Le Sénat relance sa proposition de programmation de l’énergie

Le Sénat relance sa proposition de programmation de l’énergie

Le Sénat examine en séance à partir à partir de ce mardi la proposition de loi de programmation de l’énergie, portée par la droite. L’initiative parlementaire, fixant plusieurs orientations sur la politique énergétique nationale, vise à répondre à l’absence de projet de loi sur le sujet.
Guillaume Jacquot

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Elle devait être examinée dans l’hémicycle les 11 et 12 juin, mais la dissolution a stoppé net les travaux parlementaires. La proposition de loi de programmation nationale de l’énergie, portée par la majorité sénatoriale de droite et du centre, a rapidement été remise à l’ordre du jour, après l’ouverture de la session ordinaire. Elle est débattue ce mardi soir en séance publique, et l’examen devrait s’achever mercredi. Près de 150 amendements sont en discussion.

Ce texte qui fixe un « cap clair et prévisible » pour la politique énergétique du pays est, rappelons-le, une réponse à l’absence de projet de loi quinquennal, pourtant prévu par la loi énergie-climat de 2019. Un tel texte aurait dû être voté au 1er juillet 2023. Et le précédent gouvernement a retiré le volet programmation de l’ancien projet de loi sur la souveraineté énergétique. « Il n’y a pas la moindre ombre d’un texte législatif portant sur l’énergie. On avait à cœur de faire pression sur le gouvernement », a rappelé ce matin Dominique Estrosi Sassone, présidente LR de la commission des affaires économiques.

« Le gouvernement a compris que s’il fallait relancer l’ambition énergétique du pays, il faut que la France soit stratège en la matière, et donne des signaux », expose Daniel Gremillet (LR), premier des signataires du texte.

27 gigawatts de nouvelles capacités nucléaires

Le texte adopté en commission le 29 mai, acte la relance du nucléaire, en fixant au moins 27 gigawatts de nouvelles capacités d’ici 2050 (en plus des 61,4 GW du parc actuel), incluant 14 EPR2 et 15 SMR (les petits réacteurs modulaires de faible puissance), ainsi qu’une option pour 6 EPR2 supplémentaires suivant les besoins de la réindustrialisation. Le texte prévoit aussi que la France devra conserver un mix nucléaire « aux deux tiers » d’ici 2030, et au moins à la moitié d’ici 2050.

Pour promouvoir la production d’électricité renouvelable, le texte fixe un objectif une capacité de 29 gigawatts pour les barrages d’ici 2035, 297 térawattheures de production de chaleur renouvelable. Il ajoute une cible à 60 TWh pour le biogaz, et 50 TWh pour les biocarburants, d’ici 2030.

La proposition de loi embarque également quelques dispositions de simplification pour faciliter les implantations des infrastructures, renforcer la protection des consommateurs, par rapport aux hausses de prix, en renforçant notamment les compétences de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) et du Médiateur national de l’énergie. Les sénateurs profitent également de ce texte pour faciliter la mobilisation des collectivités dans les investissements dans l’énergie.

« Le gouvernement est inquiet de la position de certains groupes à l’Assemblée nationale »

Depuis le dépôt du texte et les travaux de commission, la France a changé de gouvernement. Ces derniers jours, les rapporteurs du texte Alain Cadec (LR) et Patrick Chauvet (Union centriste) ont multiplié les échanges avec la nouvelle ministre déléguée en charge de l’Énergie, Olga Givernet. « Les échanges ont été de qualité, un peu différents de ceux qu’on a eus avec Roland Lescure », le précédent ministre en charge du dossier, détaille l’auteur du texte initial, Daniel Gremillet, qui revendique déjà un soutien du gouvernement sur l’objectif des 27 GW de nouvelles capacités pour le nucléaire. Les rapporteurs se dirigent vers une rédaction de compromis, offrant davantage de flexibilité dans l’atteinte de la cible. « Les amendements du gouvernement montrent qu’il y a eu un chemin de trouvé en matière d’ambition nucléaire », estime le sénateur des Vosges. « Il faut donner le signal que la France sera au rendez-vous sur la construction des SMR. »

L’un des points de la proposition de loi relatifs à l’énergie hydroélectrique risque en revanche de coincer. Les sénateurs proposaient d’expérimenter le régime de l’autorisation d’exploitation pour les barrages plutôt que le régime de concession. Le gouvernement souhaite supprimer l’article, et a rappelé que les échanges avec la Commission européenne se poursuivaient « pour statuer sur l’avenir de l’hydroélectricité ». Pour Dominique Estrosi Sassone, cet article reste un « amendement d’appel » pour débattre du sujet dans l’hémicycle.

Malgré une demande des sénateurs, le gouvernement n’a pas souhaité déclencher la procédure accélérée sur ce texte, qui aurait permis de limiter la navette à un passage dans chaque chambre. « Le gouvernement est inquiet de la position de certains groupes à l’Assemblée nationale », relaye le rapporteur Alain Cadec.

Si l’adoption de la proposition de loi sénatoriale ne fait aucun doute demain, son devenir à l’Assemblée nationale est relativement incertain. Les rapporteurs sont néanmoins confiants sur les chances du texte de pouvoir prospérer au Parlement, quand même bien le ministre de l’Économie Antoine Armand déclarait il y a un mois qu’une programmation devait passer par un projet de loi, et non une initiative parlementaire. « Si le gouvernement n’avait pas d’intérêt sur ce texte, les rapporteurs n’auraient pas eu autant de discussions sur ce texte, y compris ce week-end », fait valoir Daniel Gremillet.

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