Comment traduire le #MeToo du cinéma français dans la loi ? A l’heure où le témoignage de Judith Godrèche a relancé des vagues de témoignages de violences sexistes et sexuelles subies dans le milieu du cinéma, c’est le pari que font deux sénatrices écologistes, Monique De Marco et Mathilde Ollivier. Elles se saisissent de l’examen au Sénat d’un texte sur la filière cinématographique pour déposer des amendements en ce sens.
Des amendements déposés avant les révélations de Judith Godrèche
Dans une tribune parue dans Le Monde le 12 février dernier, les deux sénatrices appelaient à des « réponses législatives » aux « femmes du cinéma ». Quelques jours avant les révélations de Judith Godrèche des agressions sexuelles dont elle aurait été victime par Benoît Jacquot et Jacques Doillon, Monique De Marco a déposé des amendements à une proposition de loi transpartisane visant à renforcer la filière cinématographique en France, discutée en séance ce soir. La sénatrice voulait mettre le sujet des violences sexuelles et sexistes au cinéma « sur le devant de la scène ». « Il y a très peu de textes sur le cinéma, c’était l’occasion de faire avancer le texte sur la parité », explique-t-elle à publicsenat.fr. Sa démarche a donc été justifiée, quelques jours plus tard, par ce qui est déjà appelé le « #MeToo du cinéma français ».
Des mesures pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles dans le milieu du cinéma
La proposition de loi visant à renforcer la filière cinématographique en France est issue d’un rapport sénatorial de Céline Boulay-Espéronnier, Sonia de la Provôté et Jérémy Bacchi, remis en mai 2023. Le texte prévoit entre autres de subordonner les aides versées par le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) à une rémunération minimale des acteurs, et de les moduler en fonction du respect de critères environnementaux.
Les amendements de la sénatrice De Marco sont de trois ordres : elle propose d’une part de faire figurer explicitement le respect la parité dans les missions du CNC. Elle propose d’autre part de former tous les professionnels à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Elle propose enfin de retirer les subventions versées par le CNC aux sociétés de production, en cas de condamnation pour violences sexistes ou sexuelles lors d’un tournage.
« C’est dommage que lors de la première lecture en commission, personne n’ait compris ma demande »
A la grande déception de la sénatrice, en commission, ses propositions avaient été rejetées. « Je suis très surprise », se désole-t-elle, « c’est dommage que lors de la première lecture en commission, personne n’ait compris ma demande ». Mais depuis, les témoignages d’actrices se succèdent et la tribune que Monique De Marco a signée avec Mathilde Ollivier est parue dans Le Monde. Les avis ont un peu changé. « Réflexion faite, les membres de la commission sont un peu revenus [sur leur rejet des amendements] », explique-t-elle. Ce matin en effet, la commission de la culture se réunissait pour examiner les amendements présentés en séance ce soir et émettre un avis. Elle a ainsi émis un avis favorable à l’amendement de la sénatrice visant à retirer les subventions du CNC en cas de condamnation pour agression sexiste ou sexuelle. « Cependant, les amendements sur la parité ont été repoussés », regrette-t-elle. Elle les défendra tout de même dans l’hémicycle ce soir.