Dans ce projet de loi jugé assez largement comme « technique », c’est probablement la mesure la plus concrète pour les Français. Les sénateurs ont adopté ce 22 juin l’article 16 du texte Industrie verte, qui prévoit la création d’un nouveau produit d’épargne : « plan d’épargne avenir climat » (PEAC). L’ouverture sera possible au nom d’un mineur, dès sa naissance, et ses fonds seront bloqués jusqu’à sa majorité, sauf déblocages exceptionnels, en cas d’invalidité par exemple.
Un établissement public sera chargé de placer l’encours de ces livrets sur des titres financiers « contribuant au financement de l’économie productive et de la transition écologique », tout en offrant une « protection suffisante » aux épargnants. Son fonctionnement se rapproche celui d’une assurance vie, avec une gestion pilotée, dont les placements seront de plus en plus sécurisés à l’approche du 18e anniversaire de son titulaire.
Le gouvernement espère mobiliser, grâce à ce nouveau produit, un milliard d’euros de collecte pour financer des projets d’industrie verte ou liés à la transition écologique. Comme beaucoup de livrets d’épargnes réglementés, le ministère de l’Économie et des Finances propose que les gains ne soient ni imposés, ni concernés par des prélèvements sociaux. En dehors du livret A et ses livrets similaires, « aucun autre placement ne bénéfice d’une telle garantie », a insisté Bruno Le Maire, qui y voit un « beau produit », attractif. « On garantit un niveau de rémunération qui doit être – en théorie, je suis prudent – supérieur à ce que peut être un livret A », a-t-il précisé, affirmant que la performance des actions sur des périodes de « 20 ou 30 ans » étaient en moyenne supérieures à l’épargne réglementée.
Une « fausse bonne idée » selon le groupe écologiste
Les trois groupes de gauche ont tenté, sans succès, de supprimer l’article. Pour la socialiste Nicole Briquet, ce plan d’épargne « relève davantage de la communication que de l’efficacité » car il ne « répond pas aux enjeux en matière de transition écologique ». Selon elle, son lancement « interroge » sur les conséquences qu’il pourrait avoir sur les produits d’épargnes actuels. Daniel Breuiller, pour les écologistes, l’a qualifié de « fausse bonne idée », déplorant un placement comportant des « risques ». Le sénateur du Val-de-Marne a également affirmé que rien ne garantissait que les fonds viennent alimenter ou non des entreprises liées aux énergies fossiles.
« Je pense qu’il faut lui donner sa chance », a répondu la rapporteure Christine Lavarde (LR). Son amendement, adopté en commission des finances la semaine, a permis d’améliorer selon elle le dispositif. Les banques devront « tenir compte des profils de risque du titulaire » et les informations à transmettre aux titulaires ont été précisés. La sénatrice a également provoqué la suppression de l’abondement du plan d’épargne par l’État, lorsque ce dernier est ouvert dans l’année suivant la naissance de l’enfant. Le montant était inconnu, son montant devait être fixé par règlement. « On s’adresse quand même à des foyers qui ont un certain niveau de revenus, puisque les fonds placés sur ce plan sont bloqués, sauf cas extrême prévu par l’article, jusqu’à la majorité ou à 25 ans », a-t-elle signalé. « Il y a un véritable effet d’aubaine à verser cet abondement. »
Bruno Le Maire s’est converti à l’idée de retirer l’abondement d’État
Face à amendement de rétablissement de cet abondement, soutenu par le groupe Les Indépendants de Claude Malhuret, le ministre Bruno Le Maire s’est finalement rangé à l’argumentation de la commission des finances. Le gouvernement n’a pas soutenu le retour de l’abondement dans le texte. « Nos finances publiques doivent nous amener à être vigilant sur le moindre euro dépensé (…) Il est plus sage de laisser vivre ce produit en sortant la logique de l’abondement », a-t-il justifié. Depuis la présentation du texte en Conseil des ministres à la mi-mai, de l’eau a coulé sous le pont de Bercy. Les Assises des finances publiques, préparant à des économies dans les prochains budgets, sont passées par là.
En séance, deux amendements de la sénatrice Christine Lavarde sont venus encadrer un peu plus les modalités du plan d’épargne. Ils ont été adoptés contre l’avis du gouvernement. Le premier vise à s’assurer à ce que ce livret réponde bien aux objectifs du projet de loi. L’article précise désormais que les titres qui contribuent à la transition écologique devront répondre à des labels reconnus en la matière, et que les titres qui contribuent à l’économie productive ne pourront pas être supérieurs à ceux des titres qui favorisent la transition écologique. Un décret devra enfin lister les activités exclues de l’allocation des versements sur les plans d’épargne avenir climat. Le second amendement demande à encadrer les frais de gestion de ces plans, dans un décret.