C’est un projet qui est dans les cartons depuis 30 ans, mais il suscite toujours la controverse. Contesté par les écologistes pour qui la liaison ferroviaire Lyon-Turin est une aberration environnementale, le projet vise à créer une ligne ferroviaire entre la France et l’Italie, véritable alternative à la route. Ce nouvel axe doit faciliter les échanges et les déplacements. Un projet d’envergure dont le coût augmente sans cesse depuis son lancement, car il ne se limite pas à la création du plus grand tunnel européen entre Savoie et Piémont, il implique aussi la réalisation d’une ligne de fret et passagers entre Lyon et Saint Jean de Maurienne.
Un coût « pharaonique » selon les écologistes
Contesté par les militants écologistes qui dénoncent l’impact environnemental sur le massif des Alpes et son coût « pharaonique », le projet a été doté par la Commission européenne de 700 millions d’euros pour le tunnel en cours de creusement sous le Mont-Cenis et son raccordement futur aux voies à Saint Jean de Maurienne en France et à Suse en Italie, à la suite d’un appel à projet. Au total, le tunnel ferroviaire représentera 164 kilomètres de galeries avec un double tronçon de 57,5 kilomètres auquel s’ajoutent des voies de service et de communication. A ce jour, 37 kilomètres ont déjà été creusés, dont 13,5 kilomètres pour le tunnel de base.
Une subvention de 700 millions d’euros pour le percement du tunnel
Concrètement, la Commission européenne va verser la somme de 700 millions d’euros à TELT (Tunnel Euralpin Lyon-Turin), la société publique franco-italienne créée en 2015 en charge du percement du tunnel. Cette subvention européenne sur 2004-2027 est « le troisième plus important investissement sur les 134 projets sélectionnés », se réjouit la société. En outre, une enveloppe supplémentaire d’un montant de 64,5 millions d’euros sera affectée aux études des voies d’accès côté français afin de déterminer leur tracé entre Lyon et le tunnel.
Initialement les études sur les quelques 150 kilomètres de voies d’accès étaient peu financées par l’UE, « mais l’Europe considère qu’elles sont essentielles pour la connexion des réseaux ferroviaire européens, et c’est la raison pour laquelle elle a accepté d’en financer 50 % », analyse le sénateur LR du Rhône Etienne Blanc.
20% du tunnel de base déjà percé
Actuellement, le réseau ferroviaire existant est insuffisant, selon le sénateur Les Républicains du Rhône Etienne Blanc, pour absorber l’augmentation du fret. La gare de la Part Dieu est encombrée par un fret de transit, donc le projet du Lyon-Turin « c’est une meilleure connexion entre la région Auvergne Rhône Alpes et l’Italie du nord », mais c’est aussi pour la métropole de Lyon « une très belle opportunité de décharger le réseau ferroviaire actuel d’un trafic de fret qui s’il contourne Lyon permettra de mieux répondre à la mobilité au sein de la métropole », assure le sénateur LR du Rhône.
Aujourd’hui 20 % du tunnel de base ont déjà été percés, « ce qui signifie que ce chantier est absolument irréversible, donc dire on va l’arrêter, c’est impossible financièrement, car il faudrait rembourser les subventions de l’Europe », estime Etienne Blanc.
Réduire la pollution et le trafic routier
En France comme en Italie, le projet est soutenu par les autorités et par les acteurs économiques de la région au nom du développement du fret ferroviaire. Selon ses partisans, la ligne à grande vitesse permettra d’augmenter le fret ferroviaire à travers les Alpes, de réduire le nombre de camions et la pollution engendrée par le trafic routier. Cinq tunnels doivent être percés dans les Alpes pour acheminer les marchandises depuis le bassin de Lyon jusqu’au tunnel de base.
Mais les écologistes dénoncent un chantier néfaste pour l’environnement. En ligne de mire des opposants la question de la ressource en eau suscite des inquiétudes. Selon Mediapart, un document interne à EDF révèle que le creusement du tunnel a vidé de son eau tout un pan de montagne dans la vallée de la Maurienne en avril 2019. Pour le sénateur LR du Rhône Etienne Blanc, le tunnel ferroviaire est le meilleur moyen de répondre à la décarbonation du transport à travers les Alpes. Alors que les maires de Lyon et de Grenoble plaident pour moderniser la ligne historique suffisante à leurs yeux pour absorber le trafic de fret actuel.
Un coût en constante augmentation
Autre motif d’inquiétude pour les opposants au tunnel ferroviaire : le coût. En constante augmentation depuis son lancement, le projet global a été évalué en 2012 par la Cour des comptes à plus de 26 milliards d’euros. Aucun chiffrage global n’a été communiqué depuis. Le coût du tunnel de base s’élève à 9 milliards d’euros. L’Europe finance ce tunnel de base à hauteur de 50 % et la France et l’Italie financent l’autre moitié. La France participe à hauteur de 20 % et l’Italie à hauteur de 30 % car la France doit financer plus de voies d’accès que l’Italie. Selon Etienne Blanc, l’augmentation du coût du Lyon-Turin s’explique par « l’inflation et le renchérissement des matériaux ».
Ouverture de la ligne en 2032 ?
Le conseil d’orientation des infrastructures, sous la tutelle de l’Etat et du ministère des transports plaide pour un report à 2045 pour l’ouverture de la nouvelle ligne Lyon-Turin alors que la date de 2032 avait été annoncée initialement par la compagnie publique franco-italienne TELT en charge de sa mise en œuvre.