La colère n’a pas quitté les exploitations agricoles. Un an après un mouvement qui avait commencé par des panneaux retournés à l’entrée de communes, l’exaspération se fait à nouveau entendre chez les agriculteurs. Entre des trésoreries en difficulté après de mauvaises récoltes dues aux intempéries, et les mesures de simplification administrative qui se font attendre, la profession s’apprête à se mobiliser à nouveau.
C’est dans ce contexte social explosif que deux sénateurs déposent une nouvelle proposition de loi, « visant à libérer la production agricole des entraves normatives ». Elle prévoit notamment une levée des restrictions sur les pesticides ou encore des facilités dans la construction de retenues d’eau. Portée par les sénateurs Laurent Duplomb (LR) et Franck Menonville (Union centriste), deux agriculteurs de profession, le texte fait écho à plusieurs revendications de la FNSEA, le premier syndical agricole, mais également à plusieurs dispositions déjà adoptées par le Sénat ces dernier mois. C’est notamment le cas de plusieurs mesures contenues par la proposition de loi en faveur d’un « choc de compétitivité en faveur de la ferme France », adoptée par la Haute assemblée en mai 2023.
Assouplissement au niveau des produits phytosanitaires
Le texte revient par exemple sur plusieurs dispositions récentes en matière d’insecticides, introduites par la loi Egalim de 2018. L’un des premiers articles prévoit de mettre fin à l’interdiction des remises, rabais et ristournes sur la vente des produits phytopharmaceutiques, ou encore à la séparation de la vente du conseil pour ces produits. L’article 2 réautoriserait les néonicotinoïdes, interdits en France depuis six ans.
La proposition permettrait également au ministère de l’Agriculture de suspendre, dans certaines conditions, une décision de l’agence sanitaire Anses en matière d’homologation de produits phytopharmaceutiques. Pour les deux sénateurs, le premier bloc de la proposition de loi doit empêcher les « distorsions de concurrence » entre la France et ses voisins, en évitant l’interdiction de produits autorisés dans d’autres États membres de l’Union européenne.
En matière de construction de bâtiments d’élevage, le texte sénatorial veut rétablir des modalités de consultation du public plus souples. Le texte vise à faciliter les projets de stockage de l’eau, ayant un « intérêt général majeur ». Il s’agit des mégabassines.
Apaisement des relations avec l’OFB et les agriculteurs
S’appuyant sur l’une des recommandations du rapport de Jean Bacci, les deux sénateurs prévoient aussi que le préfet devra inviter l’Office français de la biodiversité (OFB) à privilégier « la procédure administrative, pour éviter autant que faire se peut des procédures judiciaires ». Cette mesure doit, selon eux, « favoriser l’acceptabilité de la police environnementale au sein du monde agricole ».
Selon l’AFP, la proposition de loi devrait être débattue le 17 décembre. Interpellée par Laurent Duplomb le 8 octobre à l’occasion d’un débat en séance, la ministre de l’Agriculture Annie Genevard avait indiqué être ouverte aux travaux complémentaires du Sénat, menés en parallèle du projet gouvernemental. « Bien sûr, ce texte n’est pas suffisant. Il pourra être complété par d’autres textes, le cas échéant sur votre proposition – je suis prête à y travailler avec vous », avait-elle signifié.