Après la chute de Bachar al-Assad et l’arrivée au pouvoir de rebelles en Syrie, plusieurs pays européens dont l’Allemagne, l’Autriche et l’Italie, ont annoncé un gel des procédures de demandes d’asile. Plusieurs partis politiques ont également ouvert la voie au retour des réfugiés syriens dans le pays. Un débat qui soulève des questions politiques et juridiques.
Alexeï Navalny « démontait tous les ressorts sur lequel reposait le pouvoir de Poutine »
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L’opposant numéro un de Vladimir Poutine est décédé ce 16 février en prison. L’annonce a été faite par les services pénitentiaires russes à la mi-journée, par un communiqué laconique. En détention depuis janvier 2021, l’avocat et militant Alexeï Navalny, opposant de premier plan au Kremlin, purgeait une peine de 19 ans pour « extrémisme » dans une colonie pénitentiaire au Nord du cercle polaire arctique, dans des conditions éprouvantes. Figure de manifestations d’opposition, candidat arrivé en deuxième position aux municipales de Moscou en 2019, Navalny avait été empoisonné en 2020, en Sibérie. Une grève de la faim et des isolements à répétition l’avaient affaibli.
Selon ses partisans, la multiplication des procès, et notamment le dernier particulièrement expéditif, visait à l’écarter pour toujours de la scène politique russe. De nombreuses chancelleries et gouvernements en Occident ont rapidement mis en cause la responsabilité du Kremlin dans sa mort. Emmanuel Macron accuse notamment la Russie de « condamner à mort » les « esprits libres ».
« C’est le résultat de l’acharnement de Vladimir Poutine contre lui. Ses conditions carcérales étaient anormalement difficiles, elles étaient de plus en plus dures, c’était très choquant. C’est un signal clair que l’opposition ne peut pas s’exprimer », commente Sylvie Bermann, ancienne ambassadrice de France en Russie (2017-2019). L’ancienne diplomate garde le souvenir de quelqu’un « d’extrêmement courageux ». « Après sa tentative d’assassinat, et ses soins à l’étranger, il a décidé de rentrer dans son pays. »
« On voit que toute opposition est vouée à être écartée, éliminée, d’une façon terrible », abonde Carole Grimaud, spécialiste de la Russie et fondatrice du laboratoire Center for Russia and Eastern Europe Research.
« C’était totalement inacceptable pour ce régime, car il y avait une mise en cause des fondements mêmes »
C’est au début des années 2010 qu’Alexeï Navalny se fait connaître, en participant à de grandes manifestations contre le pouvoir avant que la répression ne s’accentue. Le militant se fait notamment connaître à travers des vidéos en ligne dénonçant la corruption du système Poutine. En 2022, il avait dénoncé l’offensive russe en Ukraine, qualifiée pendant son dernier procès de « guerre la plus stupide et la plus insensée du XXIe siècle ».
« C’était un opposant moins lié aux partis que ne l’est l’opposition libérale de Russie, qui n’a plus voix au chapitre. Il a attaqué Poutine sur la façon dont le régime s’est accaparé les ressources économiques, mais aussi sur la guerre en Ukraine. Il démontait tous les ressorts sur lequel reposait le pouvoir de Poutine. C’était totalement inacceptable pour ce régime, car il y avait une mise en cause des fondements mêmes », analyse Laure Delcour, enseignante-chercheuse à l’université Sorbonne-Nouvelle. « L’angle d’attaque qu’il a choisi était périlleux. S’il n’avait pas eu toutes ces séries d’emprisonnements, il aurait pu certainement rassembler une grande partie de la population derrière lui », estime la politologue Carole Grimaud.
Une influence probablement limitée en Russie
Son discours a pu toucher la jeunesse russe très connectée. En revanche, son influence était relativement limitée au niveau national et dans le reste des générations. « L’appellation qu’on lui donne souvent, d’opposant numéro 1 à Vladimir Poutine, laisse entendre une notoriété mais qu’il n’avait probablement pas en Russie. Il n’a pas que très peu de visibilité en Russie car les médias sont complètement bâillonnés », rappelle Laure Delcour. « Il avait un certain charisme auprès des jeunes. Le reste de la population ne le connaissait pas ou était indifférent », se souvient Sylvie Bermann, ancienne ambassadrice.
À l’heure actuelle, il n’existe « aucune alternative », car beaucoup d’opposants politiques sont aujourd’hui derrière les barreaux, rappelle cette spécialiste des relations russo-européennes. « Lui-même n’était pas une alternative crédible à Vladimir Poutine parce que le système est conçu de telle façon que c’est impossible. »
« Ce décès verrouille un peu plus la situation sur le plan de la politique interne »
Carole Grimaud souligne que l’opposition est principalement active à l’étranger. « Il existe une opposition de Russes en exil, active, et qui prépare l’après-Poutine, depuis les pays européens ou les Etats-Unis. Elle ne peut pas exister en Russie, c’est impossible, on le voit aujourd’hui. Elle existe, mais dans les cuisines. En dehors de ça, cela devient de plus en plus compliqué. Aujourd’hui c’est une page qui se tourne. »
Le décès survient alors que la Russie de Vladimir Poutine met en difficulté les troupes ukrainiennes au niveau d’Avdiivka, et à un mois de la présidentielle russe. « Sa mort intervient à un moment où la Russie redouble d’efforts dans la guerre. Ce décès verrouille un peu plus la situation, que ce soit sur le plan de la politique interne mais aussi en lien avec la guerre », estime Laure Delcour.
Vue des pays européens, la disparition de la figure de l’opposition russe est concomitante avec la visite de Volodymyr Zelensky à Berlin et Paris. Le président ukrainien, venu signer des accords bilatéraux de sécurité, intensifie sa tournée diplomatique, au moment où la situation se détériore sur le front et où l’incertitude domine sur les engagements européens à long terme. L’annonce de la mort de Navalny pourrait « renforcer l’unité » des pays européens, décrypte Carole Grimaud.