En marge de l’ouverture du Congrès des maires de France, le gouvernement s’est engagé à porter devant l’Assemblée nationale en janvier une proposition de loi déjà adoptée par le Sénat, et qui vise à améliorer les conditions d’exercice du mandat d’élu local.
Décision du Conseil constitutionnel : le gouvernement peut souffler, il pourra avoir recours au 49.3 d’ici cet été
Par Simon Barbarit
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C’est une décision qui pourrait avoir son importance pour la suite de la session parlementaire et même la suite du quinquennat. Ce jeudi, le Conseil constitutionnel a donné tort aux députés RN qui estimaient que le gouvernement avait grillé ses cartouches en ayant eu recours à l’article 49.3 de la Constitution, le 15 novembre dernier, lors de l’adoption du projet de loi de programmation des finances publiques.
Pour mémoire, le 49.3 donne la possibilité au Premier ministre d’engager la responsabilité de son gouvernement sur tout projet de loi en débat à l’Assemblée nationale, c’est-à-dire de faire passer un texte sans le vote des députés. Après son activation, les débats sont suspendus et le projet de loi concerné aussitôt considéré comme adopté. A moins que les élus ne déposent une motion de censure dans les 24 heures. Si celle-ci est adoptée, le texte est rejeté et le gouvernement renversé.
A noter que depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, à l’exception des projets de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale, le 49. 3 ne peut plus être utilisé que sur un seul projet de loi ordinaire au cours de la même session parlementaire.
Or, le gouvernement avait eu recours à l’article 49 alinéa 3, pour le projet de loi de programmation des finances publiques en septembre dernier, lors de la session extraordinaire, puis le 15 novembre pour le même texte, mais cette fois-ci, lors de la session ordinaire.
« Une interprétation favorable à l’exécutif »
Dans sa décision, le Conseil constitutionnel juge que « le Premier ministre peut recourir à la procédure prévue par le troisième alinéa de l’article 49 de la Constitution pour des lectures successives d’un même projet ou proposition de loi au cours de sessions différentes ».
Pour Jean-Philippe Derosier, professeur de droit public à l’Université de Lille, « les deux interprétations pouvaient se défendre ». « La première était favorable au Parlement. La seconde, celle retenue, limite la portée de la révision constitutionnelle de 2008. Ce n’est pas surprenant car on a vu lors de la réforme des retraites que le Conseil constitutionnel a plutôt une interprétation de la Constitution favorable à l’exécutif ».
« Usage stratégique » du 49.3
Cette décision sur l’usage du 49.3 et son articulation entre la session ordinaire et extraordinaire pourrait avoir son importance, car comme le relève Benjamin Morel, maître de conférences en droit public à Paris II, « le Conseil prend en compte la date de délibération du 49 alinéa 3 en Conseil des ministres et non sa date de déclenchement devant l’Assemblée nationale. On pourrait alors imaginer un usage stratégique de cet article par l’exécutif. Par exemple, le gouvernement pourrait délibérer en Conseil des ministres du 49.3 sur des projets de loi pendant les sessions extraordinaires de l’été et les déclencher, pendant la session ordinaire, en janvier, février mars… ».
En tout cas, même si Élisabeth Borne s’est engagée à ne pas avoir recours au 49.3 pour le projet de loi immigration, rien ne l’en empêche désormais.
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