Chenove Deplacement de la ministre de l’Education nationale Nicole Belloubet

Education nationale : sans ministre, une rentrée scolaire sous tension ?

A moins de deux semaines de la rentrée scolaire, aucun Premier ministre n’a encore été nommé. C’est donc la ministre démissionnaire de l’éducation nationale, Nicole Belloubet, qui devrait être présente pour la rentrée scolaire. Une incertitude politique qui fait redouter des tensions pour la rentrée scolaire alors qu’un certain nombre de réformes impulsées par Gabriel Attal font leur apparition.
Henri Clavier

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On s’en souvient la dernière rentrée scolaire avait été particulièrement agitée. A peine nommé, Gabriel Attal avait voulu marquer le coup pour son arrivée à la tête du ministère de l’éducation nationale en assumant l’interdiction du port de l’abaya à l’école, puis en annonçant un « choc des savoirs ».

Alors que les élèves de la Réunion ont déjà repris, le reste des écoliers du pays doit effectuer sa rentrée scolaire le lundi 2 septembre. A moins de deux semaines de la reprise, l’absence de gouvernement de plein exercice et la situation politique incertaine font craindre une rentrée des classes mouvementée.

A moyens constants, l’éducation nationale devra affronter un certain nombre de difficultés habituelles comme le recrutement de professeurs pour les postes vacants. D’autres complications pourraient être liées à la mise en œuvre des réformes du gouvernement démissionnaire, des mesures dont la pérennité est loin d’être garantie.

« Je ne suis pas sûr que la gestion des affaires courantes permette de prendre la mesure des problèmes de l’éducation nationale »

Moment clé pour le locataire de l’hôtel de Rochechouart, la rentrée scolaire est souvent l’occasion d’imprimer sa marque de fabrique. Il s’agit généralement d’un moment privilégié d’échange entre le ministre et les équipes éducatives et se manifeste par des messages et des discours adressés aux personnels éducatifs. « Je ne sais pas si Madame Belloubet va pouvoir effectuer la rentrée, et ce que cela implique, en tant que ministre démissionnaire », s’interroge Laure Darcos, sénatrice Les Indépendants siégeant à la commission de l’éducation. « C’est pourtant le moment le plus important pour un ministre de l’éducation nationale, c’est à ce moment qu’on repose les nouvelles bases », continue la sénatrice. Une situation confuse qui pèse sur l’éducation nationale alors même que ce ministère a vu quatre ministres se succéder en un peu plus d’un an.  « Je ne suis pas sûr que la gestion des affaires courantes permette de prendre la mesure des problèmes de l’éducation nationale », regrette Pierre Ouzoulias, sénateur communiste et également membre de la commission de l’éducation.

Par ailleurs, le gel des crédits prévus par les lettres plafonds ne devrait pas faciliter la tâche de l’éducation nationale pour assurer une rentrée dans de bonnes conditions. Près de 3 200 postes d’enseignants n’ont pas été pourvus à l’issue des concours obligeant les académies les plus touchées, comme celles de Versailles ou de Créteil, à recourir à un recrutement externe. Une situation largement critiquée par les principaux syndicats. « La décision majeure c’est celle de geler les budgets, comme d’habitude on demande à l’éducation nationale de faire mieux mais sans moyens supplémentaires », s’inquiète Pierre Ouzoulias.

La mise en place du « choc des savoirs »

Le corps enseignant devra également prendre en compte les réformes du « choc des savoirs » voulu par Gabriel Attal lors de son passage rue de Grenelle. Les nouveautés vont notamment toucher le diplôme national du brevet avec la suppression des correctifs au niveau académique ainsi qu’une modification du poids des épreuves terminales dans la note finale (60 %). Les groupes de niveaux, devenus groupes de besoins, seront également lancés pour les élèves de 6è et de 5è en mathématiques et en français. La circulaire du ministère de l’Éducation nationale, publiée le 27 juin détaille les modalités de déploiement des groupes de besoins. « Ces groupes sont constitués avec une alternance entre des temps d’enseignement en classe de référence et des temps d’enseignement en regroupement selon les besoins des élèves, selon les modalités déterminées par les équipes pédagogiques. Régulièrement redéfinis, ils permettront de répondre au plus près aux besoins des élèves en partant des compétences effectivement maîtrisées », détaille la circulaire. Sans contester la pertinence de la réforme, Laure Darcos s’inquiète de la faisabilité du dispositif à moyens constants. « On demande de mettre en œuvre des groupes de niveau sans dotation horaire supplémentaire, ça ne passe pas du tout auprès des collèges », affirme la sénatrice. Par ailleurs, sans gouvernement la question de la pérennité des groupes de besoins se pose. « On ne sait pas vraiment si les mesures prévues par le « choc des savoirs » vont être abandonnées ou si elles seront reprises par les successeurs. Les enseignants demandent de la confiance et de la stabilité, c’est indispensable pour répondre à la crise des vocations », juge Pierre Ouzoulias.

L’administration prend le relais 

En attendant la nomination d’un gouvernement, l’éducation nationale devrait tout de même réussir à éviter la paralysie. Sans ministre de l’éducation nationale, l’administration centrale et les rectorats jouent un rôle clé dans l’organisation des services. « Il faut relativiser le rôle du ministre, les classes vont s’ouvrir, les recteurs vont faire fonctionner le système », assure Max Brisson, sénateur LR de la commission de l’éducation qui insiste également sur le long processus de préparation de la rentrée scolaire tout au long de l’année. Dans cette situation, l’administration est donc amenée à occuper une place centrale dans l’organisation des services, en particulier grâce aux circulaires. « On avait connu un cas similaire lorsque Benoît Hamon avait été remplacé durant l’été 2014, l’administration avait assuré le bon fonctionnement. Par ailleurs, on peut se réjouir de la nomination de Caroline Pascal à la tête de la Direction générale de l’enseignement scolaire (Dgesco) qui devrait jouer un rôle décisif pour cette rentrée scolaire », pointe Laure Darcos. La Dgesco et les recteurs ont d’ailleurs commencé à se réunir pour surveiller les dossiers brûlants de la rentrée, en particulier la bonne mise en œuvre des réformes. « Nous sommes dans une période de paralysie de l’action du gouvernement, pas de l’administration. L’Etat bénéficie d’une grande solidité administrative et la capacité à donner des instructions par circulaires devrait assurer une rentrée sans trop de difficultés », assure Max Brisson.

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