Crise agricole : le projet de loi d’orientation agricole sera débattu au Sénat à partir du 14 janvier, annonce Annie Genevard
Adopté à l’Assemblée nationale en mai dernier, le projet de loi d’orientation agricole n’avait pas encore été inscrit à l’ordre du jour du Sénat par le nouveau gouvernement. C’est désormais chose faite. Le texte sera examiné en séance à partir du 14 janvier, annonce la ministre de l’Agriculture Annie Genevard.
Longuement auditionnée par la commission des affaires économiques du Sénat ce 6 novembre, la ministre de l’Agriculture devrait passer du temps au palais du Luxembourg ces prochains mois. Ce mercredi, la conférence des présidents a validé l’inscription à l’ordre du jour du projet de loi d’orientation agricole.
Celui-ci sera examiné en commission le 11 décembre, puis débattu dans l’hémicycle à partir du 14 janvier et « jusqu’au 23 ou 24 janvier, avec quelques petits intermèdes sur d’autres textes », confirme la présidente de la commission des affaires économiques Dominique Estrosi Sassone.
Un projet de loi « complémentaire » à la proposition de loi de Laurent Duplomb et Franck Menonville, juge la ministre
« Le gouvernement a choisi d’inscrire ce texte lors du premier créneau disponible au Sénat », affirme Annie Genevard. Pensé en réponse à la crise traversée par la profession et à la colère exprimée par les agriculteurs au début de l’année, le texte a été voté à l’Assemblée nationale au mois de mai dernier, sa transmission au Sénat s’est heurtée à la dissolution. Une longue attente qui ravive la colère du secteur, toujours frappé par la crise. « Je ne peux laisser dire que ce projet de loi aurait pu être inscrit avant janvier, ce serait mentir aux agriculteurs. Pour que nous ayons un débat serein, de qualité, il faut prévoir un temps suffisant. Dire que trois jours auraient suffi, comme je l’ai entendu, c’est non seulement illusoire mais c’est aussi un manque de respect pour le travail sénatorial d’enrichissement du texte », a souligné la ministre.
En plus du projet de loi gouvernemental, un autre texte agricole sera prochainement débattu au Sénat. Déposée par le sénateur LR Laurent Duplomb et le sénateur centriste Franck Menonville, la proposition de loi « visant à libérer la production agricole des entraves normatives » sera examinée en commission le 4 décembre, puis dans l’hémicycle 17 décembre. « Nous ne pouvons plus continuer d’être stigmatisés, nous ne pouvons plus continuer d’avoir des entraves, nous ne pouvons plus continuer d’être livrés à la concurrence déloyale du libre-échange et dans le même temps d’être livrés à des contraintes supplémentaires par rapport à nos concurrents », a insisté Laurent Duplomb. En défense de son texte devant la ministre auditionnée, le sénateur et agriculteur de profession a appelé à ce que le texte poursuive sa route à l’Assemblée au plus vite : « Cette proposition de loi, il faudra qu’elle soit inscrite à l’Assemblée nationale sur une semaine du gouvernement. Inscrivez là la semaine du 20 janvier ! »
Pour le rapporteur pour avis du volet agriculture du budget, il y a en effet urgence à examiner sa proposition de loi qui vient combler les lacunes de la loi de programmation proposée par le gouvernement. Interrogé par Public Sénat lors de l’adoption du texte à l’Assemblée, Laurent Duplomb avait ainsi fustigé « un texte programmatique qui passe à côté des enjeux qui ont été mis sur la table ces dernières semaines, c’est-à-dire la compétitivité des agriculteurs ». De son côté, Annie Genevard se veut moins péremptoire, voyant dans la proposition de loi des deux sénateurs un texte « complémentaire » à celui du gouvernement. « Je voudrais quand même qu’on mesure la loi de programmation agricole à sa juste valeur. Son article 1 reconnaît l’intérêt supérieur de l’agriculture pour la nation. Elle contient aussi un volet formation, un volet installation, un volet pour la dépénalisation des atteintes non-intentionnelles à l’environnement… Je ne laisserai pas dire qu’il n’y a rien dans cette loi », a souligné la ministre. Appelant le sénateur à « être raisonnable » dans ses requêtes de calendrier, elle s’est engagée à « demander au gouvernement une inscription [de la proposition de loi à l’ordre du jour de l’Assemblée] dans les meilleurs délais ».
Un coup de rabot sur la planification écologique et une nouvelle aide pour les éleveurs
Avant l’examen de ces deux textes, la ministre de l’Agriculture devra également soumettre au Parlement son projet de budget. Devant la commission, Annie Genevard a défendu « un projet de loi de finances ambitieux, parce que c’est une nécessité, dimensionné pour la période de crise que nous connaissons, tout en poursuivant l’effort budgétaire ». En matière d’économies, ce sont 115 millions d’euros qui pèsent sur le ministère de l’Agriculture dans l’effort total de 60 milliards prévu par le gouvernement. « Si le budget de mon ministère, comme tous les autres, apporte sa contribution au redressement de nos finances publiques, j’ai obtenu qu’il soit parmi les plus préservés, compte tenu des crises et des enjeux qui traversent le monde agricole », a insisté la ministre.
