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Les sénateurs proposent un retour de la redevance pour financer l’audiovisuel public

En déposant une proposition de loi sur le financement de l’audiovisuel public, le groupe socialiste souhaite mettre en place une nouvelle contribution progressive. Une question qui devrait animer les débats parlementaires, alors que les élus doivent trouver un nouveau mode de financement avant la fin de l’année.
Henri Clavier

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« Il y a urgence, il faut absolument trouver un financement pour l’audiovisuel public avant la fin de l’année 2024 », assure la sénatrice socialiste d’Ille-et-Vilaine, Sylvie Robert, à l’initiative d’une proposition de loi visant à modifier le mode d’affectation des ressources vers les différents médias de l’audiovisuel public. En effet, depuis la suppression de la redevance télévisuelle en 2022, le budget de l’audiovisuel public est abondé par une fraction de TVA. Seulement voilà, ce mode de financement est temporaire et nécessite une modification de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) pour pérenniser ce mode de financement. En effet, l’entrée en vigueur d’une disposition nouvelle de la LOLF exclut le mode de financement par une fraction de TVA à partir de 2025.

Dans ce contexte, plusieurs propositions de loi ont été déposées pour trouver une solution satisfaisante. Alors que la réforme prévoyant la création d’une holding regroupant les différentes entreprises de l’audiovisuel public est en suspens depuis la dissolution, la priorité semble désormais d’éviter un financement direct de l’audiovisuel public par le budget de l’Etat.

Le risque d’une budgétisation

« Si l’on ne trouve pas une solution, on risque une budgétisation. Cela aurait des conséquences dramatiques, ça veut dire que le financement de l’audiovisuel public ne serait plus déterminé en fonction d’objectifs clairs et chiffrés » s’inquiète Sylvie Robert. Cette dernière insiste sur le risque que représenterait cette solution, pointant la possibilité de diminuer drastiquement les crédits en cas de conflit avec des acteurs politiques. La campagne des législatives a d’ailleurs rappelé l’opposition de certaines forces politiques, comme le RN, à l’existence même d’un service public de l’audiovisuel. En effet, le parti de Marine Le Pen proposait de privatiser les entreprises de l’audiovisuel public.

« L’essentiel c’est de faire en sorte qu’on ait un texte évitant l’affectation budgétaire, c’est la priorité », abonde Catherine Morin-Desailly, sénatrice centriste de Seine-Maritime, également à l’initiative d’une proposition de loi sur le financement de l’audiovisuel public. Cette dernière attire notamment l’attention sur la nécessité de ne pas déroger au droit européen et en particulier au European Media Freedom Act. L’article 5 de ce règlement européen, en vigueur depuis le mois de mai, dispose que les Etats membres doivent assurer des ressources financières pérennes et suffisantes aux médias du service public. Les ressources doivent, par ailleurs, être déterminées par des critères transparents et des objectifs préalablement établis. « Le gouvernement a choisi un financement à travers l’allocation d’une fraction de TVA dans la précipitation, sans réellement savoir comment cela allait être financé et sans échanger avec le Parlement. On savait très bien que cette fraction de TVA n’était pas pérenne », déplore la sénatrice d’Ille-et-Vilaine.

« Il faut un financement pérenne, prévisible et qui permette de donner de la visibilité »

A travers sa proposition, le groupe socialiste souhaite introduire une nouvelle redevance télévisuelle afin de garantir des ressources stables pour l’audiovisuel, c’est-à-dire autour de 4 milliards d’euros annuels. « Il faut un financement pérenne, prévisible et qui permette de donner de la visibilité afin que l’audiovisuel public puisse compter sur des ressources stables qui sont indispensables pour l’investissement et la création », explique Sylvie Robert. La proposition socialiste est d’ailleurs une version actualisée et consolidée de la mouture présentée par le groupe après la suppression de la redevance. » Réintroduire une redevance serait difficilement compréhensible pour les citoyens compte tenu de sa suppression récente. Ce sont les socialistes avaient annoncé fin 2012 qu’ils allaient réformer la redevance audiovisuelle ça n’a jamais été fait, nous sommes tributaires de cette situation », tacle Catherine Morin-Desailly plutôt favorable à un prolongement du mode actuel de financement grâce à une modification de la LOLF.

Jusqu’en 2022, la redevance audiovisuelle prenait la forme d’une contribution forfaitaire payée par tous les détenteurs d’un téléviseur. Une formule jugée inéquitable par le Président de la République qui avait alors fait de la suppression de la redevance un élément de son programme.

Une redevance progressive, en fonction des ressources du foyer fiscal

Conscient de la nécessité d’opter pour un mode de financement plus juste, le groupe socialiste propose une forte progressivité dans les contributions. « Cette nouvelle redevance serait, plus juste et plus efficace fiscalement. Elle repose sur une progressivité de la contribution en fonction des revenus du foyer fiscal avec un montant minimum de dix euros par foyer pour assurer l’universalité du dispositif », explique Sylvie Robert. Selon cette formule, les contributions pourraient aller de 10 euros à 350 euros. Le groupe socialiste suggère aussi la création d’une autorité de contrôle du fonds de contribution composée de parlementaires et de représentants des usagers chargée de contrôler la répartition des financements entre les différentes entreprises.

Plusieurs propositions sur la table à la rentrée

Malgré l’absence de gouvernement, le financement de l’audiovisuel public pourrait rapidement devenir un des sujets brûlants de la rentrée parlementaire, compte tenu de l’urgence du dossier. « Il y aura forcément un débat, on reste ouvert sur la question Notre proposition de loi est sans doute la plus simple, mais nous sommes ouverts à la discussion », assure Catherine Morin-Desailly, en position de force au Sénat. Côté socialiste, on compte sur une collaboration efficace avec le groupe de l’Assemblée nationale qui a raflé la présidence de la commission de la culture à la suite des élections législatives. « J’espère qu’on se retrouvera, avec les autres groupes, sur la nécessité de trouver un mode de financement et éviter la budgétisation. J’ai également confiance dans la collaboration avec le groupe de l’Assemblée et la présidente de la commission de la culture qui est socialiste », indique Sylvie Robert.

Pourtant, c’est la proposition de loi de Catherine Morin-Desailly, soutenue par la coalition majoritaire au Sénat entre LR et l’Union Centriste, qui pourrait d’abord être examinée. « Le président Gérard Larcher m’a assuré qu’il veillerait à ce que notre texte soit rapidement inscrit à l’ordre du jour », lance la sénatrice de Seine-Maritime.

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