Suite à de nouvelles annonces de Gabriel Attal en conférence de presse le 1er février, la FNSEA et les Jeunes agriculteurs ont appelé à une suspension des blocages. La Coordination rurale, deuxième syndicat d’agriculteurs du pays et à la tête du cortège parti d’Agen en direction du marché de Rungis, s’est également dit satisfaite du discours du Premier ministre.
« Nous avons dit aux agriculteurs qui étaient sur le terrain, depuis dix jours pour certains, d’aller se reposer parce qu’on ne doit pas attendre qu’il y ait des débordements ou des accidents en lien avec la fatigue », explique la présidente du syndicat sur le plateau d’Extra Local. Pour autant, la mobilisation se poursuit pour s’assurer de la concrétisation des mesures annoncées : « Chaque département doit se retourner vers sa préfecture pour discuter de tous les décrets, de toutes les mesures de simplification, il y a énormément de travail. »
« Si chacune des enveloppes étaient insuffisantes, on nous a donné la garantie qu’elles seraient abondées »
Pour tenter de calmer la crise, Gabriel Attal a annoncé une série de mesures d’aides financières d’urgence pour certaines filières en difficulté. Une enveloppe de 50 millions d’euros pour les éleveurs bovins touchés par une épidémie de maladie hémorragique épizootique, 80 millions d’euros pour les viticulteurs, 20 millions pour les éleveurs bretons touchés par les tempêtes de l’hiver…
« Si chacune des enveloppes annoncées étaient insuffisantes, on nous a donné la garantie qu’elles seraient abondées », indique Véronique Le Floc’h. Productrice de lait en agriculture biologique dans le Finistère, l’éleveuse alerte déjà sur le faible montant de certaines aides d’urgence : « Pour le bio, ils ont annoncé 50 millions d’euros, sachant que la Fédération nationale d’agriculture biologique a annoncé, selon ses calculs, qu’il manquait 250 millions d’euros. »
« À la Coordination rurale, nous avons toujours dit qu’Egalim ne fonctionnait pas »
Au-delà des mesures de court terme, la présidente de la Coordination rurale reste vigilante sur les mesures qui seront mises en place pour garantir aux agriculteurs un meilleur revenu. Un problème persiste donc sur les questions de partage de valeur avec l’industrie agroalimentaire et la grande distribution. « Si vous prenez un litre de lait, qu’on payait il y a trois ans 70 centimes et qui est aujourd’hui à un euro voire plus, sur ces 30 centimes d’augmentation, l’agriculteur ne touche que 7 centimes supplémentaires. Cela veut bien dire que les deux autres maillons en ont touché plus que nous », constate Véronique Le Floc’h.
Pour garantir un meilleur partage de la valeur avec les agriculteurs, le gouvernement a annoncé vouloir renforcer les lois Egalim et davantage contrôler leur respect par la grande distribution. Une solution qui ne satisfait pas totalement Véronique Le Floc’h : « À la Coordination rurale, nous avons toujours dit qu’Egalim ne fonctionnait pas. On oublie que les produits qui sortent de nos exploitations vont pour un tiers seulement à la grande distribution, un tiers vont à l’export et le reste pour les autres débouchées comme la restauration collective. On ne peut pas s’attendre à ce qu’Egalim, même avec tous les contrôles, finisse par fonctionner. »
La présidente de la Coordination rurale dénonce également une forme de financiarisation de l’agriculture, qui causerait une perte de revenus pour les exploitants : « Au niveau des coopératives agricoles, qui sont aujourd’hui structurées comme des sociétés privées, les filiales versent leurs dividendes à des holdings et cela ne redescend pas aux agriculteurs ».
Autant de constats qui tendent à décourager les jeunes de s’installer en agriculture, alors que dans cette décennie la moitié des exploitants prendront leur retraite. Raison de plus pour poursuivre le combat, affirme Véronique Le Floc’h, « pour obtenir le modèle qui permettra aux jeunes de s’installer, à ceux qui approchent de la retraite de partir. »