Lycee Massena 98 pour-cent de reussite au Baccalaureat

Législatives 2024 : un fonctionnaire a-t-il le droit de désobéir à un ordre gouvernemental ?

Plusieurs cadres de l’Education nationale ont lancé ce vendredi 21 juin, une pétition appelant à ne pas « obéir » à un gouvernement RN, si ce dernier prenait des mesures qui seraient « en opposition aux valeurs républicaines ». Quelles sont les obligations des agents publics en la matière ?
Alexis Graillot

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

« Parce que nous servons l’Etat, nous déclarons dès aujourd’hui qu’aucun d’entre nous n’appliquera de mesures qui contreviendraient aux valeurs de la République. Nous ne serons pas les exécuteurs d’une politique contraire aux principes qui fondent notre attachement au service public d’éducation », lancent des inspecteurs, proviseurs ou principaux, dans une pétition déjà signée par plus de 2000 personnes.

Cette désobéissance affichée en cas de victoire du parti d’extrême-droite aux élections législatives contreviendrait-elle au cadre légal ? Eléments de réponse.

Le principe : obligation d’obéissance hiérarchique d’un agent public

Codifiées au sein du Code général de la fonction publique, les obligations des fonctionnaires en matière d’obéissance hiérarchique, sont clairement énoncées par le texte, qui en son article L121-10 énonce clairement : « L’agent public doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique ».

De ce principe, découlent plusieurs obligations énumérées sur le site gouvernemental sevice-public.fr. Ainsi, l’agent public est tenu de « respecter les lois et règlements de toute nature » et de « se soumettre au contrôle de son supérieur hiérarchique ».

En outre, en vertu de l’article L121-9 du même code, le fonctionnaire est « responsable de l’exécution des tâches qui lui sont confiées ». De manière négative, cela signifie que si l’agent public refuse d’exécuter certaines de ses responsabilités, il se soustrait à cette obligation.

Les exceptions : ces cas où un fonctionnaire peut désobéir

Ce principe n’est pourtant pas universel et absolu, certaines circonstances justifiant que l’agent public puisse désobéir. Tout d’abord, le fonctionnaire peut se soustraire à cette obligation si « l’ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public ». A noter la présence de la conjonction « et », qui implique que ces deux conditions doivent être réunies pour pouvoir justifier un manquement à cette obligation. Le site service-public.fr cite par exemple le cas où un agent public refuserait d’exécuter « un ordre visant à accorder ou refuser une prestation pour des motifs discriminatoires ».

Autre cas possible de désobéissance pour un agent public, si ce dernier a « un motif raisonnable de penser qu[e la situation de travail] présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ». Ce « droit de retrait » existe de manière analogue dans le Code du travail pour les salariés du secteur privé. Il revient cependant à l’agent de prouver que la situation d’espèce répondait à ces critères.

Sanctions disciplinaires possibles

En cas de non-respect de ce principe, l’agent fautif risque des « sanctions disciplinaires », qui peuvent varier selon la nature du manquement à cette obligation, du simple avertissement, en passant par le blâme, voire la rétrogradation à l’échelon inférieur ou même la révocation. Des sanctions financières sont également possibles, via une retenue sur salaire.

Enfin, à l’inverse des salariés du privé, les agents publics sont tenus à un « devoir de réserve », découlant du principe de « neutralité » du service public, qui oblige ce dernier à « faire preuve de retenue dans l’expression écrite ou orale de ses opinions personnelles ». Cette notion de « retenue » n’étant pas clairement définie dans la législation ou la jurisprudence et pouvant différer selon le poste et les responsabilités de l’agent public, il revient au juge administratif d’apprécier au cas par cas, le manquement ou non à ce devoir.

Dans la même thématique

Paris : Debate at the National Assembly during the parliamentary niche of the Rassemblement national (RN)
8min

Institutions

Après la censure du gouvernement Barnier, quelles solutions pour doter la France d’un budget avant la fin d’année ?

L’examen du budget 2025 a été suspendu sitôt le gouvernement de Michel Barnier censuré mercredi soir. À ce stade, trois pistes législatives se dégagent pour assurer la continuité de la vie de la nation, sans que les juristes ne semblent s’accorder sur les modalités d’application de certains mécanismes d’urgence, quasiment inédits.

Le

Législatives 2024 : un fonctionnaire a-t-il le droit de désobéir à un ordre gouvernemental ?
3min

Institutions

« Les droits de la défense sont en danger », alerte l’avocate Jacqueline Laffont

Elle est l’une des rares avocates pénalistes dont on connaît le nom car il accompagne souvent ceux de clients très médiatisés : Carlos Ghosn, Nicolas Sarkozy ou Patrick Poivre d'Arvor…Depuis 40 ans, elle défend des chefs d’entreprises, des hommes politiques de premier plan, des journalistes, mais aussi des anonymes. Un rôle qui n'est pas toujours compris, comme ses prises de positions, parfois à rebours de notre époque. Ils ont pourtant une seule finalité : protéger les droits de la défense. Au micro de Rebecca Fitoussi, Jacqueline Laffont se livre cette semaine dans « Un monde, un regard » sur Public Sénat.

Le

Paris: Weekly cabinet meeting at Elysee Palace
7min

Institutions

Motion de censure : la France peut-elle se doter d’un budget si le gouvernement de Michel Barnier est renversé ?

Ce 2 décembre, Michel Barnier pourrait décider d’utiliser le 49.3 pour faire adopter le projet de loi de financement de la Sécurité sociale sans vote à l’Assemblée nationale. Dans la foulée, les députés pourront déposer une motion de censure. Si gauche et extrême droite s’allient pour la voter, le gouvernement tomberait sans avoir pu faire adopter son projet de loi de finances. Dans cette situation, la France aura-t-elle un budget en 2025 ? Décryptage.

Le