Des coupes budgétaires bien loin de celles rencontrées dans d’autres ministères, mais tout de même déplorées par certains sénateurs. Le socialiste Jean-Claude Tissot, rapporteur pour avis du volet agricole du budget avec Laurent Duplomb et Franck Menonville, a ainsi souligné que les crédits alloués à la planification écologique diminuaient de 50 %. « Un euro investi dans la prévention et l’adaptation, c’est jusqu’à 7 euros économisés dans la gestion de crise. Puisqu’on nous demande des économies, il s’agit à mes yeux de la mesure la plus structurante et intelligente d’économie à long terme, puisque ces dépenses de planification écologique entrent dans la catégorie de celles qui rapportent », a alerté le sénateur socialiste.
Parmi les nouvelles dépenses à venir, Annie Genevard a toutefois annoncé devant la commission un nouveau dispositif de prise en charge des pertes liées aux épidémies qui touchent actuellement les éleveurs. En réponse à une épidémie de fièvre catarrhale ovine (FCO) qui décime les cheptels bovins et ovins dans plusieurs régions de France, le Premier ministre avait déjà annoncé il y a un mois le déploiement d’un fonds d’urgence de 75 millions d’euros pour indemniser les éleveurs touchés par une certaine souche de cette maladie, la FCO de sérotype 3. La ministre de l’Agriculture a assuré aux sénateurs que ce fonds d’urgence serait élargi « à la prise en compte de la surmortalité découlant de la FCO de sérotype 8 ». Une demande des syndicats agricoles, alors que le manque de vaccins contre toutes les souches de FCO entraîne de lourdes pertes. La mesure sera-t-elle de nature à calmer la révolte qui gronde de nouveau dans les exploitations ? La Coordination rurale, particulièrement engagée dans le mouvement du début de l’année, promet déjà de nouvelles actions de blocage à la mi-novembre.
La motion de censure contre le gouvernement de Michel Barnier sera examinée à l’Assemblée ce 4 décembre. Si le Premier ministre tombe, son budget aussi, avec des conséquences concrètes sur le pouvoir d’achat des Français. Selon l’Observatoire français des conjonctures économiques, 17,6 millions de ménages pourraient voir leurs impôts augmenter. Explications.
La commission mixte paritaire réunie ce mardi 3 décembre est conclusive. Ses conclusions vont être soumises au vote des deux assemblées avant le débat des motions de censure à l’Assemblée nationale. Le texte vise à répondre à des besoins urgents constatés en fin d’année.
En quête de mesures pour générer de nouvelles recettes, le gouvernement propose dans son projet de loi de finances de taxer les rachats d’actions des grandes entreprises. Les sénateurs ont adopté ce dispositif, en modifiant le mode de calcul de la taxe pour accroître considérablement son rendement, désormais évalué à près d’un milliard d’euros.
« L’année dernière, nous avons envoyé un très très mauvais message aux habitants des territoires ruraux », dénonce le sénateur centriste Bernard Delcros. Un mauvais message que le Sénat a corrigé ce 29 novembre, dans le cadre des débats sur le projet de loi de finances. Grâce au vote d’une dizaine d’amendements venus de tous les groupes politiques, la chambre haute a adopté le retour du prêt à taux zéro (PTZ) sur l’ensemble du territoire. Il y a un an, les conditions d’accès au PTZ, qui aide les primo-accédants dont les revenus ne dépassent pas un certain plafond à financer leur premier achat immobilier, avaient au contraire été restreintes. Dans les zones dites « tendues », seulement 1 800 communes en France, le dispositif était réservé à la construction de logements neufs. Partout ailleurs sur le territoire, dans les zones « détendues », il n’était accordé que pour l’achat de logements anciens et en contrepartie de lourds travaux de rénovation énergétique. « Le dispositif du PTZ est de plus en plus en difficulté » Un resserrement des conditions d’accès qui avait mécaniquement entrainé une chute du recours à cette aide, déplore la sénatrice communiste Marianne Margaté : « Le dispositif du PTZ est de plus en plus en difficulté. En 2024, seuls 40 000 prêts devraient être accordés, contre 124 000 en 2017, c’est le plus bas niveau depuis la création du dispositif en 1995. » Pour l’ensemble des sénateurs, un retour aux conditions d’accès d’origine semble ainsi essentiel. « C’est un sujet important dans le contexte d’une crise du logement que de permettre à l’ensemble de nos concitoyens qui souhaitent accéder à la propriété de pouvoir le faire. C’est d’autant plus important aujourd’hui, alors que les taux de crédits immobiliers s’établissent à plus de 3 % », souligne le président du groupe Les Républicains Mathieu Darnaud. Le Sénat va plus loin que la proposition du gouvernement, en étendant le PTZ à l’achat de logements anciens L’adoption de cette mesure n’est pas une surprise. Dès son arrivée à Matignon, à l’occasion de son discours de politique générale, Michel Barnier avait déjà annoncé son souhait d’étendre de nouveau le PTZ sur tout le territoire, sans pour autant préciser les modalités exactes de cette mesure. Les amendements adoptés par le Sénat, qui rétablissent le dispositif d’origine, ne correspondent toutefois pas exactement à la position que défend le gouvernement sur le sujet. De son côté, le ministre des Comptes publics Laurent Saint-Martin a en effet proposé de rétablir le PTZ sur tout le territoire uniquement pour la construction de logements neufs et non pour la rénovation. « Cette année, la priorité est mise sur la nécessité de booster la construction du neuf », justifie-t-il. Une position que la chambre haute ne partage pas. La commission des finances a d’ailleurs demandé au ministre de retirer son amendement. « Je pense que la rénovation dans l’ancien présente de vrais intérêts, notamment parce qu’elle s’inscrit dans un objectif de sobriété foncière », défend le sénateur Les Républicains et rapporteur général de la commission Jean-François Husson.