« BBC à la française, quel beau slogan malheureusement vide de sens. » La sénatrice (PS) Sylvie Robert a interrogé ce 22 mai la ministre de la Culture sur sa volonté d’aboutir à une fusion des différentes sociétés de l’audiovisuel public, à l’occasion des questions d’actualité au Sénat. Le projet inquiète fortement les salariés. En désaccord total avec le projet de fusion proposé pour le 1er janvier 2026, les syndicats des deux principales sociétés, Radio France et France Télévisions, ont appelé à la grève en fin de semaine, au moment où la réforme sera examinée à l’Assemblée nationale.
« Si vous voulez réellement protéger l’audiovisuel public, comme vous le dites, ne passez pas en force. Reconnaissez que votre projet n’est pas mûr », a invité la sénatrice d’Ille-et-Vilaine, vice-présidente de la commission de la culture. La socialiste a épinglé la « cacophonie » au sein de l’exécutif et de la majorité présidentielle, concernant le sort de l’audiovisuel extérieur (France Médias Monde) ou encore le volume de la publicité sur les ondes du service public.
Alors que nombre de ses prédécesseurs se sont prononcés contre l’idée d’une fusion de l’audiovisuel public, Rachida Dati a affirmé que la réforme n’était « pas tombée du ciel ». « Cela fait plus de 10 ans qu’elle est connue. Vous-même vous en avez débattu ici […] Les enjeux ont été identifiés », a rappelé la ministre de la Culture. Le gouvernement s’est en effet appuyé sur la proposition de loi de la majorité sénatoriale de droite et du centre, portée par Laurent Lafon (Union centriste), adoptée l’an dernier au Sénat.
« Une réforme ambitieuse, très attendue par les Français eux-mêmes »
Une explication surprenante pour Sylvie Robert, qui s’est empressée de rappeler, dans sa réplique, que le texte prévoyait la création d’une « holding », une société commune aux différentes maisons de l’audiovisuel, « et non la fusion ».
« Aujourd’hui, certains ont le sentiment qu’on va revenir à l’ORTF. Est-ce que nous sommes dans le même contexte ? Pas du tout », a rétorqué la ministre de la Culture. L’ancienne élue LR, qui a rendu hommage au rapport des sénateurs de droite Roger Karoutchi et Jean-Raymond Hugonet, a souligné qu’il existait actuellement 26 chaînes privées et que des groupes privés étaient en train de structurer et de « rassembler leurs forces, face à un audiovisuel public dont les forces sont très dispersées ». Rachida Dati a, en outre, insisté sur le vieillissement de l’audience des télévisions et radios publiques. « Ça nécessite de revoir l’audiovisuel public […] Évidemment, on ne va uniformiser ni les métiers ni les activités […] C’est une réforme ambitieuse, très attendue par les Français eux-mêmes », a-telle précisé.
La réforme paraît d’autant « précipitée » que la question de son financement n’a pas été « clarifiée », selon Sylvie Robert. Or, ce point aurait dû être un « préalable indispensable », a-t-elle fait savoir. Rachida Dati a confirmé la piste d’un prélèvement sur recettes, un système qui fait débat au sein de la commission de la culture au Sénat. « Ce sera un mode de financement totalement inédit », a-t-elle déclaré.
Ses réponses n’ont dissipé aucune des craintes exprimées par la sénatrice. « L’audiovisuel public va bien, il est plébiscité par ses auteurs et ses auditeurs, pourquoi le fragiliser, le déstabiliser ? »