Déficit public : le Sénat dénonce la « gestion budgétaire calamiteuse » du gouvernement
Publié le
Après sa visite surprise à Bercy ce 21 mars, le rapporteur général de la commission des finances Jean-François Husson confirme que le déficit public pour l’année 2023 s’établit bien à 5,6 % du PIB. Un décalage de 0,7 points avec la prévision initialement faite par le gouvernement, qui tablait sur un déficit de 4,9 %.
Mécontent d’avoir appris cette nouvelle par voie de presse, dans un article des Echos publié ce 20 mars, le sénateur Les Républicains a procédé à un « contrôle sur pièce et sur place » pour vérifier l’information, en consultant les notes réalisées par les services de Bercy ces six derniers mois.
Un écart de 65 milliards d’euros entre les prévisions et le déficit attendu en 2025
« C’est un déficit que nous n’avons jamais connu sous la cinquième République, hors périodes de crise », alerte Jean-François Husson. Mais les documents consultés par le sénateur révèlent une situation « pire encore » : « Si rien n’est fait », les services de Bercy prévoient la poursuite de ce dérapage en 2024 et en 2025, avec des prévisions de déficit respectivement établies à 5,7 % et 5,9 %.
Face à ces prévisions, le rapporteur de la commission des finances dénonce la « rétention d’information » du gouvernement. En effet, dans sa loi de programmation des finances publiques, le gouvernement table officiellement sur un déficit de 4,4 % du PIB pour 2024 et de 3,7 % du PIB pour 2025. Un décalage entre les prévisions du ministère et les notes des services en interne qui choque le sénateur : « Pour 2025, c’est un écart massif de 2,2 points de PIB. C’est un différentiel de l’ordre minimum de 65 milliards d’euros par rapport à ce qui est annoncé. »
Ces chiffres « témoignent d’une gestion budgétaire calamiteuse du gouvernement, incapable de suivre la trajectoire budgétaire qu’il a lui-même fait adopter par 49.3 », déplore Jean-François Husson. Une situation dont la responsabilité revient, juge le sénateur, uniquement aux gouvernements successifs des deux mandats d’Emmanuel Macron, qui avait hérité « d’un budget dans les clous » en 2017.
Les 10 milliards d’euros annoncés ne sont qu’un « avant-goût amer » des économies à venir
La visite du rapporteur de la commission des finances révèle aussi que « le gouvernement a tardé à réagir », en annonçant en février dernier la nécessité de faire 10 milliards d’euros d’économies en 2024. « Dès la fin du mois d’octobre 2023, les services de Bercy ont senti un coup de froid sur la croissance. Le gouvernement a choisi de ne pas intégrer ce coup de froid dans la discussion du projet de loi de finances, il a fait un pari dangereux alors que les signaux étaient au rouge », dénonce Jean-François Husson.
Pour le sénateur, les coupes budgétaires de 10 milliards d’euros annoncées par Bruno Le Maire au mois de février sont « un avant-goût amer » des économies qui devront être faites pour redresser la barre. « La procrastination, ça suffit », tance le rapporteur, qui demande désormais au ministre de l’Économie des explications : « Si nous voulons fixer un cap pour nous redresser, il va falloir avant cela un temps de vérité, que chacun assume ses responsabilités. »
Le 6 mars dernier déjà, Bruno Le Maire et le ministre des Comptes publics Thomas Cazenave étaient auditionnés pendant plusieurs heures par les députés, puis par les sénateurs, pour se justifier de leurs annonces de coupes budgétaires. Après ces nouvelles révélations, les échanges tendus entre ministres et parlementaires ne sont pas près de s’interrompre.
Pour aller plus loin