Le projet de loi comporte 11 articles. Il prévoit notamment la création d’un nouvel organisme public pour centraliser les offres et demandes du marché de l’emploi. En remplacement de Pôle Emploi, France Travail devrait voir le jour au plus tard le 1er janvier 2025. Ce projet vise à corriger les défaillances actuelles du marché. En effet, le taux de chômage, de 7,1% au premier semestre 2023, n’empêche pas des tensions de recrutement historiquement élevées. Depuis un an et demi, le nombre de postes vacants tourne autour de 375 000 chaque trimestre. Le projet gouvernemental, avec un budget cumulé estimé à 2,5 milliards d’euros pour son application, ambitionne donc de mieux orienter les demandeurs d’emplois vers les métiers qui recrutent ou qui pourraient recruter.
- Pôle Emploi devient France Travail pour « jouer collectif »
La réforme principale contenue dans le projet de loi est donc la transformation de Pôle emploi en France Travail. Sa création répond à la volonté du gouvernement de « proposer un accompagnement renforcé à toutes les personnes qui ne sont pas capables de retrouver seules un emploi, notamment parmi les allocataires du RSA ». A travers ce guichet unique, Olivier Dussopt souhaite améliorer la qualité du diagnostic social et comprendre les besoins du marché. La complexité du système actuel est critiquée aussi bien par les demandeurs d’emplois que les entreprises. La seconde mission fixée à France Travail est de renforcer l’accompagnement des entreprises dans leurs processus de recrutements. « Il ne s’agit pas de faire un big bang institutionnel, mais de jouer collectif » avait précisé Elisabeth Borne.
France Travail endossera le rôle d’élément moteur dans l’application du projet de loi. Aujourd’hui, la cheffe du gouvernement reconnaît que « les répartitions de compétences sont un peu complexes ». Les acteurs du marché de l’emploi sont nombreux et ont du mal à dialoguer. La connexion de l’opérateur public avec l’ensemble des acteurs (entreprises, collectivités, demandeurs d’emploi, …) devrait contribuer à une meilleure qualité des services proposés par l’Etat en matière de recherche d’emploi. Avec France Travail, toutes les personnes à la recherche d’un emploi et rencontrant des difficultés d’insertion se verront proposer un accompagnement individualisé mais dans une procédure unique. Ce nouveau système s’inscrit donc dans une uniformisation des recherches d’emplois, simplifiant des procédures souvent jugées trop administratives et pas adaptées.
- Un contrat d’engagement unique pour les bénéficiaires du RSA
Surtout, le projet de loi comporte tout le volet sur le RSA, partant du constat que « les bénéficiaires de minima sociaux sont insuffisamment accompagnés vers l’emploi ou vers la formation professionnelle ». Le texte prévoit tout d’abord que toute personne bénéficiaire du Revenu de Solidarité Active (RSA) sera en parallèle inscrite à France Travail. Actuellement, 40% des personnes qui touchent le RSA ne sont pas inscrites auprès de Pôle Emploi. Le bénéficiaire du RSA devra aussi souscrire à un contrat d’engagement, en remplacement des contrats déjà existants. D’une durée de 15 à 20 heures hebdomadaires, ce contrat consiste en des immersions, des ateliers de formation, … « Pour les demandeurs d’emploi ou les allocataires du RSA, nous ne sommes pas du tout dans une logique de travail gratuit ou de bénévolat obligatoire, mais de grande diversité et de personnalisation des activités dans le futur contrat d’engagement », précise Olivier Dussopt dans une interview accordée aux Echos.
Le taux horaire du contrat d’engagement, non-inscrit dans la loi, prendra en compte les difficultés sociales de chacun et sera adapté en fonction des besoins de la personne. L’ensemble de ce dispositif est de « développer une véritable société du savoir et des compétences » pour Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l’Enseignement et de la Formation professionnels. Le contrat d’engagement unique est l’opportunité « de découvrir des métiers » a expliqué Elisabeth Borne. Le projet de loi prévoit aussi une plus grande fermeté contre les bénéficiaires du RSA qui ne remplissent pas les critères, dont ce contrat fait partie. Dans une logique de gradation, les sanctions débutent par une suspension temporaire, avec régularisation rétroactive si la personne respecte à nouveau ses engagements, avant une radiation de l’aide.
- Un volet pour les travailleurs en situation de handicap
Au-delà d’un marché du travail plus efficace, Olivier Dussopt martèle « l’ambition d’un emploi pour tous », qui passe par une meilleure insertion des personnes en situation de handicap ou avec des difficultés sociales. Ces deux sujets font aussi l’objet d’articles dans le projet de loi. Pour le premier trimestre 2023, le chômage de la population active en situation de handicap atteint 12%, soit presque le double de la population générale. L’objectif est de faciliter leur emploi dans les entreprises « ordinaires » pour ceux qui le peuvent. Le projet de loi propose aussi une simplification de la reconnaissance du statut de travailleur handicapé (RQTH). Le statut RQTH sera automatiquement transmis à France Travail. Cette reconnaissance permet l’accès d’un travailleur handicapé à un ensemble de mesures favorisant le maintien dans l’emploi ou l’accès à un nouvel emploi. Le gouvernement prévoit d’aligner le droit des travailleurs des établissements ou services d’aides par le travail (ESAT) sur ceux des salariés ordinaires.
Un autre volet du projet de loi vise à responsabiliser les communes pour l’accueil de la petite enfance. « La garde d’enfants est le premier frein à l’emploi » selon Jean-Christophe Combe, ministre des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes handicapées. Le projet de loi attribue aux communes le statut d’autorités organisatrices, qu’elles ont déjà dans les faits. Leurs missions tournent autour des trois mots : recenser, informer et construire des initiatives. Le gouvernement souhaite donc augmenter, d’ici 2030, de 200 000 le nombre de places disponibles en crèche et auprès d’assistantes maternelles. Pour ce faire, Jean-Christophe Combe annonce un budget de 6 milliards dédié au fonctionnement de ces structures jusqu’en 2027. Il continue en déclarant que « ce service public c’est la fin du parcours du combattant des familles ». Le texte sera d’abord examiné au Sénat début juillet.