« Le succès du cinéma français est unique et il n’existerait pas sans le soutien de Canal + », a martelé Maxime Saada, président du directoire de Canal +, auditionné au Sénat ce 29 janvier. Avec 220 millions d’euros investis chaque année, le groupe est en effet le premier financeur du secteur. Une position qui lui accorde une place de choix dans la « chronologie des médias » : les films peuvent être diffusés sur Canal + six mois après leur sortie au cinéma, le laps de temps le plus court actuellement.
Mais cette situation pourrait bientôt changer. Disney + aurait négocié avec le secteur du cinéma pour diffuser les films sur sa plateforme seulement neuf mois après leur sortie en salle, contre 17 actuellement. En contrepartie, le géant américain devrait investir « 115 millions d’euros » dans le secteur, sur trois ans, soit « 38 millions d’euros par an en moyenne », explique Maxime Saada.
Une aide qui pourrait être réduite à 50 millions d’euros
Un montant jugé bien trop faible par le patron du groupe Canal +. « Si Disney est à 9 mois pour 35 millions d’euros, pour Canal +, il y a un sujet sur les 220 millions d’euros pour 6 mois », juge-t-il. Devant les sénateurs, Maxime Saada laisse ainsi planer la menace d’une forte diminution des investissements de son groupe.
Calculé pour être proportionnel à la totalité du chiffre d’affaires de Canal +, le montant de l’aide pourrait ainsi être amputé de 100 millions d’euros, voire plus, si le groupe décide de scinder ses activités pour réduire artificiellement son chiffre. « Si demain, Canal + sépare le sport et le cinéma dans son modèle, l’obligation est divisée par deux, donc les 100 millions deviennent mécaniquement 50 millions », explique Maxime Saada. « On me dit « c’est une menace, tu ne le feras jamais », mais en fait c’est à l’étude ! », met-il en garde.
Le patron du groupe affirme, par ailleurs, que Canal + était « prêt à signer » avec le secteur du cinéma pour reconduire le financement de 220 millions d’euros pour les cinq prochaines années. Un accord que le secteur n’aurait « pas souhaité » signer, affirme-t-il. « Pour les organisations du cinéma, la question c’est : est-ce qu’elles préfèrent un modèle dans lequel Canal + contribue largement, quitte à dépendre de lui, ou est-ce qu’elles veulent se libérer de cette dépendance, en prenant le risque de perdre 150 ou 200 millions d’investissements du groupe Canal ? », résume Maxime Saada. Une question qui a tout d’un ultimatum.