Rockets are launched from the southern Gaza Strip towards Israel

Attaque du Hamas : un coup d’arrêt à la normalisation des relations entre Israël et le monde arabe ?

La vague d’attaques du groupe islamiste devrait avoir une première conséquence géopolitique en freinant le rapprochement que Riyad et Tel Aviv ont tenté d’opérer ces derniers mois.
Guillaume Jacquot

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La violence de l’offensive sanglante lancée par le Hamas contre Israël le 7 octobre aura des conséquences dans la région. La vague inédite d’attaques et d’attentats perpétrés depuis la bande de Gaza ces derniers jours n’intervient pas seulement dans un contexte symbolique, celui du 50e anniversaire de la guerre du Kippour. L’opération « déluge d’Al-Aqsa » menée par les terroristes du Hamas s’est produite aussi dans un contexte géopolitique particulier pour l’État hébreu.

Depuis plusieurs années, Tel-Aviv s’est en effet engagée dans un processus de normalisation de ses relations avec plusieurs pays arabes. Poussé par les Américains, Israël a signé en 2020 deux traités de paix avec deux États du Golfe : les Émirats arabes unis et Bahreïn. Le Soudan et le Maroc ont ensuite rejoints ces derniers. Un évènement puisque jusqu’ici, Israël s’était rapproché seulement de l’Égypte et de la Jordanie. Ce mouvement d’entente, entériné par les accords d’Abraham, a profondément modifié les équilibres diplomatiques dans cette région du monde. L’un des rares succès diplomatiques de Donald Trump durant sa présidence. Le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou évoquait, quant à lui, « l’aube d’une nouvelle ère ».

Des pourparlers entre Tel-Aviv et Riyad depuis plusieurs mois, sous l’égide des Etats-Unis

Un autre rapprochement était en gestation, d’une autre dimension cette fois : avec l’Arabie Saoudite. Là aussi, la diplomatie américaine était à la manœuvre pour essayer de rapprocher deux capitales, difficilement conciliables en raison de la situation palestinienne. En 2020 encore, l’Arabie Saoudite excluait de nouer des relations avec l’État hébreu, avant la conclusion d’un accord de paix au Proche-Orient.

Ces dernières semaines, à en croire les deux parties, les pourparlers étaient en bonne voie. « Chaque jour, nous nous rapprochons d’un accord », assurait à la chaîne américaine Fox News, le prince saoudien Mohammed ben Salman, dans une interview diffusée le 20 septembre. Et d’ajouter : « Pour nous, la question palestinienne est très importante. Nous devons résoudre cette partie. » Le 22 septembre, à la tribune des Nations-Unies, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou estimait qu’avec Riyad ils étaient « proches » d’une « paix historique ». Ajoutant : « Une telle paix ferait beaucoup pour mettre un terme au conflit israélo-arabe, elle encouragerait d’autres pays arabes à normaliser leurs relations avec Israël, elle augmenterait les possibilités d’une paix avec les Palestiniens. »

« La guerre torpille pour plusieurs mois au moins les efforts de normalisation entre Israël et l’Arabie saoudite »

L’onde de choc de ces deux derniers jours rebat les cartes pour un temps. « Il est certain que la guerre torpille pour plusieurs mois au moins les efforts de normalisation entre Israël et l’Arabie saoudite », analyse Héloïse Fayet, chercheuse à l’Ifri (Institut français des relations internationales).

Du côté de la diplomatie américaine, le secrétaire d’Etat Anthony Blinken a estimé dimanche que ce projet était l’une des raisons du passage à l’attaque du Hamas. « Qui s’oppose à la normalisation ? Le Hamas, le Hezbollah, l’Iran. Il ne serait donc pas surprenant qu’une partie de leur motivation ait été de perturber les efforts visant à rapprocher l’Arabie saoudite et Israël. »

Héloïse Fayet, spécialiste de la géopolitique du Moyen Orient ajoute que les récents évènements peuvent également « remettre potentiellement en cause des relations avec des pays arabes qui étaient un peu fragiles ».

Samedi, au premier jour de l’offensive du mouvement islamiste palestinien, les Émirats arabes unis ont adopté un ton neutre, en dénonçant l’escalade de la violence des deux côtés. Dimanche, le ministère des affaires étrangères émirati a finalement adopté sa communication, en affirmant : « Les attaques du Hamas contre les villes et villages israéliens proches de la bande de Gaza, y compris les tirs de milliers de roquettes sur des centres de population, constituent une escalade sérieuse et grave. »

Le nombre de médiateurs potentiels s’est réduit dans le monde arabe

Sébastien Boussois, chercheur en relations euro-arabes associé au CECID (Centre d’Études de la Coopération Internationale et du Développement) à l’Université Libre de Bruxelles, fait lui aussi valoir que ce processus de normalisation des relations arabo-israéliennes « va être gelé un temps », Riyad ayant surtout voulu se rapprocher des Israéliens avant tout sur le plan économique, selon lui.

L’enseignant en relations internationales note qu’il sera difficile pour les différents États arabes qui ont normalisé leurs relations avec Israël de peser sur la résolution du conflit. « C’est probablement l’Égypte qui jouera ce rôle de médiateur, du fait de sa proximité. »

Ce lundi octobre, la Ligue arabe a annoncé que les chefs de la diplomatie se réuniront mercredi. Lors de cette réunion extraordinaire présidée par le Maroc, les chefs de diplomatie discuteront « des moyens d’action politique au niveau arabe et international pour faire cesser l’agression israélienne sur la bande de Gaza », a précisé le numéro deux de l’organisation Hossam Zaki.

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