Si Dorothée Olliéric devait revivre sa vie, elle signerait sans hésiter. En donnant un seul conseil à la petite fille traqueuse qu’elle était. « Accroche toi bien, ça va secouer », un euphémisme tant elle a croisé les conflits. L’ex-Yougoslavie, le Rwanda, la centre Afrique, l’Afghanistan…Depuis trente ans sa vie secoue, aux quatre coins du globe, pour raconter les guerres dont elle est une témoin privilégiée.
Aujourd’hui, c’est elle qui se raconte, dans un livre, Maman s’en va-t-en guerre (ed.du Rocher). Un livre comme un mémoire, ponctué de photos d’archives, d’anecdotes, de souvenirs d’abord dédié à ses enfants. « Je voulais leur expliquer pourquoi j’ai manqué des noëls, des anniversaires », raconte Dorothée Olliéric. Un livre dédié aussi à toutes les jeunes femmes qui ont envie de faire ce métier. « Aujourd’hui encore, de jeunes reporter de guerre me demandent : est-ce que je pourrai avoir une vie de famille, des enfants ? Je leur réponds : oui, plus qu’avant, tu n’auras pas à choisir entre ton métier et ton rôle de mère. Ça va être dur mais c’est de l’organisation » assure Dorothée Olliéric.
Concilier sa maternité et son métier ? Elle regrette que cela reste une question posée aux femmes. « L’image du baroudeur est encore associée à notre profession. On ne pointe pas du doigt le mauvais père, on ne lui demande pas de se justifier. La culpabilisation, la charge mentale reviennent aux femmes. » Exemple à l’appui. « Une enseignante de mon fils m’avait dit : je sais très bien ce que vous faites, vous allez barouder sur des terrains de guerre. Vous ne pensez pas que vos enfants ont besoin d’une mère, que vous vous êtes amusée assez longtemps ? C’était d’une violence. J’ai pleuré comme une gamine. Et je suis repartie à la guerre », raconte-t-elle dans un sourire.
« En Afghanistan, on m’a dit : tu ne vas jamais pouvoir bosser. »
Dans la vie comme sur le terrain, « être une femme ne doit pas être un obstacle », martèle-t-elle. Avec sa force tranquille, Dorothée Olliéric arrive à ses fins. « Quand je suis allée en en Afghanistan, on m’a dit : tu ne vas jamais pouvoir bosser. Avec mon « fixeur », nous interrogeons un Taliban. Il m’explique que le régime va renvoyer les femmes à la maison. J’incarne ce qu’il rejette. Il refuse me regarder dans les yeux pendant l’interview mais il répond à mes questions et moi je fais mon boulot ».
« Mon combat féministe est en Afghanistan. »
Si elle est une figure d’émancipation, c’est vers l’Afghanistan que le combat féministe de Dorothée Olliéric se porte. « Aujourd’hui c’est le pire pays où naître de sexe féminin. Je suis en contact avec jeunes femmes sur place qui sont désespérées. Qui va intervenir pour les aider ? Les Américains et les Européens ne vont pas y retourner. Mon cœur est déchiré devant le sort des femmes afghanes, qui ne peuvent plus aller à l’école, à l’université. Mon combat féministe il est là, il n’est pas en France où il y a aussi des choses à faire. Crions, n’arrêtons jamais de parler d’elles pour essayer de faire bouger les choses. »
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