le Hamas a toujours fait front de façon unie et c’est ce qui fait sa force », précise Sarah Daoud.
L’organisation se divise en deux branches, l’une politique et l’autre militaire. C’est la branche militaire, les brigades Izz al-Din al-Qassam avec le commandant Mohammed Deif à leur tête, qui est à l’origine des attaques qui ciblent aujourd’hui la population israélienne. De leur côté, les personnalités politiques du Hamas – dont leur chef de file Ismaël Haniyeh – sont toutes exilées, au Qatar ou en Turquie. « Ce sont eux qui, le moment venu, négocieront un cessez-le-feu avec Israël. Les personnalités de la branche armée ne se montrent évidemment pas dans cet exercice », ajoute Sarah Daoud.
Quels sont ses alliés ?
L’attaque sans précédent débutée le 7 octobre témoigne du fait que, bien que reconnue comme organisation terroriste par l’écrasante majorité des États du monde, le Hamas dispose toujours d’alliés. Selon David Rigoulet-Roze, spécialiste du Moyen-Orient et chercheur associé à l’Iris, les moyens dont disposent l’organisation ont d’ailleurs été sous-estimés : « Cette attaque n’est pas un simple coup, le Hamas connaît une montée en gamme capacitaire et organisationnelle. Il sait qu’en face la réponse ne sera pas limitée, qu’il risque l’existence même de sa structure. Mais il pense qu’il a des garanties auprès de ses alliés. »
Parmi ces alliés, on trouve d’abord l’Iran, qui apporte au Hamas « un soutien symbolique et financier » selon Sarah Daoud. De son côté, la milice chiite libanaise du Hezbollah, plus proche géographiquement puisque le pays partage une frontière avec Israël au nord, « a la capacité de faire pression par les armes », ajoute la politiste. Entre les deux pays, la tension monte d’ailleurs d’un cran ce 9 octobre : après des tirs revendiqués par le Hezbollah sur Israël, Tsahal (l’armée israélienne) a riposté par des bombardements.
Le cas du Qatar, enfin, reste plus ambigu selon Sarah Daoud : « Le pays est dans une position délicate, c’est le bailleur de fonds du Hamas depuis de nombreuses années. Il héberge les politiques en exil et fournit de l’aide, mais seulement humanitaire, en accord d’ailleurs avec Israël, et non militaire ». D’autres pays arabes ont aujourd’hui à l’inverse conclu des accords avec Israël. C’est le cas, depuis les accords d’Abraham en 2020, des Émirats arabes unis, du Maroc, du Bahreïn et du Soudan.
Quel avenir pour le Hamas ?
Alors que le bilan des attaques du Hamas ne cesse de s’alourdir, le Premier ministre Benjamin Netanyahou a annoncé vouloir « détruire » le Hamas. La riposte est déjà en cours : le ministre de la Défense israélien a annoncé la mise en place d’un siège complet de la bande de Gaza, « pas d’électricité, pas d’eau, pas de gaz, tout est fermé ». « Israël a déjà éliminé physiquement plusieurs leaders du Hamas et voudra sûrement aller plus loin. Mais les prises d’otages faites par le Hamas compliquent grandement la situation », note Laetitia Bucaille. On estime à l’heure actuelle qu’une centaine d’Israéliens sont retenus en otage par le Hamas, pour servir de monnaie d’échange et limiter les ripostes de Tsahal.
De son côté, Sarah Daoud ne doute pas que la riposte de l’armée israélienne sera d’une ampleur inégalée. L’État hébreu n’aurait pourtant pas intérêt à reprendre le contrôle sur la bande de Gaza : « En se retirant du territoire en 2005, Israël a créé une enclave palestinienne très densément peuplée, je ne pense pas que le pays ait intérêt à devenir responsable de la population de Gaza ». Benjamin Netanyahou l’a annoncé, c’est une guerre « longue et difficile » qui attend désormais le territoire.