Plusieurs sénateurs de gauche ont fait des rappels au règlement ce 15 janvier, pour dénoncer la reprise des travaux parlementaires sur le projet de loi de finances, tel qu'il a été laissé en suspens en décembre.
Budget 2025 : à combien se chiffrent les dernières concessions de François Bayrou ?
Publié le
La censure de décembre n’a pas fait miraculeusement disparaître l’état très dégradé des comptes publics. Elle est en cas tout à l’origine d’une révision de l’effort à effectuer tout au long des prochains mois. Dès le 6 janvier, le nouveau ministre de l’Économie Éric Lombard annonçait que la nouvelle cible du déficit ne serait non plus de 5 % du PIB, mais quelque part « entre 5 et 5,5 % », soit « un peu plus de souplesse que ce que le gouvernement de Michel Barnier avait prévu ».
Fruit de longues négociations depuis une dizaine de jours, François Bayrou a listé ce 16 janvier ses principaux arbitrages, dans une lettre adressée aux présidents des groupes socialistes. L’un des objectifs du gouvernement était de s’assurer qu’une partie de la gauche se désolidarise de la motion de censure déposée par la France insoumise. Objectif atteint, puisque seulement 58 des 66 membres du groupe socialiste ont refusé de faire tomber hier le gouvernement Bayrou.
Charge désormais au ministre de soumettre les différents gages dans les textes budgétaires toujours en discussion au Parlement, à commencer par le volet dépenses du projet de loi de finances en cours d’examen au Sénat. François Bayrou renonce à plusieurs mesures d’économies de son prédécesseur et promet de desserrer l’étau sur plusieurs missions budgétaires. Le total des concessions, sur le volet dépenses, s’approche des trois milliards d’euros.
Des concessions dans le domaine de la santé
En volume, les concessions les plus importantes se nichent dans les dépenses de santé, et transiteront donc dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Alors que beaucoup d’organisations professionnelles et d’oppositions s’inquiétaient de l’insuffisance des moyens accordés au système de santé. L’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) sera réhaussé d’un milliard d’euros supplémentaires, s’est engagé François Bayrou.
L’État renonce également à relever le ticket modérateur sur les consultations médicales et les médicaments, la Sécurité sociale se prive ainsi d’une marge de 900 millions d’euros.
Hausse des crédits des outre-mer, annulation des suppressions de postes d’enseignants
Le budget de l’État est aussi marqué par un virage notable, dans la mission outre-mer. Comme beaucoup d’autres ministères, celui des outre-mer devait voir ses moyens diminuer, de 250 millions d’euros. Conséquence de la crise en Nouvelle-Calédonie ou encore des destructions de l’ouragan Chido à Mayotte, les moyens seront finalement en progression sur un an. En autorisation d’engagement, le budget progresse de plus de 700 millions d’euros, par rapport au texte initial déposé par le gouvernement Barnier.
Matignon abandonne également l’idée d’ajouter deux jours de carence aux agents de la fonction publique. La mesure, défendue par l’ancien ministre Guillaume Kasbarian, était censée rapporter 289 millions d’euros.
Autre concession : le gouvernement refuse aussi de supprimer les 4000 postes d’enseignants, tel que le prévoyait le texte initial du budget cet automne. Entre temps, le Sénat avait réduit l’effort de moitié en guise de compromis, en limitant les coupes à 2000 postes. Selon la ministre de l’Education nationale, Elisabeth Borne, ce geste devrait représenter une dépense annuelle de 150 millions d’euros.
Sur le front du logement, François Bayrou annonce aussi un amendement à 100 millions d’euros pour majorer le budget destiné aux « maires bâtisseurs ».
Quelques recettes fiscales en plus
La somme des dépenses supplémentaires ne sera compensée que partiellement par le volet fiscal. Parmi les nouvelles recettes que Matignon souhaite introduire figure notamment une hausse de 0,1 point du taux de la taxe sur les transactions financières, de quoi ramener une somme de l’ordre de 750 millions d’euros. Le gouvernement a aussi l’intention de doubler la taxe sur le rachat d’actions, par rapport à ce qui était prévu dans le texte initial. Le rendement serait alors de 200 millions d’euros supplémentaires.
Dans ce contexte, le ministre de l’Économie Éric Lombard aborde avec confiance la suite des débats sur le budget. « Je pense, mais c’est au Parti socialiste d’exprimer son point de vue, que nous avons un accord » pour une non-censure du budget, a-t-il déclaré ce matin sur BFMTV-RMC. Mais le coût de non-censure du Parti socialiste ne fera-t-il pas non plus au prix de pertes de voix à droite ? Invité de notre émission « Parlement hebdo » ce matin, le sénateur (apparenté LR) Olivier Paccaud, membre de la commission des finances, met en garde sur le sort du budget. « Il faut que la droite le vote, je ne plaisante pas. On oublie totalement qu’on est à plus de 3300 milliards de dettes. »
Pour aller plus loin