Borys Filatov, maire de la ville de Dnipro, était l’un des élus ukrainiens invités ce mardi à prendre la parole au Congrès des maires organisé par l’AMF. Mille jours après l’invasion russe de l’Ukraine, il témoigne sur Public Sénat d’un conflit toujours aussi difficile à supporter pour la population de son pays.
Accord de sécurité avec l’Ukraine : « Cela va permettre de concrétiser et d’inscrire dans la durée le soutien français »
Par Henri Clavier
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« Notre soutien à l’Ukraine est durable, il faut continuer de fournir des moyens à l’Ukraine », affirmait Emmanuel Macron lors d’une conférence de presse à l’issue du sommet de l’Otan à Vilnius le 12 juillet. Presque deux ans après le début de la guerre, l’accord que les deux pays s’apprêtent à conclure, ce vendredi 16 février en marge de la visite de Volodymyr Zelensky à Paris, doit apporter des garanties durables de sécurité à l’Ukraine. Emmanuel Macron recevra le président ukrainien en fin d’après-midi et la signature de l’accord sera suivie d’une conférence de presse commune.
Un accord qui fait suite au sommet de l’Otan
« Cet accord fait suite aux engagements pris en format G7 en marge du sommet de l’Otan à Vilnius en juillet 2023 », précise l’Elysée. A défaut d’obtenir un calendrier précis prévoyant l’adhésion de l’Ukraine à l’Otan au sommet de Vilnius, Volodymyr Zelensky était parvenu à obtenir un certain nombre de garanties concernant la sécurité de l’Ukraine. « Les Etats-Unis et l’Allemagne sont réticents à s’engager de manière claire [en faveur de l’adhésion de l’Ukraine à l’Otan]. Ils préfèrent donner des garanties de soutien, notamment sur la livraison d’armes. Les livraisons d’armes et de munitions ne sont d’ailleurs pas le fait de l’OTAN, mais des membres individuellement », expliquait Bruno Tertrais, directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique, à Public Sénat, à l’approche du sommet de l’Otan. « L’accord épouse de manière assez serrée la déclaration faite à la suite du sommet de Vilnius et reprend trois objectifs : montrer notre détermination à continuer d’apporter notre soutien à l’Ukraine, continuer d’être à l’écoute des besoins de l’Ukraine et renforcer notre relation bilatérale et la perspective européenne de l’Ukraine », rapporte l’Elysée.
« L’accord pérennise les livraisons de matériel militaire de tout type ou encore la formation du personnel militaire ukrainien »
« Cet accord va permettre de concrétiser et d’inscrire dans la durée le soutien français au profit de l’Ukraine », juge le général Christophe Gomart, ancien directeur du renseignement militaire. Comme indiqué précédemment, la livraison d’armes et le soutien logistique apporté à l’Ukraine dépendent directement des Etats. En concluant un accord de défense et de sécurité avec la France, l’Ukraine encadre sa coopération militaire avec la France. Concrètement, cet accord représente une garantie pour les Ukrainiens que le soutien financier et militaire apporté à l’Ukraine ne sera pas remis en cause tant que l’invasion russe sera toujours en cours. « L’accord ne prévoit évidemment pas le déploiement de troupes françaises sur le sol ukrainien, en revanche cela pérennise les livraisons de matériel militaire de tout type ou encore la formation du personnel militaire ukrainien », détaille Christophe Gomart. Selon l’Elysée, le soutien français a permis de former plus de 10 000 soldats ukrainiens depuis le début du conflit. Par ailleurs, l’accord inclut également des volets économiques, financiers et techniques.
Côté ukrainien, une multiplication des accords bilatéraux de sécurité
Si Volodymyr Zelensky n’avait pas caché sa déception après le sommet de l’Otan à Vilnius le 12 juillet, le président ukrainien semble néanmoins obtenir un certain nombre de « gages de sécurité » auprès de ses partenaires occidentaux. Le 12 janvier, l’Ukraine a conclu, avec le Royaume-Uni, un accord du même type que celui que Volodymyr Zelensky s’apprête à signer à Paris. « Multiplier les accords de sécurité bilatéraux permet à l’Ukraine de préparer son adhésion à l’Union européenne ou l’Otan et confirmer sa participation à une nouvelle architecture sécuritaire européenne », souligne le général Christophe Gomart. En multipliant les accords de défense, l’Ukraine prépare son adhésion à l’Otan tout en assurant la pérennité du soutien militaire des pays occidentaux. Le président Ukrainien est également attendu à Berlin vendredi. A travers un accord déjà signé avec Londres, le Royaume-Uni assure à l’Ukraine un soutien militaire « aussi longtemps que cela sera nécessaire ». Kiev poursuit également des négociations similaires avec une vingtaine d’autres pays dont les Etats-Unis, l’Italie et la Pologne.
« Mettre en garde la Russie et prévenir une forme de désunion du camp occidental »
Alors que Vladimir Poutine avait toutes les raisons de se réjouir après les déclarations de Donald Trump sur l’Otan, la multiplication des accords de sécurité bilatéraux fragilise la stratégie russe. De là à penser que l’annonce de la signature d’un traité de sécurité avec l’Ukraine est une réaction aux propos du candidat à l’élection présidentielle de 2024, il n’y a qu’un pas. « Ce n’est pas une réaction aux propos de Donald Trump, la négociation de ce type d’accord nécessite un temps long et ce genre de voyage est prévu longtemps à l’avance », affirme Christophe Gomart. En revanche, la conclusion de ces accords bilatéraux permet « de mettre en garde la Russie et de prévenir une forme de désunion du camp occidental, tout en réaffirmant qu’en l’état actuel des choses, les négociations ne sont pas envisageables », analyse Christophe Gomart.
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