TotalEnergies : les contrôles de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique sur les conflits d’intérêts, sont « efficaces »
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Les travaux de la Commission d’enquête sénatoriale au sujet du groupe Totalenergies se poursuivent avec l’audition jeudi 29 février de Didier Migaud, président de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique. Censée contrôler « les moyens mobilisés et mobilisables » par l’Etat pour assurer, d’une part, le respect par Totalenergies de ses obligations climatiques, et d’autre part du respect par l’entreprise « des orientations de la politique étrangère de la France », la commission s’est penchée sur la question des conflits d’intérêts liés au géant français du pétrole. L’enjeu était notamment de comprendre l’ampleur des phénomènes de « pantouflage », ces allers-retours entre le public et le privé qui peuvent mener à des situations délicates en termes de déontologie et de probité. Didier Migaud, interrogé par les sénateurs, relève neuf projets de mobilité concernant des agents publics et TotalEnergies depuis 2020.
Dispositif « efficace »
Ce chiffre, qualifié de « faible » par le président de la HATPV, ne signifie pas cependant que seuls neufs projets en lien avec TotalEnergies ont existé depuis 2020 « dans toute la fonction publique », précise Didier Migaud, étant donné que la Haute autorité ne contrôle qu’un public déterminé (15 000 agents et responsables publics).
Sur les neuf dossiers, quatre concernaient des nominations dans le secteur public d’agents en provenance de chez TotalEnergies, et cinq concernaient un départ du secteur public vers TotalEnergies. « Tous ont fait l’objet d’un avis de compatibilité avec réserve. Il nous est arrivé, dans un des cas, de décider d’une réserve sectorielle sur tout le secteur de l’énergie », précise Didier Migaud. Interrogé sur la qualité du dispositif encadrant ces pantouflages pour se prémunir des conflits d’intérêts, Didier Migaud le juge « plutôt efficace ». « On est plutôt une référence au niveau européen, voire même dans le monde », affirme le haut fonctionnaire. Concrètement, la Haute autorité agit sur deux types de risque, pénal et déontologique. C’est sur le second qu’elle est le plus souvent amenée à intervenir, notamment lorsque cela concerne des projets de reconversion professionnelle. A partir du moment où une personne a exercé une activité privée dans les trois années qui précèdent une nomination dans la fonction publique, la Haute autorité est censée exprimer un avis de prénomination. Eventuellement « encadrer l’exercice de cette fonction ou imposer un déport, explique Didier Migaud. « Il est évident que quelqu’un qui vient de TotalEnergies devra se déporter de toute décision qui concerne TotalEnergies », illustre le président de la HATPV.
Un lobbying puissant
Si le nombre de « transferts » du public vers TotalEnergies et inversement est relativement faible ces dernières années, les efforts consacrés par l’entreprise dans le lobbying sont « dans la fourchette plutôt haute », assure Didier Migaud, et ce, sans compter les angles morts de la HATPV : « Tout cela doit être considéré en fonction des insuffisances du dispositif mis en place qui ne permet pas d’avoir une vue précise de toutes les dépenses engagées par un groupe comme TotalEnergies pour exercer des influences sur la décision publique », explique le haut fonctionnaire. « Qu’une grande entreprise puisse vouloir exercer une stratégie d’influence, ça paraît normal. Le problème c’est que cela se passe dans la transparence et que cela puisse être régulé », ajoute Didier Migaud. Au-delà des questions portant spécifiquement sur TotalEnergies, Didier Migaud est également revenu sur l’utilité de la « transparence » dans la vie publique, déplorant que les responsables politiques n’en parlent pas assez, ou souvent en mal. « Contrairement à cette petite musique que l’on entend, que la transparence serait un obstacle à l’attractivité de la fonction publique ou politique, je ne le crois pas du tout ». Et le haut fonctionnaire de relever que « les citoyens ignorent en très grande partie tout ce qui a pu être mis en place par les pouvoirs publics sur la transparence et le contrôle. Or on s’aperçoit que la défiance diminue à partir du moment où les citoyens sont informés des dispositifs mis en place ».
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