« Je n’ai aucune idéologie politique » : quand Vincent Bolloré défendait CNews, une « chaîne de débats »
Saisi par Reporters sans frontières, le Conseil d’Etat demande à l’Arcom d’appliquer un décompte plus strict des temps de parole sur CNews. La chaîne d’information du groupe Vivendi est souvent pointée du doigt pour sa proximité avec une certaine droite, ce dont s’était vivement défendu Vincent Bolloré, son principal actionnaire, à l’occasion d’une audition au Sénat en 2022.
Une épée de Damoclès pèse sur CNews, vitrine médiatique du groupe Vivendi. Le Conseil d’Etat a demandé mardi à l’Arcom, autorité régulatrice des médias, d’étendre son contrôle sur la chaîne d’information, régulièrement accusée de faire la promotion d’une droite ultraconservatrice ou encore de véhiculer des informations tronquées. La plus haute juridiction française « enjoint à l’Arcom de réexaminer dans un délai de six mois le respect par la chaîne CNews de ses obligations en matière de pluralisme et d’indépendance de l’information ».
Le Conseil d’Etat demande plus spécifiquement que le respect du pluralisme soit apprécié au regard des interventions des chroniqueurs et animateurs de la chaîne, et plus seulement des seuls invités politiques. Cette décision pourrait bien ne pas être sans conséquences pour les autres chaînes et antennes radio du paysage audiovisuel, risquant désormais de se voir imposer le même type de contrôle. Cette décision intervient après un recours de l’ONG Reporters sans frontières (RSF), qui estime que CNews « est devenue un média d’opinion ». Vincent Bolloré, principal actionnaire du groupe Vivendi, avait déjà eu à s’en expliquer devant le Sénat, il y a tout juste deux ans.
« Notre intérêt n’est pas politique, il n’est pas idéologique, c’est un intérêt purement économique »
Petit retour en arrière : nous sommes en janvier 2022. Le Sénat vient d’ouvrir une commission d’enquête parlementaire sur la concentration des médias. Patrick Kanner, le patron du groupe socialiste, est à l’origine de cette initiative. L’ancien ministre de François Hollande l’avoue sans ambages : la mainmise de Vivendi, propriété de Vincent Bolloré, sur le groupe Lagardère soulève des interrogations au vu de la coloration politique prise par les médias que détient ce dernier : « Quand je vois qu’Europe 1 aujourd’hui, c’est CNews, je m’inquiète de la tonalité éditoriale ». À plus forte raison en période de campagne présidentielle.
Vincent Bolloré est auditionné sous serment dans la soirée du 19 janvier, un échange de deux heures, marqué par une série de passe d’armes, notamment avec le rapporteur socialiste David Assouline. Le sénateur revient à la charge à plusieurs reprises sur la ligne éditoriale adoptée par les médias du groupe Canal +, le pôle médias de Vivendi, et plus particulièrement la chaîne CNews. Devant les élus, l’industriel assure qu’il n’a aucun projet politique et défend une vision strictement économique. « Le secteur des médias dans le monde est le deuxième secteur le plus rentable après le luxe. Notre intérêt n’est pas politique, il n’est pas idéologique, c’est un intérêt purement économique. Depuis 20 ans, ce groupe s’est constitué uniquement sur des questions économiques. Le segment de l’information, pour nous, est absolument insignifiant en chiffre d’affaires », explique Vincent Bolloré.
« Je n’ai pas le pouvoir de nommer qui que ce soit à l’intérieur des chaînes »
David Assouline évoque rapidement le cas d’Éric Zemmour. À cette période, le polémiste d’extrême droite, qui a longtemps officié sur CNews, est donné autour de 14 % dans les sondages pour le premier tour de l’élection présidentielle. Le groupe Canal est visé par certains commentateurs pour avoir permis l’ascension médiatique d’un candidat qui, par ailleurs, a été condamné à plusieurs reprises pour « provocation à la haine et à la violence », notamment pour des propos tenus en 2020 au micro de CNews sur les mineurs isolés. « Monsieur Zemmour lui-même dit dans son livre que c’est vous qui l’avez convaincu de rejoindre la chaîne. Il était déjà condamné pour des propos », pointe David Assouline.
