A dix jours de la dernière phase des négociations du traité international visant à mettre fin à la pollution plastique, le député MoDem Philippe Bolo a remis un rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) sur « l’impact des plastiques sur la santé ». Il propose plusieurs recommandations.
Prévention des risques climatiques : qu’est-ce que le « fonds Barnier », ce dispositif au financement contesté par les assureurs ?
Par Théodore Azouze
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Un épisode d’inondations qui a donné lieu à des images impressionnantes. La semaine dernière, plusieurs zones du sud de la France, notamment en Ardèche et dans le Rhône, ont été submergées par la montée des eaux. Vendredi, le Premier ministre Michel Barnier a d’ailleurs promis d’« actionner » le processus de catastrophe naturelle pour permettre aux sinistrés de toucher leur indemnisation. Pour mieux prévenir les risques des catastrophes naturelles telles que celles-ci, l’actuel locataire de Matignon, avait créé en 1995 – lorsqu’il était ministre de l’Environnement – un outil devenu majeur dans le domaine : le Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit « fonds Barnier ». Chaque année, il permet le financement de nombreux projets pour mieux anticiper les incidents climatiques. Au total, ce fonds a engagé « 2 milliards d’euros sur la dernière décennie », selon un rapport de 2023 de la Caisse centrale de réassurance (CCR).
Une manne financière importante, qui a permis de mettre en œuvre différents types d’aménagements pour lutter contre les catastrophes naturelles. Le « fonds Barnier » recouvre tout un ensemble de projets dans cet objectif. Entre 2009 et 2020, l’essentiel des investissements réalisés via ce dispositif et les cofinancements qui y sont associés concerne la prévention d’inondations, soit 57 % de la manne totale des engagements financiers liés au « fonds Barnier », loin devant les risques de séisme (16 %) et de subvention marine (15 %).
Construction d’ouvrages hydrauliques et rénovation antisismique
Concrètement, à quoi ressemblent les projets réalisés grâce à ce fonds ? La construction ou le renforcement de digues sur le littoral ont notamment été rendus possibles par cet outil. D’autres ouvrages hydrauliques, destinés à sécuriser davantage les bâtiments de communes à risque face à une potentielle montée des eaux lors de fortes précipitations, sont aussi sortis de terre via ce dispositif.
Autre aboutissement : l’amélioration de la résistance aux risques sismiques de nombreux bâtiments construits aux Antilles à travers le Plan Séismes Antilles. Par exemple, le FPRNM a ainsi pu donner des moyens pour rénover certaines constructions vulnérables aux tremblements de terre, comme des habitations à loyer modéré (HLM), des écoles ou des centres des Services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) en Guadeloupe et en Martinique.
Le « fonds Barnier » fournit aussi, pour les cas les plus extrêmes et lorsqu’il n’existe pas d’autres solutions, des finances pour délocaliser les biens exposés aux catastrophes naturelles. Cela passe même parfois par des expropriations. Comme le rappelle le rapport de la CCR, ce type d’opérations a entre autres eu lieu après le passage de la tempête Xynthia en Vendée en 2010 ou après les inondations dans l’Aude en 2018. Plus sporadiquement, les deniers du « fonds Barnier » peuvent aussi être utilisés dans le cadre de la mise en place de plans de prévention des risques ou pour mener des campagnes de sensibilisation auprès de la population.
Un changement du système de financement en question
Face aux importantes inondations qui ont touché le pays ces dernières semaines, l’ampleur du budget à accorder au « fonds Barnier » reste une question sensible. Selon le projet de loi de finances présenté par le gouvernement et actuellement débattu à l’Assemblée nationale, cette enveloppe promise à la prévention des risques devrait être dotée de 225 millions d’euros en 2025, soit le même montant qu’en 2024. Ce week-end sur RTL, la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, a évoqué une enveloppe totale un peu plus élevée pour le « fonds Barnier », à hauteur de 250 millions d’euros. Ce budget « ne repose pas que sur de l’argent public mais également sur un travail avec les assureurs », a-t-elle précisé.
La stabilité de ces moyens, malgré l’augmentation des catastrophes naturelles ces dernières années, a fortement agacé la présidente de France Assureurs, Florence Lustman, invitée dimanche sur France info. « Arrêtons le hold-up sur le « fonds Barnier » ! », a-t-elle lancé. La responsable vise directement le changement du système de financement du dispositif, qui a été définitivement modifié en 2021 pour être totalement intégré au budget de l’Etat.
Avant ce changement, le « fonds Barnier » était directement financé par une taxe sur la « surprime catastrophe naturelle », aussi appelée « surprime cat’nat’ ». Ce supplément de cotisation, payé notamment sur les contrats d’assurance habitation par les assurés, sert avant tout à remplir les caisses du régime d’indemnisation des catastrophes naturelles. La taxe sur cette surprime a donc longtemps abondé en direct le « fonds Barnier » – contrairement à aujourd’hui où le budget du dispositif est octroyé après l’adoption du projet de loi de finances.
Une situation « insupportable » pour les assureurs
D’autre part, en fin d’année dernière, le gouvernement a choisi d’augmenter au 1er janvier 2025 le taux de cette surprime, qui passera de 12 % à 20 %. L’objectif affiché ? Accorder davantage de ressources au régime d’indemnisations des catastrophes naturelles, presque tous les ans déficitaire. Mais, dans le même temps, la taxe sur cette surprime, elle, existe toujours… quand bien même elle n’est plus directement versée au « fonds Barnier ». Surtout, avec cette hausse de la surprime, elle devrait collecter beaucoup plus d’argent que les années précédentes.
La situation ne va pas aux assureurs, qui réclament que la différence soit affectée au « fonds Barnier ». « C’est insupportable », a résumé Florence Lustman, toujours sur France info. Pour elle, la hausse de la « surprime cat’nat’ » aurait avant tout dû bénéficier au « fonds Barnier ». Selon elle, si le système de financement n’avait pas évolué, environ « 450 millions d’euros » auraient alors pu lui revenir en 2025 grâce à cette augmentation. « Et là, aujourd’hui, on ne retrouve que la moitié… », fustige la présidente de France Assureurs.
Au printemps dernier, la commission des Finances du Sénat avait déjà noté une différence de 73 millions d’euros entre les recettes générées par cette taxe sur la « surprime cat’nat’ » et le montant du budget du fonds Barnier pour l’année 2023. « Il est impossible de passer sous silence la déconnexion » entre ces deux données, affirmait alors la rapporteure (LR) Christine Lavarde dans la synthèse de son rapport sur la pérennité financière du régime « cat’nat’ ».
Avec le dérèglement climatique, les assurances seront d’après les projections de plus en plus mises à contribution pour assurer des sinistres liés à des catastrophes naturelles. 2022 et 2023 ont constitué les deuxième et troisième années les plus coûteuses en la matière pour le secteur, d’après les chiffres de France Assurances.
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