Bruno Le Maire : « Renoncer à l’ambition du véhicule électrique, c’est renoncer à toute ambition automobile pour la France »

En 2035, la vente de véhicules thermiques neufs sera interdite dans l’Union européenne. Une mesure à laquelle le ministre de l’Économie a renouvelé son soutien devant les sénateurs, profitant de son audition pour tacler le Rassemblement national qui s’y oppose dans le cadre des élections européennes.
Rose Amélie Becel

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

« Contrairement à ce qu’avance Marine Le Pen, je pense que ce serait une faute politique, une faute économique, de changer de stratégie et d’abandonner le cap de 2035 ». Auditionné par la commission d’enquête sénatoriale sur les prix de l’électricité, Bruno Le Maire a martelé à de nombreuses reprises son opposition avec le Rassemblement national au sujet des voitures électriques.

À l’échelle de l’Union européenne, la vente de véhicules thermiques neufs sera en effet interdite d’ici 2035. Dans son programme européen, le RN annonce vouloir revenir sur cette interdiction, et Jordan Bardella multiplie les attaques contre cette mesure dans le cadre de sa campagne.

« Une génération entière pourra continuer à acheter ou à rouler dans un véhicule thermique »

« Cette mesure inquiète des millions de Français qui n’arrivent plus à se chauffer, à se soigner, se loger et à qui on vient dire : dans quelques années, vous allez devoir vous procurer un véhicule électrique qui coûte beaucoup plus cher », dénonçait ainsi la tête de liste du RN sur BFMTV, le 27 mai. « Ne laissons pas croire aux Français que, du jour au lendemain, la possibilité d’acheter un véhicule thermique va s’arrêter », a rétorqué le ministre de l’Économie lors de son audition.

À côté de ses tacles au RN, Bruno Le Maire a tout de même aussi dû répondre aux inquiétudes de quelques sénateurs sur les effets de cette mesure sur les plus modestes. « La pente n’est-elle pas trop ambitieuse ? », s’est par exemple interrogé l’élu Les Républicains Stéphane Piednoir. « 2035, c’est dans onze ans. Si vous achetez un véhicule thermique en 2033-2034, il a une durée de vie moyenne de 15 ans, ce qui fait que nous avons encore 26 ans devant nous au moins. Une génération entière pourra continuer à acheter ou à rouler dans un véhicule thermique, sachant que la vente de véhicules d’occasion sera toujours possible », a défendu le ministre de l’Économie.

Bruno Le Maire a par ailleurs estimé que le leasing social, dispositif mis en place par l’État pour permettre aux plus modestes de louer une voiture électrique pour 100 euros par mois, était « une option possible » pour favoriser cette accessibilité. Victime de son succès, l’opération a été interrompue par le gouvernement mois de deux mois après son ouverture. Auditionné au Sénat dans le cadre d’une autre commission d’enquête, le PDG de Stellantis Carlos Tavares avait d’ailleurs déploré cette interruption.

« La proposition de Marine Le Pen aboutirait à ce que, dans dix ans, la France roule en Tesla ou en BYD »

Pour Bruno Le Maire, la fin du véhicule thermique répond avant tout à un intérêt industriel. « Renoncer à l’ambition du véhicule électrique, c’est renoncer à toute ambition automobile pour la France », a-t-il martelé, estimant que la France risquait d’être « rayée de la carte de l’industrie automobile du XXIème siècle » si elle ne développait pas sa production. « Si nous continuons à rouler en thermique, nous resterons dépendants de l’Arabie saoudite pour les énergies fossiles, ou nous serons consommateurs de véhicules électriques chinois ou américains », a défendu le ministre de l’Économie.

Critiquant de nouveau le programme du Rassemblement national, Bruno Le Maire a estimé que « la proposition de Marine Le Pen aboutirait à ce que, dans dix ans, la France roule en Tesla ou en BYD [fabriquant chinois de voitures électriques] ». Pour le moment, les voitures électriques chinoises à prix cassé continuent en tout cas d’inonder le marché européen. En 2023, Pékin a ainsi exporté plus de 4 millions de véhicules à travers le monde, un chiffre en hausse de 58 % par rapport à l’année précédente. En septembre dernier, la Commission européenne a lancé une enquête pour évaluer cette concurrence potentiellement déloyale. À la suite de ces travaux, l’Union européenne pourrait décider d’imposer des droits de douane aux constructeurs chinois.

Dans la même thématique