« Je rencontre beaucoup de gens, j’essaye de faire venir beaucoup de gens et malheureusement, ou heureusement pour moi, Monsieur Zemmour était déjà très connu avant de me rencontrer pour la première fois. Il vendait déjà des centaines de milliers de livres, il était sur les autres chaînes, cela ne posait aucun problème », répond Vincent Bolloré, qui minimise également son pouvoir d’intervention sur les médias qu’il détient. « Je n’ai pas le pouvoir de nommer qui que ce soit à l’intérieur des chaînes. Je peux proposer, je peux donner mon avis, je peux dire ‘ne pensez-vous pas que… ‘ Et si quelqu’un ne veut pas le faire, il ne le fait pas. J’ai quatre, cinq, six, sept personnes qui sont toutes connues pour leur force. Si elles considèrent que ce n’est pas bon pour le groupe, elles ne le feront pas. Ma capacité personnelle à imposer des choses n’est pas très importante contrairement à ce que vous pensez. »
Lors de cette audition, le milliardaire s’était également défendu de toute affinité avec l’extrême droite. « Je n’ai aucune idéologie politique. Dans mon ADN, en dehors du fait que j’ai toujours dit que j’étais démocrate-chrétien, la seule chose que l’on peut trouver, c’est la liberté », soutient-il. Nouvelle attaque de David Assouline : « Vous vous définissez comme démocrate-chrétien. Est-ce que le racisme et le négationnisme sont des valeurs démocrates chrétiennes ? Je ne crois pas. Est-ce à votre insu qu’une telle ligne éditoriale s’impose dans les médias que vous contrôlez ? » Piqué au vif, Vincent Bolloré avait alors riposté en sortant de son portefeuille une lettre adressée par le général de Gaulle à son père, le résistant Michel Bolloré.
« Nous sommes là pour être sur la liberté d’expression »
Laurent Lafon, le président centriste de la commission d’enquête avait tenté de relancer le milliardaire de manière plus consensuelle : « Un certain nombre d’observateurs des médias constatent que la chaîne CNews n’est pas loin d’être une télé d’opinion, est-ce que vous partagez ce constat ? ». Dénégation immédiate de l’homme d’affaires, qui préfère parler d’une « chaîne de débats », reprenant une formule de Thomas Bauder, le directeur de l’information de CNews, auditionné quelques jours plus tôt par la même commission d’enquête. « En France, il n’y a pas de télé d’opinion, c’est interdit. Nous ne travaillons ni pour un parti, ni pour un candidat, ni même pour une idée », avait alors soutenu le journaliste.
« Personne n’a l’ambition ou l’intention ou l’erreur d’essayer de faire des chaînes d’opinion, ce n’est pas l’objectif du groupe Vivendi-Canal, cela n’a pas d’intérêt », avait abondé Vincent Bolloré devant les sénateurs. « Nous sommes là pour être sur la liberté d’expression, et nous sommes là pour donner à nos clients qui veulent voir du sport, du cinéma et des séries sur Canal le mieux de ce que l’on peut donner dans ce domaine ».
Les chaînes C8 et NRJ 12 cesseront d’émettre sur la TNT à partir de ce vendredi 28 février, à minuit. Mais il faudra attendre quelques mois avant de retrouver de nouveaux programmes, dont Public Sénat et LCP-Assemblée nationale sur le canal 8.
Comédien-monument, il a incarné les héros les plus emblématiques du théâtre Français : Don Juan, Tartuffe, Monte-Cristo ou Cyrano. Dans sa dernière pièce, il joue un personnage plus contemporain : François Genoud, banquier nazi. Pour lui, la scène est un lieu éminemment politique, qui interroge notre époque. Le recul de notre démocratie, l’instrumentalisation des faits divers et les dérives de la société du commentaire sont autant de sujets qui l’inquiètent. Cette semaine, Rebecca Fitoussi reçoit le comédien Jacques Weber dans l’émission « Un monde, un regard ».
Dans une autre vie elle a été avocate, avant de bifurquer vers celle d’humoriste. Elle qui craignait de ne plus se sentir utile, elle manie le rire comme une plaidoirie pour dénoncer et exorciser les drames de sa vie : le deuil, les agressions sexuelles…Et faire passer des messages : en faveur du féminisme, contre le retour des masculinistes. Cette semaine, Rebecca Fitoussi reçoit l’humoriste Caroline Vigneaux dans « Un monde, un regard ».
Comédien au théâtre, acteur de cinéma et un temps conseiller municipal, il est un citoyen engagé sur scène comme à la vie. Alors que la gauche française apparaît plus divisée que jamais, il se confie son désarroi, sa relation à la politique et la panne de la démocratisation culturelle. Cette semaine Philippe Torreton est l’invité de Rebecca Fitoussi dans l’émission Un monde, un regard sur Public Sénat
Le
Le direct
Macron, un président que tout le monde nous envie ?
Macron, un président que tout le monde nous envie ?