Agriculture : trois mesures du Haut conseil pour le climat pour une alimentation bas carbone
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L’agriculture compte pour 18 % des émissions totales de gaz à effet de serre en France, ce qui en fait le deuxième secteur le plus émetteur derrière les transports. Dans un rapport publié le 25 janvier, le Haut conseil pour le climat se penche donc sur le lourd chantier de sa décarbonation.
Alors que les agriculteurs mobilisés dans toute la France dénoncent notamment un trop plein de normes environnementales, le Haut conseil rappelle que la transition du secteur est pourtant essentielle, mais qu’elle doit s’accompagner d’une revalorisation du revenu des agriculteurs. Voici trois de leurs recommandations, pour mettre l’agriculture sur la trajectoire de la neutralité carbone d’ici 2050.
Repenser l’irrigation des cultures
Hausse de la température, multiplication des événements climatiques extrêmes, raréfaction de la ressource en eau… Face au dérèglement climatique, l’agriculture est en première ligne : « Avec un réchauffement planétaire de l’ordre de 2°C, les cultures actuelles en France seraient exposées à des pertes moyennes de rendements de plus de 10 % par rapport aux rendements moyens actuels », indique le Haut conseil pour le climat.
Selon le rapport, la sécheresse « constitue l’un des effets les plus perceptibles du changement climatique sur le secteur agricole ». Pour y faire face, le Haut conseil pour le climat recommande notamment d’aller vers une « irrigation de résilience ». Une approche plus économe en eau, qui pourrait s’appuyer sur de nouvelles technologies pour cibler plus précisément les zones à arroser, mais aussi sur un changement des variétés cultivées, moins consommatrices d’eau.
Le Haut conseil donne également son avis concernant les retenues de substitution, en faisant référence aux projets très décriés de construction de mégabassines. Si elles sont surdimensionnées, « les prélèvements réalisés dans la nappe pour sécuriser l’irrigation en été pourraient aggraver la vulnérabilité de l’ensemble des usagers, dont les agriculteurs », indique le rapport. Sans remettre en cause leur utilisation, le Haut conseil recommande donc de surveiller étroitement l’état des nappes et des cours d’eau à proximité des retenues et de les dimensionner en fonction de la disponibilité de la ressource.
Passer d’une agriculture conventionnelle à l’agroécologie
Cela va de pair avec l’adaptation de l’irrigation, pour décarboner l’agriculture le Haut conseil pour le climat recommande également une transition du modèle agricole, vers une agriculture « climato-intelligente » ou « l’agroécologie ». « Elles consistent à sélectionner et utiliser des variétés ou des espèces de plantes plus tolérantes à la sécheresse et aux températures élevées, sélectionner des races animales thermo-tolérantes, diversifier les cultures (…) », énumère le Haut conseil.
Le rapport l’assure : « Les approches agroécologiques peuvent atteindre un haut niveau de productivité et de rentabilité, en réduisant les externalités environnementales négatives associées à l’agriculture conventionnelle ». En effet, de telles pratiques permettent une restauration de la biodiversité dans les sols, appauvris par les méthodes d’agriculture intensives. Le Haut conseil prend l’exemple de l’agroforesterie, une méthode utilisée en agroécologie et consistant à protéger les cultures en plantant des arbres et des haies sur les parcelles.
Pour autant, le Haut conseil estime qu’une telle transformation est bloquée par des « verrous structurels et pratiques » : hyper-spécialisation des productions en fonction des régions, structuration des exploitations autour d’un nombre restreint de cultures et d’animaux… « Il existe de nombreuses options d’atténuation et d’adaptation au changement climatique pour le système alimentaire, mais sa structure et son fonctionnement sont rigides, freinent l’adoption de nouvelles pratiques et verrouillent la possibilité de changements transformationnels », analyse le rapport. Pour lever ces blocages, des politiques ambitieuses doivent être menées, notamment pour revaloriser « les revenus des agriculteurs et des éleveurs qui transforment leurs pratiques ».
Diminuer sa consommation de produits d’origine animale
Le Haut conseil formule également plusieurs propositions pour décarboner l’alimentation des Français. « Les scénarios permettant de réduire les émissions agricoles de 50 % d’ici 2050 envisagent une baisse de la consommation de protéines animales d’au moins 30 % », indique le rapport. En effet, la consommation de produits d’origine animale représente à elle seule la moitié de l’empreinte carbone alimentaire des Français. Il recommande également de consommer local et de saison, pour limiter les émissions de CO2 liées au transport.
Des changements d’habitudes alimentaires qui, reconnaît le rapport, « seront plus profonds, donc plus complexes à mettre en place, pour les ménages les plus modestes qui consomment plus de produits transformés contenant des produits d’origine animale ». Le Haut conseil estime pourtant qu’une diminution de la consommation de protéines animales, en faveur de protéines végétales moins chères, pourrait représenter un gain de pouvoir d’achat de 30 % maximum, « si le ménage adopte un régime végétarien et divise par deux le gaspillage alimentaire ».
Sur tous ces sujets, le Haut conseil pour le climat estime que des transformations ambitieuses « nécessitent une planification et des investissements concertés » par les pouvoirs publics. L’instance consultative indépendante, placée sous l’autorité de Matignon, devrait prochainement remettre son rapport à Gabriel Attal. Mais le Premier ministre n’attendra pas la réception du document pour formuler une réponse d’urgence à la crise du monde agricole, il entend formuler dès le 26 janvier « des propositions concrètes de mesures de simplification » pour le secteur.
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